L'Histoire (la grande !)

Petite histoire… de l’Islande

L’Islande a été le dernier pays européen à être colonisé par l’Homme… Petite synthèse de son histoire pour illustrer mon 5e roman, Comme une aurore dans la brume

Aux origines…

Une terre inconnue, qu’on nomme « Thulé », située au nord de l’Angleterre, éloignée de tout, est mentionnée à plusieurs reprises dans les sources antiques et du haut Moyen-Age :

  • Par le navigateur grec Pythéas, au IVe s. av. JC
  • Par l’historien C. Procope de Césacrée au VIe s. ap. JC
  • Par le moine anglo-saxon Bède le Vénérable au VIIe s. ap. JC
  • Par le moine irlandais Dicuil au IXe s.

Cependant, on ignore à ce jour si tous ces récits faisaient bien allusion à l’Islande… ou aux côtes norvégiennes, par exemple… Dicuil fait cependant allusion à quelques moines irlandais, les « papars », bel et bien venus chercher en Islande la solitude… Des moines que les Scandinaves trouveront (et feront fuir…) en (re)découvrant l’île et en s’y installant.

860-930 : découverte et colonisation (le « Landnámsöld »)

1/ Découverte

A partir des années 860, plusieurs Scandinaves auraient atteint, parfois par hasard, parfois volontairement, les côtes islandaises (j’en nomme plusieurs dans mon roman : ce ne sont pas des noms inventés !). Selon les sources et sagas, on cite :

  • Vers 860-861 : Naddoddr, né dