L'Histoire (la grande !)

Les Vikings : le Rouge dans toute sa splendeur

Introduction

Que vous ayez lu ma petite « biographie » ou parcouru mon article sur Casanova (un magnifique « type 7 » selon le système de l’ennéagramme), ou celui sur Emma Bovary (l’archétype du « 4 » !^^), vous le savez à présent : je suis passionnée par tout ce qui se rapporte, de près ou de loin, à la psychologie et à tout ce qu’on appelle aujourd’hui (plutôt vaguement, d’ailleurs) « développement personnel ».

Il est, parmi tant d’autres, une formation que j’ai suivie et qui m’a paru comporter un certain nombre d’éléments dignes d’intérêt. Peut-être m’a-t-elle tout particulièrement plu en raison de sa dimension historique et socio-culturelle : il s’agit en effet d’une approche comparant la croissance personnelle de tout être humain – de l’enfance à la maturité –à l’Histoire de l’humanité dans son ensemble – des origines à nos jours –, et qui étudie ainsi à la fois l’évolution de l’humanité tout entière (des âges les plus anciens jusqu’aux différentes cultures encore existantes aujourd’hui) et l’évolution spirituelle de chaque être humain pris dans son individualité (de la naissance à l’âge adulte).

Une approche, donc, tout aussi liée à l’analyse de l’Histoire de l’humanité et à la psyché collective de « chaque peuple » (mon rayon, ça !^^) qu’à celle de la croissance personnelle de chacun au cours de sa vie : la Spirale dynamique.

Comme pour l’ennéagramme et Casanova (ou l’ennéagramme et Emma Bovary), une petite présentation du modèle de la Spirale Dynamique dans son ensemble s’impose, avant que de zoomer sur les deux « couleurs » nous intéressant tout spécialement au regard de la civilisation viking : le Rouge… mais aussi le Bleu.

La Spirale Dynamique : le modèle

Présentation générale

L’idée de la Spirale Dynamique est que chaque être humain, au cours de son évolution personnelle, revit en accéléré l’histoire de l’humanité de la Préhistoire à nos jours, et passe, de l’enfance à l’âge adulte, par les différentes « phases » socio-culturelles (mentales, comportementales etc.) traversées par ailleurs par les diverses civilisations au cours du temps.

Il s’agit d’un modèle intégratif, c’est-à-dire incomplet et ouvert, prêt à intégrer de nouveaux « niveaux » au fur et à mesure de leur apparition (puisque le monde lui-même est en constante évolution, une évolution d’ailleurs en pleine accélération depuis quelques siècles, conduisant à l’apparition de nouveaux « étages » de plus en plus vite).

Ce modèle fut conceptualisé en 1980 aux Etats-Unis par Clare Graves (qui cherchait, avec ses étudiants, à définir la « maturité psychologique » − ce qu’il ne parviendra jamais à faire de façon définitive, vous comprendrez vite pourquoi) et fut appliqué et affiné par ses élèves, Don Beck et Christopher Cowan. Il fut notamment utilisé dans le cadre de l’accompagnement de Nelson Mandela afin de l’aider à traiter pacifiquement la fin de l’Apartheid… !

La Spirale en résumé

L’idée globale de la Spirale est que l’humanité s’est développée étape par étapeen se complexifiant chaque fois davantage, chaque nouvelle étape incluant et transcendant les précédentes.

Chacun de ces niveaux de développement est caractérisé par :

  • Une vision du monde
  • Un système de valeurs primordiales
  • Des stratégies de survie
  • Des comportements privilégiés
  • Des limites conduisant peu à peu à l’étape suivante (destinée à les transcender, chaque niveau ne pouvant, en soi, résoudre les problèmes qu’il a lui-même créés) : ainsi, l’humanité évolue et passe d’un niveau à l’autre à l’occasion de crises de passage l’amenant chaque fois à une nouvelle page de son Histoire (à différentes vitesses selon les pays et les continents).

La Spirale attribue à chaque « niveau » ainsi identifié un code couleur/lettres. Dans l’ordre :

  • AN – Beige
  • BO – Violet
  • CP – Rouge
  • DQ – Bleu
  • ER – Orange
  • FS – Vert
  • GT – Jaune (ou AN’)
  • HU – Turquoise (ou BO’)

De son côté, l’être humain (pris dans son individualité) se développerait exactement de la même manière et en suivant les mêmes étapes (dans le même ordre), se complexifiant lui aussi peu à peu en termes :

  • de rapport à son corps
  • de pensée
  • de vision du monde
  • de gestion des émotions
  • de valeurs prioritaires etc.

Et, tout comme l’Humanité, l’humain vit également des crises évolutives (qu’il peut passer seul ou accompagné), souvent indispensables pour permettre à un nouveau stade de son évolution personnelle d’apparaître.

NB : Le modèle de la Spirale Dynamique vise moins l’idée d’un retraçage synthétique et systémique (passionnant, à mon goût) de l’Histoire de l’humanité qu’une profonde compréhension de soi et, surtout, la découverte de perspectives d’évolution personnelles (chacun, même s’il est libre de rester où il est, est invité par cette approche à se transcender et à aller plus loin que ses acquis par une percée évolutive). Néanmoins, férue d’Histoire au moins autant que de psychologie, je n’ai pu m’empêcher de me passionner pour ce que la Spirale nous propose comme approche des différentes cultures et grandes civilisations des temps passés… et actuels.

Les différents niveaux de la Spirale dynamique – en bref

AN – Beige
Survie et Instincts

Premier de tous les niveaux, l’étage beige constitue le socle de la Spirale : à ce titre, tous les niveaux suivants l’incluent et le transcendent.

Devise : « Je vis ou je meurs »

Niveau individualiste (vs le niveau suivant, collectif : dans le modèle de la Spirale, les niveaux individualistes et collectifs interviennent en alternance)

Mots-clés et Valeurs dominantes : survie biologique, instincts, besoins primaires (boire, manger, dormir, se reproduire), qui-vive, cerveau reptilien et cerveau moyen, sécurité physique, gestion des dangers

Pensée automatique et instinctive (pas de système de valeur conscient)

Le monde est perçu comme un milieu naturel dangereux

Chronologie dans l’Histoire de l’humanité : il y a 100 000 ans (l’homme de la préhistoire vivant en bandes éparses dans la nature, la savane…)

Chronologie en termes de développement humain : stade correspondant au nouveau-né, à la naissance (besoins primaires et survie exclusivement)

Le Beige dans les sociétés d’aujourd’hui : il ne reste pour ainsi dire sur la planète plus de populations vivant encore à ce niveau de la spirale. Seules quelques tribus aux Philippines (les Tasaday) et sur les îles Andaman se rapprochent du Beige. C’est d’ailleurs ce qui a valu à l’une de ces populations, les Jarawas des îles Andaman, de survivre au tsunami de 2004 qui a touché l’Indonésie… Les Jarawas ayant un mode de vie proche des chasseurs-cueilleurs de la Préhistoire (ils vivent très éloignés du monde moderne), ils s’étaient déjà mis à l’abri dans les hauteurs quand la vague géante a touché les côtes : leur conscience primaire (instinct de l’ordre de l’animal) et leur lecture de la nature environnante leur avaient permis d’anticiper le tsunami… Une capacité dont tous les membres des cultures dites « modernes » étaient alors pour leur part (et demeurent) totalement coupés…

Plus proche de nous, l’existence menée par les SDF ou les toxicomanes se rapproche du niveau beige également (leur préoccupation majeure demeurant : où vais-je dormir ? que vais-je manger ? voire, comment vais-je me procurer ma dose pour que mon corps n’ait pas l’impression de mourir ?), mais en réalité tout adulte frappé par la vieillesse, un accident, un handicap majeur ou la maladie (Alzheimer par exemple) peut également revenir à un niveau (proche de) AN-Beige, de même que toute personne brutalement soumise à des conditions de vie extrêmes (soldats sur les champs de bataille, réfugiés, survivants d’une catastrophe, rescapés sur une île déserte ou d’un crash aérien au beau milieu des Andes… etc.). Aucune communication ne sera possible (sur quelque niveau que ce soit) tant que les besoins vitaux n’auront pas été satisfaits (« ventre affamé n’a point d’oreilles »…)

Moments de réactivation de ce niveau dans nos vie quotidiennes : dès que notre survie est en jeu (maladie grave, accident, sénilité, faillite, danger physique soudain, catastrophe naturelle ou humaine, certaines guerres…) Comment le vit-on, comment y réagit-on ? → Peur extrême, repli, danger, attaque, fuite, agressivité… batailles rangées au rayon des rouleaux de PQ à l’approche de la fin du monde… (toutes mes excuses, c’était trop tentant^^)

Type de spiritualité :  l’individu n’est pas conscient qu’il a une conscience, donc pas de spiritualité à ce niveau-là. Toutefois, l’individu démontre une acuité sensorielle exceptionnelle, dont on peut imaginer qu’elle concerne également des éléments immatériels (énergies…).

Sexualité : instinctive, animale, liée à une pulsion de vie, à la simple reproduction pour la survie de l’espèce.

Outils thérapeutiques intéressants pour ce niveau : revécus de naissance, de vie fœtale, respiration en hyperventilation.

Limites de cette étape (amenant la transition vers le niveau suivant) : 

  • Rareté des ressources
  • … et facultés individuelles limitées
  • Conclusion : en s’associant entre membres d’une même espèce, les chances de survie sont plus grandes. C’est ce qui conduit au niveau 2 : le Violet.


BO – Violet
Fusion et groupe

Devise : « ensemble, nous sommes plus forts »

Niveau collectif (vs les niveaux individualistes comme le niveau précédent et le niveau suivant)

Mots-clés et Valeurs dominantes : sécurité offerte par le clan, sécurité émotionnelle, loyauté au clan, fusion, dépendance, rituels, superstitions, sacrifice du soi au profit des coutumes de la tribu, coopération, sécurité par le nombre, pouvoir de la parole, apprentissage de la pensée collective, phénomènes naturels interprétés comme des manifestations des esprits, fidélisation des individus aux coutumes et aux traditions…

Prenant conscience de ce que sa survie (tant physique que psychique, à ce stade) a davantage de chances d’être garantie s’il s’insère dans un clan, l’individu s’organise en tribus. Dès lors, le groupe (famille, communauté…) structure toute la psyché de l’individu… qui s’y soumet totalement.

Alors, le ventre plein et sa sécurité émotionnelle assurée, l’homme regarde le monde qui l’entoure (à la fois effrayant et mystérieux), prend peur et se sent subitement non plus seulement menacé par les dangers réels (fauves, dangers physiques etc.), mais aussi par ce qu’il ne comprend pas encore : les tempêtes, les orages, la foudre, les forces de la nature, les crues, les bruits nocturnes, les catastrophes naturelles etc. Avec le niveau BO-violet se développent donc les premières croyances, l’animisme etc.

Les individus à dominante violette sont particulièrement peu enclins aux initiatives, à toute forme de protestation, de résistance ou de remise en question du système et à la contestation du pouvoir des Anciens. Hors du clan, point de survie ; l’individu seul n’existe pas. L’ordre établi (hérité du passé) n’est jamais contesté.

Pensée tribale, animiste, traditionaliste.

Le monde est perçu comme effrayant et mystérieux.

Chronologie dans l’Histoire de l’humanité : apparition y a 50 000 ans : clans, tribus, tipis, magie, animisme, offrandes, rituels, respect du rythme des saisons et de la nature, du jour et de la nuit, croyance dans les esprits de la nature, des ancêtres, … Les sociétés amérindiennes précolombiennes, à titre d’exemple, relevaient du niveau Violet.

Chronologie en termes de développement humain : de 1 mois à environ 2-3 ans : l’enfant est alors le prolongement de sa mère, il dépend d’elle et vit dans un monde imaginaire extrêmement riche (amis imaginaires) marqué par une profonde connexion avec le monde animal (l’enfant parle aux animaux ou aux objets comme à des êtres humains, fait les questions et les réponses…), la psychomagie (idée que si quelque chose arrive, il y est pour quelque chose, impression d’influence et d’interconnexion), l’angoisse de la séparation (qui réactive le niveau beige)…

L’objet emblématique de ce stade est le fameux doudou, objet transitionnel qui symbolise la protection du groupe et assure la sécurité affective du tout petit. Cette pensée magique ne disparaîtra pas (totalement) en grandissant : pour preuve le succès d’Harry Potter, mais aussi de tout l’univers fictif du merveilleux (contes de fées, héroic-fantasy, Disney…) et du fantastique… (y compris chez nombre d’adultes !)

Les sociétés en BO-Violet aujourd’hui : aujourd’hui, Edward Beck estime qu’environ 10% de l’humanité est dominée par le thème BO-Violet : ce sont des populations Inuit, indonésiennes ou amérindiennes, comme les Wayuus de Colombie. Ces communautés sont menacées par notre monde moderne et les autres civilisations (dites « développées » – économiquement peut-être, mais certes pas sur le plan spirituel, nous y reviendrons), dominées par le thème ER-Orange.

On retrouve également ce niveau de façon dominante au sein du monde du cirque, dans certaines sectes, chez les gitans, au sein des mafias (la « famille », le « parrain »…), des entreprises paternalistes, des troupes de musiciens, dans les cultures où la famille est particulièrement importante, dans certains villages reculés, sur certains domaines terriens transmis de génération en génération… chez les Corses, les Siciliens, les Tchétchènes…

Moments de réactivation :  ce niveau, quoique dépassé dans les sociétés occidentales actuelles, est réactivé à l’occasion des manifestations de loyauté à l’égard de la famille (le « clan »), des relations interpersonnelles de dépendance, des manifestations de dépendance à l’égard de certains objets (fétiches, doudous…) ou à des substances (réconfortantes, petits plaisirs…), de la manière de s’impliquer dans sa famille… mais aussi à travers les sentiments d’abandon ou de rejet, l’importance de Noël, des fêtes familiales, des anniversaires, des mariages et des rituels familiaux… Il transparaît aussi dans le fait de donner un petit surnom à sa voiture (« magie » et vie des objets), ou de parler à son « p’tit con de PC » quand il ne veut pas marcher, dans le fait d’avoir des photos de sa famille sur son bureau, d’improviser une brève prière à l’attention de l’univers quand on espère de tout cœur que quelque chose arrive… Les rituels des peluches, les objets porte-bonheur et fétiches, les petits objets symboliques accrochés au rétroviseur intérieur, les sorties entre collègues, les pots de départ… tout cela participe du niveau violet encore vivant dans nos sociétés.

En temps de crise, ce système est particulièrement actif : les gens commencent à rechercher la sécurité d’un groupe et en ressentent cruellement le besoin. On l’a vu avec la crise du covid : resserrement des liens familiaux, déménagements pour se rapprocher de sa famille, prise de conscience de l’importance du groupe et de la « tribu », besoin de se rapprocher des amis, des voisins, de la communauté de son immeuble/quartier etc.

Type de spiritualité : Animisme, chamanisme, culte des ancêtres, pensée magique… On sacralise des animaux, des végétaux, des lieux, des objets, derrière lesquels s’expriment les esprits. On s’adonne à des rites magiques ou à des rituels pour partager et donc exister (la croyance étant que l’homme n’existe pas en tant qu’individu : pour exister, il faut être dans un collectif).

Sexualité : fusion-confusion des corps, sexualité doudou, réconfortante, surnoms (bébé, chaton…), l’odeur et le contact qui rassurent : l’autre comble un manque (dépendance).

Outils thérapeutiques intéressants pour ce code : psychogénéalogie, travail sur les lignées, les loyautés conscientes et inconscientes, constellations familiales individuelles ou groupales, rituels…

Limites du niveau, amenant la transition vers le niveau suivant : 

  • Du fait de la sécurité procurée par le groupe, la population s’accroît.
  • Nécessité donc d’agrandir le territoire et de trouver plus de nourriture… 
  • Conséquence : on se met à prendre aux autres ce qu’on n’a pas, les guerres arrivent.
  • Nécessité également, à titre individuel, de se différencier du groupe et d’exister (de nouveau) pour soi-même et par soi-même.

CP – Rouge
Pouvoir, force, et domination : la loi du plus fort

Devise : « j’existe ! »

Niveau individuel

Mots-clés et Valeurs dominantes : le pouvoir, la domination, la force, la loi du plus fort, la loi de la jungle, le courage, la bravoure, la volonté, la puissance, la gloire, la violence, le danger, l’exploitation, l’impulsivité, l’apparition de l’Ego (moi d’abord), l’expression du soi sans culpabilité pour une satisfaction immédiate des pulsions, la naissance de l’individualité, le développement (ou pas) de la capacité de chacun à imposer sa volonté aux autres, les rapports de soumission/domination (vs la coopération en Violet), les affrontements, la détermination, la nécessité de faire face au danger, les systèmes personnels de défense, l’égocentrisme, le manque de prise en considération des autres, le manque d’empathie, le respect de la force…

Le niveau Rouge correspond à la loi de la jungle : le plus fort a raison et s’impose (… ou survit, tout simplement). Pour les individus qui évoluent à ce niveau de conscience il est vital d’être fort, respecté et reconnu comme tel. Le CP-Rouge ne se soucie pas de la conséquence de ses actes sur les autres. Il vit dans l’immédiateté et veut assouvir ses besoins et ses désirs sans attendre. C’est le stade du chacun pour soi. Les individus centrés en CP-Rouge ont un besoin crucial d’être respectés et ne respectent eux-mêmes que la force, le charisme, l’honneur, un pouvoir mérité et une domination justifiée.

Pensée égocentrique

Le monde est perçu comme un gâteau dont il faut croquer la plus grosse part, ou comme une jungle ; la nature doit être conquise et les territoires (royaumes, nouvelles contrées…) explorés et annexés (par la force s’il le faut).

Apparition dans l’Histoire de l’humanité : il y a 10 000 ans. Les grandes invasions, les grands empires (romain, macédonien, carthaginois, aztèque…), les peuples « barbares » (Huns, Wisigoths, Francs, Alamans, Ostrogoths…), les Vikings… (Ah ! nous y voilà ! Mais nous y reviendrons…) A titre personnel, certains grands personnages de l’Histoire (les conquérants de tout poil) seront également à dominante rouge : Alexandre le Grand, Jules César, Cléopâtre, mais aussi, plus tard, les Conquistadors, Napoléon… La Révolution Française (et la Terreur qui suivra) sera un cuisant exemple de crise Rouge en plein contexte général Bleu (nous y reviendrons).

Etape dans le développement humain : de 2-3 ans jusqu’à 5-6 ans, quand l’enfant prend conscience de lui-même et de son individualité, ainsi que de son pouvoir personnel = la fameuse phase du « NON », de l’intolérance, de la frustration, de la violence physique (l’enfant frappe ses camarades, jette et brise des objets, s’impose par la force…), de l’appropriation, de la possessivité, de la jalousie, de la convoitise, du « rapt », de l’accaparement, de l’opposition par les crises de colère, de l’apparition des comportements égocentriques et  impulsifs, de la construction de l’identité individuelle…

Le Rouge dans les sociétés d’aujourd’hui : Au XXIe siècle, environ 20% de la population mondiale est centrée en CP-Rouge. Il s’agit souvent de communautés vivant en Afrique et au Moyen-Orient. Plus près de nous, en Occident, les populations des fameuses « banlieues » sont souvent également ancrées dans le Rouge (honneur, ego, pouvoir, rapport de force, loi de la jungle, « œil pour œil, dent pour dent », systèmes de vengeance, violence physique et verbale, intimidation, loi du plus fort, respect du chef, incivilités, absentéisme à l’école, provocations, honte sur celui qui perd la face…)

Le niveau Rouge se manifeste aussi dans les sports de contact physique et de force comme le rugby, dans le hooliganisme, les mafias (idéologie souvent violette mais moyens d’action et lutte pour le pouvoir rouges), les gangs, les putschs, les coups d’Etat, les guérillas et les hiérarchies de domination dans les prisons, ainsi que dans nombre d’œuvres de fiction (James Bond, Games of Thrones…)

Dans nos relations, c’est la force du Rouge qui nous permet de nous affirmer et qui s’exprime lors des conflits « version latine » (assiettes qui volent, portes qui claquent, cris et scènes). C’est aussi l’énergie de l’entrepreneur qui tape du poing sur la table avec la détermination de régler un problème, des abus de pouvoir…

Moments de réactivation : dès qu’on ne respecte pas nos limites, notre territoire. Quels « symptômes » ?^^ Colère, fureur, violence verbale et physique, agressivité, cris…

Type de spiritualité : ce niveau marque l’émergence du moi psychique et d’une vision égocentrique : l’individu réalise qu’il existe en se confrontant à l’autre et en se montrant plus fort que lui. Quant à la religion, elle apparaît sous des formes polythéistes : les dieux vikings, grecs, romains, témoignent souvent les valeurs de force de puissance, de courage et d’honneur (à l’image des hommes qui les inventent et qui racontent leurs hauts faits et leurs exploits, ils sont jaloux, vindicatifs, querelleurs, belliqueux, ambitieux, ils rivalisent de force et d’adresse, luttent pour le pouvoir, guerroient – parfois aux côtés des hommes, comme dans la guerre de Troie – etc…). Les grandes légendes héroïques (Hercule etc) relèvent également des valeurs de ce niveau.

Sexualité : libido puissante, passion (et ses excès), drague (agressive), chasse, séduction… et viol, bien sûr.

Limites de ce niveau amenant la transition vers le niveau suivant : 

  • La violence inhérente à ce niveau, la démesure des passions et des pulsions…
  • Le chaos qui en résulte, ainsi qu’un fossé grandissant entre chefs (dirigeants) et gouvernés (sujets)…
  • Un besoin d’ordre, de calme et de stabilité se fait ressentir…
  • Conséquence : tempérer les ardeurs s’avère bientôt urgent, et pour cela, rien de tel qu’une loi supérieure aux individus : la religion (monothéiste) arrive et fait plier l’individu : la seule façon de ne pas aller en enfer, nous dit-elle, c’est d’avoir une vie raisonnable

DQ – Bleu
Devoir, Absolutisme, Vérité Ultime et conformisme

Devise : « Crime et châtiments »

Niveau collectif

Mots-clés et Valeurs dominantes : la paix, l’ordre, la stabilité, l’obéissance, la discipline, la hiérarchie, la vérité absolue, le conformisme, le cadre, la loyauté, le Bien et le Mal, le dogmatisme, l’obéissance, le respect des règles, des valeurs comme le sacrifice et le salut, la récompense/satisfaction différée à plus tard (paradis) vs la recherche de la satisfaction immédiate du Rouge, l’existence d’une Vérité Ultime, l’apparition de la culpabilité…

A ce niveau, l’individu se soumet à une Vérité Supérieure qui le dépasse et donne du sens à sa vie (une religion, une philosophie, une cause, une croyance politique – socialisme… –). L’individu obéit aux règles édictées par cette Vérité, il est prêt à lui sacrifier son existence dans l’espoir d’une récompense future.

Servir la communauté par sa capacité à contrôler ses désirs caractérise le niveau bleu. L’ici et maintenant n’est plus primordial ; au lieu de cela, l’individu est prêt à suivre les règles et à se conformer à un plan global, pour lequel il sera récompensé ultérieurement (système de la récompense, de la promesse du paradis…).

Pensée absolutiste

Le monde est régi par une Vérité Ultime.

Chronologie dans l’Histoire de l’humanité : apparition des grandes religions monothéistes, des sociétés hiérarchisées, des royaumes « stables » ; puis, croisades (en réalité, des méthodes Rouges sous couvert d’une idéologie Bleue… tout comme le djihadisme aujourd’hui…), Inquisition (idem), chasse aux sorcières (idem), monarchies absolues de droit divin…

Etape de développement à l’échelle individuelle : vers 5-6 ans, après le complexe d’Œdipe : intégration de la loi du père et des deux interdits primordiaux : le meurtre et l’inceste. Passage du principe de plaisir (absolu, frénétique, compulsif) aux principes de réalité, de raison, de tempérance et de Vérité Supérieure. Apparition du Surmoi freudien (cadres, règles, interdits et principes moraux intériorisés), construction de l’identité sociale, intégration à une vie en société faite de règles et de limites à respecter. 7 ans, c’est « l’âge de raison »… Le niveau Bleu domine l’enfant jusqu’aux prémisses de la « crise d’adolescence »…

Moments de réactivation : dès qu’on est confronté aux règles, aux lois, aux interdits, aux obligations sociétales (payer ses impôts, respecter les limitations de vitesse, les règles de la vie en société, du savoir-vivre…), à la morale, aux choix faits pour nous (consciemment ou non). Comment le vit-on ? Par l’obéissance et la soumission si cela fait sens pour nous (ou bien par peur des représailles, ou encore par sentiment d’obligation) ; ou, a contrario, rébellion, révolte, marginalité, protestation…

Le Bleu dans les sociétés d’aujourd’hui : à l’heure actuelle, DQ-Bleu est le niveau de conscience le plus représenté au monde, à égalité avec ER-Orange (chacun réunit environ 30% de la population mondiale). C’est le thème dominant du XXe siècle (mais aussi des siècles précédents) : le nazisme, le communisme, mais aussi les théocraties et certaines grandes causes sont DQ-Bleu (ONU, Education Nationale…). Mais, en vérité, il s’agit d’un modèle extrêmement répandu dès le Moyen Âge central : grandes religions monothéistes, grands royaumes, grandes monarchies, pouvoirs centralisés, monarchie absolue de droit divin (Ancien Régime)…

Aujourd’hui, en France, l’administration publique (« l’Etat »), les lois, la justice, les infrastructures restent à dominante Bleue (respect des règles, des procédures, sens de la hiérarchie, système punition/récompense, sanction/promotion, intégration du sacrifice comme moyen d’obtenir des bénéfices à terme (paradis – retraite !), sens de la mission à accomplir, dévouement à l’institution, attente de contreparties, résistance au changement, stabilité extrême, conservatisme voire inertie…), tandis que l’économie est dominée par le niveau Orange (niveau suivant).

Inutile de connaître la Spirale Dynamique pour avoir déjà déduit que le principal problème de ce niveau est qu’il entraîne un fort immobilisme et rigidifie les structures… Ainsi, si les organisations ne peuvent pas survivre sans la structure fournie par le niveau Bleu, dans l’excès, ce niveau apporte trop de bureaucratie, rend l’organisation rigide et incapable de s’adapter aux circonstances changeantes. L’autre risque du Bleu est d’engendrer une mentalité dogmatique du bien et du mal et un sentiment de culpabilité impardonnable si l’on ne respecte pas les règles.

Type de spiritualité : Sont concernées ici les grandes religions monothéistes et les pratiques associées. Il existe LA vérité ultime, un code de conduite devant nous mener au paradis. A noter que la spiritualité est de nature identique pour les organisations laïques (communisme, grandes corporations, nations) : le bien et le mal sont définis par le respect de certaines valeurs, et appréciés collectivement.

Sexualité : perçue comme sale, voire comme tabou ou comme simple devoir conjugal, plaisir non valorisé, abstinence avant le mariage puis fidélité, sexualité très encadrée, condamnation de la masturbation et de toutes sortes de pratiques dites « déviantes »… (On prend le contrepied total du niveau précédent, le niveau Rouge).

Limites de ce niveau amenant la transition vers l’étape suivante : 

  • Inertie excessive, système lourd et stagnant, excès de rigidité (des procédures etc.), carcans, immobilisme, fixité…
  • Quasi-incapacité à s’adapter aux changements
  • Répression de la liberté individuelle, de l’expression personnelle et de l’esprit d’innovation
  • Système mis à mal par la révolution copernicienne, par la révolution darwinienne, par la théorie du Big Bang… (si l’on pense aux grandes théories de l’Eglise, par exemple, Adam et Eve, récits de la Création, idée de la Terre plate, de la Terre au centre de l’univers…).
  • Le divorce progressif, donc, entre science et religion à partir de la Renaissance (fin du XVe siècle puis XVIe siècle : jusqu’alors, elles étaient intimement liées, savants et théologiens étant souvent les mêmes personnes) : perte de confiance en la religion, remise en question des repères jusqu’alors admis, vertige d’absolu.

ER – Orange
Liberté, plaisir, succès

Niveau individuel

Devise : « Je fais ce qui me plaît… et je brille. »

Valeurs dominantes : plaisir matériel, satisfaction personnelle, succès, méritocratie, compétition, efficacité, performance, productivité, libéralisme, individualisme, progrès, liberté, argent, intérêt pour la nouveauté, le challenge, le succès, la réussite et les innovations technologiques, maximisation du profit et du confort individuel, hédonisme, réussite, compétition, image de soi, expression de soi de manière calculée et stratégique (de façon à ne pas déclencher l’agressivité des autres, vs le niveau Rouge), scientisme, positivisme, matérialisme, liberté de pensée, autonomie de l’individu, apprentissage, progrès, découverte…

Cela se traduit par une perte de spiritualité et une diminution des relations interpersonnelles et familiales : ER-Orange est avant tout un individu autonome et entreprenant.

Comme le Rouge, le Orange est attaché à l’expression de soi, mais d’une manière moins tactique et plus stratégique. Là où le Rouge domine en exerçant le pouvoir, l’Orange joue le jeu de manière stratégique pour le plaisir de gagner. Il a donc intérêt à ce que les autres soient également disposés à continuer de jouer le jeu (et non à les rayer de la surface de la terre, purement et simplement, comme dans le Rouge – pour faire simple).

Pensée pragmatique, positive et multiple

Le monde est perçu comme un ensemble de richesses, de ressources et d’occasions de se créer une vie meilleure.

Etape de l’humanité : Apparition il y a 300-400 ans (avec la Renaissance), puis développement au cours du siècle des Lumières et explosion avec la Révolution Industrielle, puis avec le XXe siècle, les démocraties contemporaines, les grandes découvertes scientifiques, technologiques, les congés payés, les vacances, la société de loisirs… Démocratie, laïcité, abolition de l’esclavage, républiques démocratiques, droit de vote universel, libération de la femme, affranchissement de la religion, contraception (donc plaisir à volonté, sans culpabilité), avortement (idem), libération de l’homosexualité…

Etape de développement au niveau individuel : les premières années du jeune adulte. Après un court moment de régression en Rouge (=la crise d’adolescence, la rébellion, contestation des règles familiales et sociétales bleues), l’enfant passe en effet du Bleu de l’enfance 7-11 ans (où il dira lui-même à son petit frère ou à sa petite sœur « il ne faut pas faire ceci », « il ne faut pas faire cela », en véritable porte-parole des injonctions du Bleu) au niveau Orange, qui domine la plupart de nos carrières d’adultes. Le jeune adulte atteint donc la phase ER-Orange, en particulier quand il commence à gagner sa vie. Le Orange imprègne nos sociétés actuelles.

Le Orange dans les sociétés d’aujourd’hui : Aujourd’hui, on l’a vu, il totalise 30% de la population humaine, à égalité avec DQ-Bleu. Les relations avec les autres niveaux de la Spirale ne sont pas faciles : CP-Rouge se sent agressé par lui et l’accuse d’impérialisme, DQ-Bleu lui reproche de sombrer dans l’hyper-individualisme et de perdre ses valeurs.

Au niveau individuel, les réseaux sociaux exploitent également cette image de réussite que les gens souhaitent véhiculer dans une course sans fin vers la vie parfaite.

On retrouve là les sportifs de haut niveau, les businessmen, des personnages comme Steve Jobs, Bill Gates, Mark Zuckerberg, des entreprises comme MacDonald’s et Monsanto, les grandes firmes américaines (et autres), les compagnies pétrolières, les grandes multinationales, Google, le système capitaliste, le principe de l’économie de marché et du libéralisme…

Moments de réactivation : dès qu’on veut se construire soi-même, se faire plaisir, gagner sa vie à la hauteur de qui l’on est, se construire une carrière, une réputation, acquérir une certaine reconnaissance sociale, le succès, une promotion… Comment le manifeste-t-on ? Par l’optimisation de ses compétences, le fait de vouloir exister pour soi, libre du qu’en dira-t-on, de se donner l’autorisation de briller, de gagner de l’argent, de s’affirmer, de se faire une place au soleil, de se tailler une part du gâteau, d’oser, de sortir de sa « zone de confort »…

Type de spiritualité : par définition, Orange est le niveau du positivisme, du développement des sciences, de la rationalité et du matérialisme. Peu de place est donc laissée au domaine spirituel. La matière domine l’esprit, l’immatériel (religion, croyances…) est subitement devenu douteux et très questionnable. De plus, ER-Orange est marqué par une centration vers l’extériorité, c’est-à-dire l’observation objective de ce qui est, contrairement à tous les niveaux précédents et au suivant, FS-Vert ; l’absence d’attention portée sur l’intériorité de chacun (par souci excessif de l’extérieur) freine le cheminement vers la spiritualité.

Malgré tout cela, la spiritualité existe, elle est bien là, car dans ce mouvement holarchique que représente la Spirale Dynamique, les niveaux précédents sont toujours là (spiritualités Violette, Rouge et Bleue). Mais ER-Orange va mettre cette question au second plan, et n’utilise pas les dimensions spirituelles des autres niveaux de façon consciente.

En ER-Orange, les pratiques pouvant être reliées à une préoccupation d’ordre vaguement spirituel sont le développement personnel dans sa forme « primitive », c’est-à-dire la plus simple et la moins évoluée (la moins « spirituelle », en somme, la plus proche de l’Ego et la moins proche du concept de l’âme), une forme basique de coaching visant l’atteinte d’objectifs comme « développer sa confiance en soi », « trouver sa juste place », « être plus efficace au travail », « améliorer ses relations avec les autres », « mieux s’affirmer », « retrouver plus de sérénité » etc. De tels objectifs sont très autocentrés : l’efficacité, l’estime de soi (l’amour de soi, la confiance en soi etc), la santé, l’équilibre personnel, l’épanouissement individuel et le bien-être. A ce stade de ER-Orange, l’individu s’investissant dans un travail identitaire (par le coaching, la thérapie, des séminaires… parfois imposés par l’entreprise pour laquelle il travaille…) ne le fera que pour mieux se vendre, par exemple dans le cadre d’une transition de carrière, ou pour mieux gérer ses équipes/ses émotions/son temps/ses loisirs etc. Un coach l’aidera à mieux savoir parler de soi d’une façon alignée, mais la finalité ultime reste l’efficacité de la communication, par exemple.

On peut voir apparaitre dans ce niveau des pratiques potentiellement propices à la recherche spirituelle, comme la méditation ou le sport, mais l’intention reste centrée sur l’efficacité et le bien-être (le monde Orange étant particulièrement stressant… !). Pour un retour à davantage de spiritualité, il faudra attendre le passage aux niveaux suivants…

Sexualité : liberté et plaisir, couple libre, polyamour, infidélité, échangisme, séduction, consommation, turn-over, performance, importance de l’orgasme, loisir, escortes, couple comme source d’ascension sociale, promotion canapé, harcèlement sexuel, machisme, Tinder…

Limites de ce niveau amenant la transition vers le niveau suivant : 

  • l’individualisme, l’appât du gain et du profit et la surconsommation (pour le confort, le loisir, le simple plaisir…) qui mettent la planète en danger : à terme, ce modèle ne peut que se détruire lui-même.
  • En outre, une fois que l’on a obtenu tout ce qu’on désirait, qu’on est en haut de l’échelle : quel sens ça a, à quoi bon ? La dimension et la question du sens émergent (ou réémergent…) et quelque chose de plus grand devient plus important que le plaisir matériel personnel. Car bien que le niveau orange génère de l’abondance, cette course effrénée génère également un sentiment de vide et de solitude. Beaucoup de gens connaissent l’expérience d’avoir tout ce qu’ils veulent et ce dont ils ont besoin mais d’être néanmoins accablés par une quête de sens, de bien-être et de paix intérieure.
  • Conséquence : le niveau vert émerge avec la recherche d’une vie en harmonie avec les gens et la nature.

FS – Vert
Harmonie, communauté, consensus, écologie

Dieu merci, nous y tendons de plus en plus !

Devise : « nous sommes »

Niveau collectif

Mots-clés et Valeurs dominantes : communauté, aide humanitaire, égalité, respect mutuel, écologie intérieure et extérieure, sauver la planète, amour pour tout (l’humain, les animaux, les plantes, les minéraux, les végétaux…), liens de cœur, ouverture à la spiritualité, à l’invisible, au plus grand que soi (l’âme, la grande conscience, le Soi), conscience plus élevée, exploration de son monde intérieur, appartenance, équivalence, sociocentrisme, sacrifier le soi maintenant au service de l’harmonie individuelle et collective (avec les autres et avec la nature), importance des sentiments et des émotions (de chacun), réintroduction de l’intuition et de la spiritualité dans le monde mécanique et matériel Orange, égalité de l’homme et de la femme, rétablissement de l’équilibre entre l’homme et la nature, réaction contre l’individualisme et la perte de sens du monde ER-Orange, recherche de la satisfaction du groupe autant que de la satisfaction personnelle de chacun (et non seulement de soi), souci du lien et de la qualité de la relation, importance des réseaux amicaux (et développement de certaines technologies permettant de rester « connecté » aux autres : téléphone portable, réseaux sociaux, applications, blogs, Skype, Zoom…), dialogue, prise en compte du bien-être, échange, consensus, politiquement correct, démocratie participative, management participatif, tolérance…

Le Vert répare de nombreux éléments importants perdus ou endommagés dans les niveaux antérieurs de la Spirale Dynamique.

Dans ses relations avec les autres niveaux de conscience, FS-Vert dérange : les BO-Violet et CP-Rouge n’ont même pas conscience de son apparition. Les DQ-Bleu le détestent car le relativisme, le respect de chaque particularisme et la recherche du consensus portent un coup fatal à la Vérité Suprême. ER-Orange le méprise et le sous-estime, le jugeant utopiste, rêveur et inefficace (ce qui n’est malheureusement pas toujours totalement faux… mais loin d’être vrai pour autant !)

Pensée socio-centriste et relativiste

Le monde est perçu comme l’habitat commun de toute l’humanité.

Etape dans l’Histoire de l’humanité : apparition (prémisses) y a 150 ans en Europe du Nord (grand paradoxe de l’Histoire, les Scandinaves sont tous très en avance concernant ce niveau-là… Nous sommes bien loin des Vikings qui dominaient en un Rouge confinant à l’écarlate !!!^^)

Comme le Vert n’émerge que lorsque les gens sont devenus si « riches » qu’ils n’ont pas besoin de passer tout leur temps à travailler et à « réussir », ce système n’émerge pleinement que dans les sociétés prospères.

On s’aperçoit en outre à l’échelle de l’Histoire de l’humanité, que les cycles des niveaux de conscience s’accélèrent : BO-Violet et CP-Rouge ont duré des milliers, voire des dizaines de milliers d’années, DQ-Bleu, plusieurs siècles. ER-Orange aura eu un temps de domination beaucoup plus court, mais il aura eu un impact immense sur la planète, en comparaison des autres stades de la Spirale.

Au niveau du développement individuel : il n’y a pas d’âge pour y entrer, tout le monde ne l’atteint pas encore, mais ce qui se passe à au niveau de la planète et de la Nature nous y sensibilise de plus en plus tôt (dans nos parcours individuels). Nécessité d’avoir construit son identité individuelle (Rouge) et sociale (Bleu), d’être libre des critères intégrés par la famille (Bleu) et la société (Orange/Bleu) avant de pouvoir développer le niveau Vert, qui répond à un besoin d’harmonie en soi et d’équilibre (sérénité etc) et d’harmonie avec ce qui nous entoure : c’est tout le principe de la vogue du retour de la spiritualité, des pratiques comme la méditation, le yoga, le jeûne thérapeutique et spirituel, l’introspection, la psychothérapie, les retraites spirituelles, les médecines alternatives…

Les premiers temps, à l’échelle d’un individu, la rupture vers FS-Vert arrivait vers la quarantaine, avec la fameuse crise : c’était le moment de se poser les vraies questions et de redonner du sens à sa vie, de changer brusquement de carrière… (c’est d’ailleurs toujours le cas bien souvent : les avocats deviennent charpentiers, les ingénieurs partent vivre à la campagne…). Aujourd’hui on assiste à une transition beaucoup plus précoce : très souvent, c’est à la sortie de leurs études supérieures que les candidats au FS-Vert se manifestent… et posent problème aux entreprises (encore trop souvent oranges… ou bleues…), qui ne savent pas encore comment accueillir et gérer leurs aspirations individuelles et communautaires.

Le Vert dans les sociétés d’aujourd’hui : FS-Vert est un niveau de conscience en cours d’émergence. Il représente à peine 10% de la population mondiale et aucun pays ou région ne semble être centré sur ce thème pour l’instant. Ceux qui s’en rapprochent le plus sont les pays scandinaves, ou les groupes que les sociologues essaient d’étiqueter comme Créatif Culturel ou Génération X.

On retrouve à ce niveau les ONG, les associations caritatives et humanitaires, le WWF, la SPA, les coopératives, les AMAP, Wikipédia (encyclopédie participative), le crowdfunding, MedicAid, MSF, les collectivités, des personnages comme Nicolas Hulot…

Moments de réactivation : lorsque l’écologie au sens large nous touche : la planète, les relations de cœur à cœur, notre écologie intérieure. Comment le vit-on ? Partage, échange, écoute, création de projets communs, culpabilité, envie d’agir, dons aux organisations caritatives, bonnes actions…

Type de spiritualité : On retrouve une spiritualité évidente, à la fois dans sa dimension collective (besoin de valeurs partagées, principalement l’amour et l’harmonie), et dans sa dimension individuelle (intériorité personnelle) par la recherche de sens (à nos actes, nos carrières) et le développement de la conscience de nos émotions .

La spiritualité reprend une place importante, mais devient multiforme, puisque c’est le règne de la pensée relativiste : communication non violente, l’élément humain de Schutz, les alcooliques anonymes et leurs 12 étapes qui constituent une très puissante démarche de développement spirituel, les quakers libéraux, ainsi que toutes les approches de groupe visant à vivre ensemble la quête de soi. Le New Age est un parfait exemple de cela, avec la présence de maîtres spirituels, plus là pour nous montrer la voie par l’expérience partagée que pour prêcher la bonne parole (plus typique du niveau DQ-Bleu).

C’est aussi le niveau de la méditation (seul ou en groupe), de l’amour de l’autre, de la reconnexion à l’autre, de l’apaisement des peurs et des anxiétés existentielles, du souci environnemental, du respect de la nature (non plus comme un terrain de divinités, comme en BO Violet, mais un moyen de retrouver une harmonie holistique), d’un engouement certain pour la pensée bouddhiste (tempérance, modération, voie du milieu etc), du relativisme, du goût pour les pratiques orientales (chinoises, indiennes etc) ouvrant les champs d’énergie etc., pour la psychologie, l’énergétique, la médiumnité, la sonothérapie, l’ayurvéda, l’astrothérapie, l’homéopathie, la phytothérapie, les huiles essentielles, le feng shui…

Sexualité : respect mutuel, équilibre donner-recevoir, danse énergétique à deux, sexualité sacrée, consciente, amour avec un grand A, le plaisir de l’un est augmenté par le plaisir de l’autre, tantra… Sexualité et sentiments s’épousent.

Limites de ce niveau amenant la transition : 

  • Le Vert aime fonctionner par consensus. Or, ce mode de prise de décision est chronophage et du temps, la planète n’en a plus.
  • En outre, le FS-Vert est particulièrement fragile en raison même de sa non-agressivité et de sa tendance à la paralysie (à force de rechercher le consensus de tous, on finit par ne plus avancer du tout).
  • Enfin, il se contredit lui-même à vouloir tout tolérer : il a du mal à gérer les expressions malsaines du Rouge parce qu’il ne veut pas imposer de limites aux comportements indésirables (il voudrait ou préfère les tolérer librement, quitte à en pâtir) ; il s’oppose à la notion absolutiste de bien et de mal du Bleu mais, ce faisant, il sape les règles et la structure (risque de chaos) ; enfin, il lutte pour l’égalité et contre le manque de dignité humaine du niveau Orange mais, ce faisant, il sape le système dont émane la richesse qui lui a permis de se détourner du matériel et de prêter attention aux aspects plus « humains » et spirituels de sa vie…
  • Conclusion : à ce stade, un saut quantique paraît indispensable, avec un changement de paradigme majeur.

Alors, ensuite ?

De fait, les six premiers niveaux de la Spirale étaient dominés par la notion de Survie (individuelle ou collective, et selon la satisfaction des divers besoins de la pyramide de Maslow, nourris et satisfaits de façon croissante avec le passage d’un niveau à l’autre :

  • besoins primaires et physiologiques (nourriture, oxygène, eau, sexualité, sommeil, élimination, approvisionnement en denrées de base…)
  • besoins de sécurité (environnement stable et prévisible, sans anxiété ni crise, ordre établi, règles…)
  • besoin d’appartenance et d’amour (clan, famille, tribu, groupes sociaux divers, communauté…)
  • besoin d’estime et de confiance en soi, de respect de soi, de reconnaissance et d’appréciation par autrui
  • besoin d’accomplissement de soi et de sens (une priorité depuis quelques décennies seulement : depuis que l’homme, en Occident du moins, est totalement libéré des niveaux de préoccupation et de besoin inférieurs (nourriture, argent, survie…).

C’est cette dernière catégorie de besoins (l’accomplissement de soi, la réalisation de soi, l’épanouissement personnel, très moderne), qui est en train de nous conduire vers ce fameux saut quantique.

Car, de fait, si les six premiers niveaux étaient dominés par l’impératif de Survie… les niveaux suivants, désormais, seront dominés par l’Être… et l’éveil de la conscience.

L’ego (avec ses peurs et son incessant besoin de contrôle), passe le relais à l’âme…

On parle de saut quantique en référence à la physique quantique où il n’y a pas d’espace-temps : une particule passe d’un endroit à un autre, d’un état à un autre, de manière instantanée, en passant par le vide.

Dans les codes suivants, le sens nous transcende et nous dépasse, on sent que tout est juste dans tout ce qui arrive ou est arrivé. Tout s’éclaire. La dimension du sens nous fait vibrer de l’intérieur (mais nous commençons à peine à effleurer ces niveaux de conscience, et encore, quelques individus seulement depuis plusieurs décennies…)

J’avais originellement prévu, juste pour le plaisir, de développer également les deux niveaux suivants (le GT-Jaune : Conscience de soi et individuation / et le HU-Turquoise : Inter-reliance et conscience planétaire) mais nous avons depuis longtemps dépassé le stade qui nous intéresse au regard des Vikings (=le Rouge) et il s’agit même de niveaux vis-à-vis desquels nous pouvons à peine nous projeter/nous identifier, tant ils sont encore « nouveaux ».

Ainsi, afin de ne pas rallonger indéfiniment cet article (qui fait déjà plus de 13000 mots… gloups !), je conclurai cette présentation par quelques précisions, avant de passer au zoom sur nos amis les Vikings (enfin !!).

Précision

Chaque individu traverse ces différents états de conscience non pas de façon linéaire, mais de façon itérative. Les étapes se succèdent dans le temps, mais peuvent également se répéter : on peut revenir à des niveaux de conscience antérieurs en fonction des conditions d’existence (crises, bouleversements…) qui influent sur nos besoins et nos capacités d’adaptation.

Les 8 niveaux de conscience s’établissent les uns après les autres, mais il n’existe pas de hiérarchie entre eux car chaque niveau dépasse et inclut le précédent, comme des briques assemblées une à une finissent par former une maison (ce qu’on appelle une holarchie). Les 8 niveaux peuvent donc coexister entre eux. Chaque niveau apporte les fondations nécessaires pour la construction d’un état de conscience supérieur : on ne peut ni sauter des étapes, ni en enlever sans faire s’écrouler le tout. Il faut d’abord être enfant, puis adolescent avant de devenir adulte. Il en va de même pour les constructions sociétales successives. En outre, chaque niveau apporte son lot d’avantages et d’inconvénients, des progrès et des régressions, des ouvertures et des limites (le 5e niveau, ER-Orange, par exemple, est certes sans doute le plus évolué économiquement au regard des 4 niveaux antérieurs, mais également l’un des plus pauvres spirituellement !).

Il s’agit bien évidemment d’un système beaucoup plus complexe que ce que je viens d’évoquer. Graves puis ses disciples et ses « héritiers » creusent non seulement extrêmement sérieusement chacun de ces niveaux, mais également :

  • L’hypothèse selon laquelle chacun de ces niveaux se répète au cours de la vie d’un individu
  • Les différentes façons dont un changement peut s’opérer dans la vie d’un individu : de façon « horizontale » (les modifications se font sans changer de Thème/niveau dominant) ou « verticale » (remise en cause totale qui entraîne un changement de niveau de conscience).
  • Les préalables au changement de niveau
  • Les attitudes face au changement (coincée, arrêtée ou ouverte : seule une personne ou une société ouverte peut mettre en place le changement attendu)
  • Les 6 conditions au changement (avoir les capacités cérébrales nécessaires, avoir réglé auparavant les problèmes qu’il était possible de résoudre dans l’ancien thème dominant, vouloir le changement -donc être en proie à une certaine forme d’insatisfaction -, se fixer un objectif – avoir l’insight du but à atteindre, donc déjà une certaine forme de conscience et de regard objectif sur ses conditions de vie actuelles -, avoir conscience des obstacles qui vont semer le parcours de l’individu candidat au changement et les affronter, enfin recevoir une forme d’accompagnement/d’assistance au changement)
  • Les 5 étapes du changement (départ d’une situation stable, atteinte d’un seuil critique, passage d’un creux – retour aux vieilles recettes des niveaux précédents, donc forme de « régression » – puis « saut » vers le niveau suivant si les 6 conditions de changement vues précédemment sont réunies, enfin atteinte d’un nouvel état avec un autre niveau de conscience).
  • La manière d’utiliser de façon bénéfique la Spirale Dynamique au niveau d’un individu, d’une entreprise et d’un pays (sans se cantonner à une simple typologie, par définition réductrice)

Deux schémas pour résumer tout ça :

Les Vikings et le Rouge

Une culture certes à tendance rouge… voire écarlate…

Bon, c’est bien joli tout ça, mais… si on en revenait (enfin) à nos amis les Vikings ?

Nous l’avons vu, les Vikings font partie des plus beaux représentants historiques du niveau « CP – Rouge » (le 3e niveau de la Spirale). Mais on pourrait en dire certes tout autant des Huns, des Vandales, des Goths et de tous les peuples dits « barbares » célèbres, qui semèrent la terreur dans l’Empire Romain puis, plus tard, dans tout l’Occident, et laissèrent leur nom dans la postérité (dans le cas des Vandales, par exemple, qui donneront tout de même les termes de « vandalisme » et de « vandaliser » !).

Néanmoins, ce sont bel et bien les Vikings (mes petits chouchous, comme vous n’aurez pas manqué de le constater au vu du nombre de romans – et d’articles ! – leur étant consacrés…) qui nous intéressent ici.

Passons donc (brièvement) en revue la manière dont leur culture semble bel et bien confirmer leur appartenance (à la fois flamboyante et flagrante, à limite du caricatural, avouons-le !) au niveau Rouge.

En effet, et même en tentant de passer au-delà du cliché des brutes sanguinaires sautant de leur drakkar (terme qu’aucun viking n’a jamais prononcé, du reste, puisque, malgré son apparente « sonorité » scandinave, il fut inventé par les romantiques français au XIXe siècle^^), casque à cornes en tête (jamais aucun viking n’a porté de cornes, à moins bien sûr d’être cocu : il s’agit, pour le coup, d’une invention fantaisiste des chroniqueurs chrétiens de la fin du Moyen-Age afin de rendre ces « barbares », véritables instruments du Malin, encore plus effrayants), au-delà même du cliché de ces brutes sanguinaires et bondissantes, disais-je, (et surtout prêtes à vous massacrer), force est de constater que la culture viking fut avant tout :

  • Une culture viriliste et guerrière, fondée sur des valeurs comme l’honneur (importance cruciale de mourir l’arme à la main, sur le champ de bataille, pour espérer monter au Valhalla…), le courage, la force, le pouvoir, la gloire, les actes héroïques, l’audace, la soumission et la domination ;
  • Une culture marquée par l’absence de peur au combat (une forme de témérité fondée sur la croyance du Valhalla − les Walkyries devant sélectionner les guerriers plus courageux pour les mener au palais d’Odin etc…−) ;
  • Une culture dotée d’une mythologie polythéiste aux dieux tantôt fourbes (Loki), tantôt forts et courageux (Thor), souvent belliqueux, toujours forts et rusés…

Mais aussi une civilisation marquée par :

  • Une réputation terrible (dont ses ressortissants jouent et se parent à loisir, en ce sens qu’elle sert alors leurs intérêts – j’évoque comment dans mon roman L’amour, la mer, le fer et le sang, par exemple) ;
  • L’impulsivité, les coups d’éclats, la force brutale, le rapt, le raid, le pillage, l’esclavage… ;
  • Une affirmation de l’individu dans l’ivresse de sa force, mais aussi sur la base de ses aptitudes de marin, de navigateur et d’explorateur ;
  • Une soif de nouveaux territoires, de nouvelles richesses, de nouvelles expéditions (ce qui les conduira aux confins du monde connu, de la mer Nord à la Méditerranée et de l’Amérique aux limites de l’Empire indien…) ; concernant ce goût pour l’exploration des Vikings, voir mes romans L’amour, la mer, le fer et le sang ; Comme une aurore dans la brume ; et Les Routes de l’Est.
  • Le culte des actes héroïques individuels, narrés par les sagas et la poésie eddique ;
  • Une économie de prédation (pour se fournir en tout ce qui manque à ces contrées froides, austères et, souvent, stériles) ;
  • La bravoure au combat et l’enrichissement outre-mer, véritables moteurs de l’ascension sociale ;
  • Une supériorité incontestable en matière de navigation, rendant autant d’expéditions, de raids, d’opérations de pillage et de missions d’exploration possibles ;
  • Un rapport particulier aux dieux : les Vikings n’entretiennent pas avec eux des rapports de soumission. Ils les adorent, les vénèrent, leur vouent un véritable culte mais, en échange, attendent d’eux fécondité, récoltes, victoires, etc. (voir mon roman Les Yeux de Mila, qui fait la part belle au Grand Sacrifice et au culte d’Uppsala). En cas d’insatisfaction, les relations entre les Vikings et leurs dieux se gâtent et les premiers à en faire les frais sont les intermédiaires entre le peuple viking et les dieux, intermédiaires qui étaient tellement respectés en Violet.
  • Des invasions régulières de territoires déjà (en partie) passés au niveau Bleu via le christianisme d’une part (peu à peu érigé en tant que vérité ultime et unique), et d’autre part des monarchies en voie de centralisation (notamment l’Empire carolingien et les royaumes d’Angleterre (Wessex, Essex, Mercie etc, en passe d’être unifiés autour du Wessex) ; d’où cette « terreur » et cette aversion profondes ressenties par les moines et autres cléricaux chrétiens « bleus »– les seuls vrais chroniqueurs de l’époque – face à ces païens « rouges » descendus des contrées du Nord !)

Concernant ces nombreuses invasions et la stratégie de la terreur employée par les Vikings, voir notamment mon roman L’amour, la mer, le fer et le sang.

Cette liste n’est absolument pas exhaustive, bien sûr mais, pour en savoir plus et éviter trop de redondances, sur ce site, je vous renvoie à mes divers articles sur les Vikings, notamment :

… ainsi qu’à mes divers romans consacrés aux Vikings et mentionnés au cours et en bas de cet article : ils vous donneront un aperçu bien plus complet et bien plus détaillé de la culture viking que ce bref résumé destiné à illustrer mon propos sur la Spirale Dynamique !.

Chacun des éléments néanmoins mentionnés ci-dessus correspond à une culture et à une mentalité éminemment « rouges » :

  • exprimer le soi sans culpabilité pour satisfaire immédiatement ses impulsions
  • loi du plus fort
  • loi du chacun pour soi
  • versatilité des alliances (l’autre n’est pour moi un allié ou un protégé que dans la limite de son utilité)
  • relations humaines basées sur la force
  • absence de morale et de scrupules (la morale n’apparaîtra qu’avec le niveau Bleu)
  • absence d’empathie
  • psychologie de prédateurs
  • réification de l’autre (esclave potentiel)
  • importance cruciale de l’honneur, de la puissance et de la bravoure
  • mépris de toutes les formes de faiblesse
  • absence de peur devant la mort (il est mille fois préférable de mourir héroïquement que de vivre dans la honte)
  • archétype du guerrier redoutable
  • refus de subir son environnement naturel (hostile : Scandinavie)
  • conquête active de nouveaux territoires
  • habileté à surmonter tous les obstacles
  • détermination
  • élection des chefs en fonction de leur force, de leur charisme, de leurs prouesses et de leur mérite (vs : au niveau Violet, où l’ont suit les Anciens)
  • dieux agressifs, jaloux et vengeurs
  • liens étroits entre les dieux et les hommes (notamment les rois, qui prétendent souvent être de lignée divine
  • « on meurt sans crainte et on tue sans remords » (Max Gallo)
  • être prêt à endurer quoi que ce soit pour accomplir ce qui doit l’être, pour la gloire et l’honneur
  • absence de cohésion interne (puisque les pulsions et désirs individuels dominent), donc guerres intestines, conflits d’intérêt, multitude de tribus, de clans, de peuples et de chefferies
  • respect de la force seule
  • énergie prédatrice et masculine
  • culte du héros
  • etc.

Les divers aspects de la civilisation viking susmentionnés sont d’ailleurs bien ceux mis en avant par la série à succès Vikings, qui nous donne à voir une culture particulièrement ambitieuse et violente, peuplée d’individus aussi fourbes que cruels, à la fois versatiles et cupides, égocentriques au possible, avides de sexe et de gains, de richesses et de gloire.

Au-delà des incontestables mérites de la série (une esthétique superbe, un véritable travail de documentation, des costumes, décors, coiffures et maquillages magnifiques, d’excellents acteurs et un bel aperçu des diverses expéditions vikings – quoiqu’au prix d’une certaine concentration temporelle –, pour ne citer que ceux-là), il convient malgré tout de souligner qu’il s’agit là d’une représentation extrêmement réductrice de la civilisation scandinave de l’époque : en fait, c’est comme si les scénaristes de la série avaient eu connaissance de la Spirale Dynamique, et pris explicitement le parti de jouer la carte du Rouge écarlate à mort ! D’en surjouer jusqu’à l’écœurement !

J’en dis jusqu’à l’écœurement, car si ce parti pris (parfaitement juste du point de vue « marketing », puisque ces valeurs parlent encore à un grand pourcentage des téléspectateurs, notamment masculins, et plutôt jeunes, à l’instar de la série Game of Thrones, qui mise sur les mêmes leviers), a eu le mérite de plaire au plus grand nombre, et de séduire de nombreux spectateurs fidèles au fil des 6 saisons (+ les prolongations, la série Walhalla…), il a eu le malheur, dans mon cas, de me décevoir et de me détourner d’une série qui, à mon sens, était si prometteuse du point de vue historique. Car à trop jouer la carte de la cupidité, de la cruauté, de la trahison, de la recherche de gloire, des egos surdimensionnés et de la loi du plus fort… cette série a malheureusement eu raison de mes meilleures volontés ! Pas un seul personnage un tantinet moins caricatural que les autres, pas un seul personnage un peu moins « Rivières pourpres », du sang, du sang, du sang, du sexe, de l’Ecarlate à fond !

Précisions

Une précision s’impose donc. Ou plutôt, deux ! Et ceci afin d’éviter de sombrer ici dans tout cliché ou toute caricature malvenue sur la civilisation viking…

1 – Culture Rouge ne veut pas nécessairement dire culture fruste ou simplement « barbare » (quoique c’eût été parfois le cas).

La culture viking, pour ne parler que d’elle, ne se cantonnait certes pas à cette culture de la guerre, du rapt et de la violence physique, et s’avérait même bien en avance sur moult d’autres sociétés occidentales de son temps à bien des égards !

  • Regroupés dans le Thing (l’assemblée des hommes libres), les Scandinaves élisaient leurs chefs et leurs rois, qui héritaient donc de devoirs et de responsabilités envers leur clan. Un système bien plus démocratique que toutes les autres sociétés occidentales de l’époque, croulant sous le poids des premières monarchies et de l’empire carolingien !
  • Les femmes jouissaient d’une position bien plus enviable que toutes les femmes de la chrétienté à l’époque : elles bénéficiaient même de droits quasiment égaux à ceux des hommes (divorce compris !!!). Je parle longuement de la condition de la femme dans la société viking dans mon roman Comme une aurore dans la brume, justement.
  • En outre, la culture viking, loin de se cantonner aux raids, jouissait d’une véritable culture littéraire et sacrée (sagas, runes, poésie contournée…), d’un artisanat de qualité (orfèvrerie et armurerie notamment), d’une aptitude au commerce international incontestable, d’une avance considérable en matière de navigation sur les autres cultures de l’époque…
  • Enfin, ce seront les Vikings qui, en excellents législateurs et gouverneurs, créeront des états importants tels que l’Islande (le plus authentiquement « viking » des pays d’aujourd’hui), le Royaume de Kiev (aux origines de la Russie, de la Biélorussie et de l’Ukraine actuelles – voir mon roman Les Routes de l’Est) et… la Normandie, bien sûr, qui évoluera très vite en un célèbre duché : celui du futur Guillaume le Conquérant ! (voir tous mes articles listés en fin de synthèse, et mon roman La Demoiselle d’Arundel).

Loin de n’être qu’une vulgaire culture du sang et de l’or, la civilisation viking était formidablement en avance dans nombre de domaines et n’avait donc, à ce titre, rien à envier aux autres cultures de l’époque. C’est ce que l’on découvre à travers les yeux d’Aélis, une étrangère rescapée d’un naufrage, et qui se retrouve immergée en pleine culture viking (en Norvège), dans Comme une aurore dans la brume !

Sans compter que, à l’évidence, la majorité de la population scandinave de l’époque se consacrait « pacifiquement », par la force des choses… à la culture de la terre et à l’artisanat, comme partout ailleurs !

2 – Deuxième remarque : si l’on doit être parfaitement honnête, il convient en outre de souligner que la plupart des sociétés de l’époque (qu’il s’agisse des Maures autour de la Méditerranée, des Anglo-Saxons outre-Manche, des Pictes, des Scots et des Gaëls en Ecosse et en Irlande, des Magyars et des Bulgares en Europe Centrale, des Khazars, des Byzantins, des tribus des steppes à l’Est ou encore des Carolingiens sur tout l’Ouest du continent)… n’ont que bien peu à envier aux Vikings, en matière de violence, de cupidité et de goût pour le sang !

De fait, la guerre est alors, et pour des siècles encore, omniprésente (a-t-elle d’ailleurs jamais cessé de l’être ?). La violence physique est partout, tant au sein des sociétés scandinaves elles-mêmes, au cœur des fjords, que sur le continent !

Les temps sont durs et, quoique que le Bleu se développe au sein des sociétés occidentales (christianisme, centralisation du pouvoir, mise en place des monarchies, missi dominici de Charlemagne, érection de lois centrales, des premières infrastructures étatiques, de l’école obligatoire, de l’écriture carolingienne etc) et Moyen-Orientales (propagation de l’Islam), le Haut Moyen Âge est cruel et le Rouge domine encore un peu partout !

Mais ce qui rend alors les Vikings si redoutables, et la raison pour laquelle ils marqueront tant les esprits, c’est que rien ne semble pouvoir en venir à bout. Ni la force (les efforts militaires déployés de façon relativement chaotique par les royaumes et territoires victimes de leurs incessants assauts), ni les danegelds versés (tributs en échange d’une trêve ou d’un départ des envahisseurs), ni le don de territoires pour les sédentariser et les apaiser…

Rien. En tout cas… en apparence. Pendant des décennies, les Vikings progressent gaiement dans leur niveau de vie en exprimant fortement ce Rouge qui leur amène gloire, richesses, esclaves, trésors, ascension sociale, prestige, nouveaux territoires, nouveaux débouchés commerciaux, nouvelles technologies (la charrue…). Autant de progrès et d’acquisitions permis par la puissance active inhérente au niveau Rouge, et aussi par une indiscutable supériorité en termes de navires, entre autres.

Mais, paradoxalement, ce seront leurs propres conquêtes qui finiront par provoquer l’extinction de la culture viking… Car en acquérant de nouveaux territoires, en explorant de nouveaux horizons, en découvrant de nouvelles cultures… ce sont non seulement des biens matériels, des richesses, des objets, des esclaves que les Vikings rapporteront chez eux… mais aussi de nouvelles façons de penser… et surtout la volonté farouche des prédicateurs chrétiens de convertir ces païens à la Vérité ultime, au seul Vrai Dieu !

C’est ainsi que, très insidieusement, à partir du début du Xe siècle, les missionnaires et rois chrétiens parviendront, par la parole, par le pouvoir de persuasion, par les croyances et la pensée… à calmer son impulsivité et sa soif de conquête inhérentes au niveau Rouge… et à faire peu à peu passer la société viking du Rouge (couleur du sang) au Bleu (couleur du Ciel et du paradis…)

A lire aussi, pour compléter cette section sur la culture viking :

Mes romans « vikings » :

Vous y trouverez notamment le listing (presque exhaustif !) de tous les territoires envahis, attaqués et explorés par les Vikings, tant au sud qu’à l’est ou à l’ouest, nombre de coutumes scandinaves et de détails sur leur vie quotidienne, moult informations sur leurs raids, la vie au cœur même de la Scandinavie, leurs navires, leurs divers talents, leurs valeurs, leurs croyances, leurs mythes, leurs grands chefs, guerriers et rois…

Quand la Scandinavie vire au bleu

Ainsi, la seule action réellement efficace pour contrecarrer les excès et les épanchements rouges de la culture viking, aura été d’utiliser (inconsciemment bien sûr) la Spirale Dynamique…. Et d’inciter peu à peu les Vikings à rejoindre les autres sociétés occidentales en Bleu : en leur envoyant des missionnaires qui, en les convertissant au christianisme, les auront faits passer au niveau Bleu, stoppant ainsi naturellement, décennie après décennie, peuple après peuple, la violence inhérente au Rouge (les Suédois, plus éloignés du monde occidental, seront les derniers à se convertir).

Ces missionnaires auront finalement appliqué la seule stratégie efficace avec une culture Rouge (où seuls la force, le pouvoir, le charisme et l’autorité sont reconnus) : convaincre les chefs et les rois. Ceux-ci finiront alors le travail de la manière caractéristique de la transition entre Rouge et Bleu : ils laisseront à leurs sujets le libre choix entre la conversion… et la mort (Harald à la Dent Bleue au Danemark, Harald aux Beaux Cheveux en Norvège, Olof Skötkonung en Suède, Vladimir et Iaroslav pour la Rus’ de Kiev… seront des « convertisseurs » plutôt efficaces – car plutôt sanguinaires aussi ! conversion au Bleu par des méthodes Rouges ! – de leurs royaumes !).

Ainsi, peu à peu, le Danemark, la Norvège et la Suède apparaissent : christianisation, centralisation, unification de la législation, structuration de ces royaumes et mise en place de grandes dynasties héréditaires marquent la fin du IXe siècle et tout le Xe siècle.

Les clans, tribus, chefferies et peuples ennemis qui se partageaient alors la Scandinavie disparaissent au profit de grands royaumes unifiés (ou en cours d’unification). 

C’est donc au XIe s. que les raids vikings cessent et qu’on place la fin de l’Âge viking, pour les Suédois comme pour les Danois ou les Norvégiens : la centralisation du pouvoir et la christianisation de ces pays ont fait leur œuvre. La Suède, le Danemark et la Norvège, font leur entrée dans l’Europe chrétienne. De marge barbare, sanguinaire et païenne de l’Occident nordique, la Scandinavie devient un ensemble de 3 royaumes chrétiens européens à part entière. Certains Scandinaves participeront même aux Croisades, en Terre Sainte comme contre d’autres peuples païens de l’Est (Finnois en tête, autour de la Baltique).

Dans le cas des Vikings, la religion chrétienne aura donc présidé à leur transition vers un niveau supérieur. Ils passeront, au fil des conversions successives de leurs chefs et rois (non sans heurts et résistances, cela va sans dire), du CP-Rouge impulsif au DQ-Bleu discipliné ; le Dieu unique et absolu de la religion chrétienne, qui prône l’obéissance, le sacrifice de soi, l’abstinence, la modération, le réfrènement de ses pulsions, l’abnégation et l’attente d’une récompense future (valeurs de DQ-Bleu) sera l’un des principaux vecteurs de cette transition et de l’adoption par ce peuple d’un autre set de valeurs. La religion aura, dans ce cas-là, et peut-être plus que dans tout autre, participé au grand saut dans l’inconnu vers le niveau d’existence suivant.

Ce qui ne voudra certes pas dire : la fin des conflits ! Holà, non !

Jetez un petit coup d’œil à ma courte Histoire de la Suède médiévale, ou encore à ma Petite Histoire des Normands (descendants des Vikings en Francie, est-il besoin de le rappeler ?^^), ou encore à l’Histoire de la Rus’ de Kiev, à l’Histoire de l’Islande, à celle des Orcades et des Shetland, ou à l’Histoire de n’importe quelle contrée scandinave… et vous vous en rendrez vite compte !.

Au niveau Bleu correspondra tout simplement un autre ensemble de guerre, d’autres types de violences… :

  • au nom d’autres valeurs (la religion : croisades / la monarchie absolue de droit divin…)
  • ou, tout bêtement, à la faveur de nombreuses réminiscences Rouges, à l’occasion des crises de succession, des changements de dynastie et des annexions entre royaumes, par exemple !

Les Normands et le Bleu

Parlons des Normands, justement. Un MA-GNI-FIQUE exemple de transition du CP-Rouge au DQ-Bleu, et d’une force, d’une violence et d’une impulsivité soudainement mises, non plus au service des appétits individuels, mais au service d’un Dieu unique et tout-puissant avec un grand D.

Descendants directs des Vikings installés sur les côtes de Neustrie, les Normands du Xe et du XIe siècles sont à la croisée de ces niveaux bleu et rouge qui se retrouvent intimement mêlés en eux, à la faveur, en quelque sorte, d’un double héritage (dont je parle longuement dans mon roman La Demoiselle d’Arundel).

Pour faire simple… eh bien, je vais vous le citer, ce passage ! Pour une fois, je vais me citer moi-même^^ (oh, la fainéante !^^)

Evidemment, pour parfaitement saisir ces propos, je vous invite à lire, en complément (ou en introduction à ce passage), les articles suivants, qui vous permettront de pleinement saisir l’évolution des Normands, des premiers raids vikings à Guillaume le Conquérant, en passant par Rollon, le traité de Saint-Clair-sur-Epte (cédant la future « Normandie », grande part de la Neustrie, à des Vikings en échange de la paix), les Rollonides, les Richardides, et même les Normands en Méditerranée.

A lire, donc, pour pleinement savourer cette évolution de mœurs chez les Normands d’origine scandinave, et le mix qui s’opéra entre eux au cours du Moyen Âge central entre leur héritage scandinave (rouge) et leur héritage franco-latino-chrétien (bleu). Attention, n’allez pas me dire que rouge+bleu, ça fait violet !!!!

  • Les Vikings en France
  • Des Vikings aux Normands : la naissance de la Normandie
  • L’Histoire de la Normandie 1: Antiquité et Moyen Âge
  • L’Histoire de la Normandie 2 : Moyen Âge central et tardif
  • Guillaume de Normandie 1/3 : du Bâtard au Conquérant
  • Guillaume de Normandie 2/3 : A la conquête de l’Angleterre
  • Guillaume de Normandie 3/3 : l’Angleterre anglo-normande
  • La tapisserie de Bayeux
  • Les Normands en Italie

Et, évidemment, tous mes articles « bonus » concernant mon roman La Demoiselle d’Arundel (portant précisément sur les Normands à l’époque de Guillaume le Conquérant) :

  • La Demoiselle d’Arundel : coulisses (le making-of !)
  • La Demoiselle d’Arundel : les bonus
  • La Demoiselle d’Arundel : cartes géographiques

Voici donc le passage en question :

« − Ma foi, ma fille, je serais bien en peine de vous donner une réponse claire et simple ! Sont-ils dangereux ? Très certainement. Ils dévastent la terre d’Italie depuis tant de décennies à présent que ni les Byzantins, ni les Arabes, ni les Lombards eux-mêmes ne savent plus à quel saint – ou à quel prophète – se vouer. Le pape lui-même a tremblé devant eux, et bien failli ma foi y perdre sa très sainte tête, avant de parvenir à se les concilier. Et pourtant, il règne en Normandie une sécurité absolument incomparable, que tout le royaume de France envie, et qui ferait pâlir de jalousie n’importe quel suzerain désireux de pacifier son empire. Guillaume de Normandie est parvenu à faire régner un tel ordre au sein de son duché qu’on peut se promener un plein sac d’or au côté en toute tranquillité, laisser au champ sa charrue la nuit et l’y retrouver au matin, ou encore voyager seul par chemins et par vaux sans la moindre inquiétude. Sont-ils portés à la violence, au pillage, à l’abus de pouvoir, au recours à la force ? Très certainement aussi, ils l’ont toujours été, et leurs ancêtres avant eux l’étaient bien davantage encore. Et pourtant, ils ont aboli depuis longtemps l’esclavage que nous-mêmes ou les Scots pratiquons encore, et il n’est pour ainsi dire pas même chez eux de servage : presque tous les travailleurs de la terre sont libres. Ils sont pieux, très pieux, au point que la papauté en a fait le bras armé de Dieu dans sa lutte contre les Infidèles ; mais, dans le même temps, ce sont eux-mêmes, et à plus d’un titre, de forts mauvais chrétiens – et leurs clercs les premiers. Ils prétendent réformer l’Église, mais leurs évêques guerroient et sont bien plus à l’aise sur les champs de bataille et en forêt à chasser le cerf que dans leurs cathédrales, qu’ils n’hésitent pas à brûler, d’ailleurs, s’il faut en déloger quelque ennemi ; c’est ce qu’a fait Yves de Bellême, seigneur de Bellême et évêque de Sées – parce que les Normands aiment à cumuler titres laïcs et ecclésiastiques – qui a jadis mis le feu à sa propre église pour en faire sortir ses ennemis, et s’est fait, à ce titre, sérieusement blâmer par le pape.

Aleyssia, stupéfaite, ne savait que penser.

− En fait, ce peuple est probablement le plus remarquable, le plus surprenant et le plus paradoxal à la fois qu’il m’ait été donné d’étudier. Le duc s’est fait excommunier, et avec lui tout son duché frapper d’interdit, quand il n’en a fait qu’à sa tête et a épousé sa cousine Mathilde de Flandre, malgré l’interdiction papale ; et, aujourd’hui, la bannière de Saint-Pierre flotte probablement en haut de son mât, tant Alexandre le soutient dans sa quête. Guillaume prêche la réforme, mais ses prêtres, ses évêques et ses chanoines pratiquent le nicolaïsme[1] et, bien souvent, la simonie[2]. Il fait construire les plus belles abbayes du pays, mais il n’a que faire des directives du pape, et continue de nommer lui-même ses évêques et abbés. Il glorifie Dieu, mais peut se montrer sans pitié avec ses ennemis. Il est capable tout à la fois de la plus extrême cruauté et de la plus improbable mansuétude. D’exiler et de pardonner. De mutiler et de gracier. De détruire par le feu et de faire reconstruire.

» Et son peuple est à son image : en dignes successeurs de leurs païens d’ancêtres, les Normands peuvent commettre des ravages innommables sur leur passage ; dans le même temps, ce sont les bâtisseurs les plus fébriles et les plus enthousiastes que le monde connaisse. Pas une année sans qu’une nouvelle abbaye, un nouveau château, une nouvelle cathédrale, un nouveau monastère ne voie le jour. Ils rasent et brûlent les forêts, défrichent et déboisent tant et plus, mais les villages et les bourgs poussent comme des champignons partout où ils passent, les moulins prolifèrent, des églises s’élèvent, des terres sont mises en culture, des hameaux naissent à l’orée des bois, des villes émergent dans les clairières, d’autres s’étalent et florissent tant qu’elles débordent de leurs vieilles enceintes. C’est un peuple remarquable, Aleyssia. Impressionnant, très certainement. Dangereux, sans aucun doute. Mais si difficile à cerner, si… si impossible à réduire… à une simple définition… si ambigu, si surprenant !

(…)

− Vous semblez très enclin à leur reconnaître autant de qualités que de défauts, mon père, se permit-elle de remarquer, un peu amère. Mais, pour ma part, du tableau que vous me peignez, il m’apparaît qu’une seule conclusion saurait être tirée : ces hommes sont sans aucun doute possible les créatures les plus fourbes de la Création. (…)

− Je pense qu’il s’agit moins d’hypocrisie que d’un double héritage, Aleyssia. (…) Ou d’une double culture, si vous préférez. (…) Les Normands sont chrétiens, Aleyssia, et ils appartiennent au monde franc ; nous sommes bien d’accord. Mais vous ne devez pas oublier pour autant que nombre d’entre eux ont également des origines scandinaves. Que leurs ancêtres du siècle passé et du précédent ont si bien saccagé la Neustrie pendant des décennies qu’on a fini par leur céder les comtés de Rouen, d’Évreux et de Lisieux, pour les inciter à se tenir tranquilles – et faire cesser cette manie détestable qu’ils avaient de mettre le pays à feu et à sang. Nous en savons quelque chose, Aleyssia : les Vikings ont fait autant de ravages par chez nous, si ce n’est plus (…) Bien sûr, en cent cinquante ans ces « Northmen », ces « hommes du Nord », ces « Normands » se sont convertis… Ils se sont francisés… christianisés… assagis… Ils se sont intégrés au monde carolingien, puis au monde capétien, ils ont fait reconstruire et restaurer les abbayes qu’ils avaient incendiées, ils leur ont redonné des fiefs, ont rétabli une vie monastique et épiscopale sur leurs terres, se sont mis à défendre farouchement les symboles de la chrétienté… et la Normandie accueille aujourd’hui parmi les centres intellectuels les plus prestigieux du pays. Mais on ne renie pas ses origines. Ces hommes sont restés insatiables, tout comme l’étaient leurs ancêtres. Ils ont soif d’aventures, soif de conquêtes, soif de richesses, soif de découvertes, de nouvelles entreprises, soif de sang, même, peut-être – que Dieu ait pitié de leurs âmes ! –, et cette soif continue de couler dans leurs veines, avide et dévorante, comme elle coule encore chez les hommes du Nord – dût-elle les conduire à leur perte, comme elle y a conduit Harald.

Le vieux chapelain reprit son souffle. Aleyssia, plus anxieuse qu’attentive, était désespérée.

− En fait, ils conservent tout simplement, et comme chacun d’entre nous, des traces de leur passé. Ils ont gardé de leurs ancêtres la ruse, l’intelligence politique, l’art du commerce, de la navigation et de la construction navale, le goût de la guerre, de la rapine, de la conquête, de l’argent facile, du mercenariat, de la rébellion, de la trahison, aussi ; et se les transmettent de génération en génération. Dans les campagnes, surtout dans l’Ouest, on parle encore le vieux norrois çà et là et on vénère en cachette tous les anciens dieux nordiques. La Normandie n’a cessé de servir de base arrière aux Vikings harcelant nos côtes, le marché de Rouen n’a cessé de servir à écouler le butin des raids dano-norvégiens sur nos îles, le duché n’a cessé d’entretenir toutes sortes de rapports, d’échanges commerciaux et d’alliances avec la Scandinavie. Si l’esprit qui domine aujourd’hui en Normandie est sans conteste l’esprit franc, les survivances et les particularismes norrois n’en sont pas moins vivaces. En fait, on y est à la fois franc et normand, chrétien et païen. On se marie à l’église, mais on s’unit more danico, à la mode danoise, avec une concubine ou deux – les grands seigneurs, j’entends (…) D’ailleurs, le duc Guillaume lui-même est né d’une telle union. D’une union « à la danoise », sans cérémonie religieuse – et donc, non officielle. C’est pourquoi il est souvent traité de « bâtard ». Mais, en réalité… Eh bien, pour ses ancêtres, en tout cas, et ne serait-ce que pour son grand-père, il n’aurait rien eu d’illégitime : les enfants nés des unions more danico étaient tout aussi légitimes que les autres. D’ailleurs, et son grand-père, et son arrière-grand-père, et son arrière-arrière-grand-père, étaient issus de telles cohabitations : ils sont tous nés de concubines, et non d’épouses chrétiennes officielles. La bâtardise n’ayant jamais non plus, chez les Normands, empêché quiconque de devenir comte ou évêque. Certes, les choses changent et Guillaume a bien plus souffert de sa bâtardise que ses prédécesseurs, mais… il n’en demeure pas moins que les mœurs normandes continuent singulièrement de se distinguer du reste du monde franc – et, a fortiori, chrétien. Il n’est jamais facile de se faire une idée d’un peuple de l’extérieur, douce enfant. Et de celui-ci probablement encore moins que de tout autre…

Cette fois, Aleyssia était complètement perdue. Que penser, que croire ? Comment se préparer à affronter des hommes si imprévisibles ? Si ambigus, si différents ? La jeune femme, pensive, se mordillait nerveusement la lèvre. Tout à ses réflexions, le vieux chapelain continuait :

− Alors, pour vous répondre, Aleyssia, et puisque vous me le demandez, en tant que châtelaine d’Arundel, oui. Oui, ces hommes sont dangereux. Mais l’on peut, sans doute, composer avec eux bien davantage qu’avec des hommes comme ce Harald de Norvège. Les Normands sont capables de tout, oui, sans doute. D’assassiner une épouse pour être libre d’en épouser une autre, de profiter d’une noce pour mutiler sauvagement un rival, de s’enliser dans d’interminables faides[3] et d’y engloutir des générations, de massacrer des innocents, de brûler des monastères, des églises, de saintes reliques et que sais-je d’autre ; on dit même que l’un d’eux, qui combattait les Infidèles en Espagne, se faisait à l’époque chaque jour servir la tête de l’un d’eux, le matin au réveil. Mais ils sont aussi capables d’élever les plus belles cathédrales, les plus belles abbayes, les plus belles voûtes, les plus belles nefs ; de gouverner avec une habileté que même le roi de France leur envie ; de déployer une énergie folle dans chacune de leurs entreprises, de se comporter en dignes fils de l’Église si l’envie leur en prend et de faire preuve de plus de ruse et de diplomatie que de violence gratuite. Ces hommes sont doubles, Aleyssia ; ils ont hérité de la force viking et ont su la mouler dans des formes latines et chrétiennes ; ils savent associer en un alliage imparable la violence guerrière de leurs ancêtres scandinaves à la maîtrise de la loi, de la juridiction et du recours à la légitimation pontificale, comme nul autre peuple peut-être. Parfois, cette violence naturelle transperce cette carapace policée et rejaillit au grand jour. Parfois, cette fougue est tenue en laisse ou transparaît plus subtilement à travers leur impitoyable gouvernance. Mais en aucun cas ces hommes ne sont hypocrites, Aleyssia. Ils sont doubles, pleins de contrastes et de paradoxes, mais ils ne sont pas faux.

Un long silence suivit. Aleyssia, maussade, se trouvait bien avancée. Elle avait voulu en savoir plus sur l’envahisseur, elle était servie.

À ce seul détail près que… ça ne l’aidait pas du tout. Car enfin, quelle position adopter face à un peuple cruel, mais pieux, législateur, mais voleur, incendiaire, mais bâtisseur, cupide, conquérant, indomptable, invincible… et convaincu d’être au service de Dieu ? »

Fin du passage !

En résumé, et c’est bien là ce dont il est question dans La Demoiselle d’Arundel, les Normands passeront du statut de guerriers cupides, égoïstes, se battant au seul nom du sang, de l’or et de la gloire (je caricature, bien sûr, mais c’est ainsi qu’ils étaient perçus par leurs contemporains) aux champions de la papauté, des guerriers tout aussi sanguinaires, des chefs de guerre tout aussi implacables, mais combattant cette fois au nom d’une Vérité Ultime, d’un Dieu suprême et du pape, autant de garanties justifiant, au nom de la prédication et du Christ, toutes sortes d’exactions et camouflant habilement leurs appétits plus prosaïques hérités de leurs ancêtres scandinaves !

Conclusion

J’espère de tout cœur que cette petite analyse, sortant un peu de l’ordinaire, vous aura plu, et je vous donne rendez-vous dans tout plein d’articles complémentaires (tous ceux cités au fil de cette synthèse !) pour continuer l’aventure !

Texte : (c) Aurélie Depraz
Illustration de l’article : image libre de droit Pixabay

Quelques sources

La Spirale Dynamique, Fabien et Patricia Chabreuil

Organisme de formation : L’Atelier des Coachs (chez qui j’ai suivi les deux premiers niveaux de formation concernant la Spirale !)

https://chabreuil.com/Aurore/archives/109-Erik-le-ROUGE-et-compagnie.html#comments

file:///C:/Users/aurel/Downloads/Chabreuil_La_Spirale_Dynamique.pdf

https://paradigm21.ch/fr/articles/niveaux-existence-spirale-dynamique/

https://illusiondudragon.fr/spirale-dynamique-changement/


[1] Pratique, dans le christianisme, et particulièrement dans l’Église latine du Moyen Âge (jusqu’au XIe siècle) de l’incontinence sexuelle (par le mariage, le concubinage ou même l’encouragement de la luxure) des clercs s’opposant au célibat.

[2] Achat et vente des charges ecclésiastiques.

[3] Système de vengeance privée opposant deux clans, deux tribus, deux familles, etc.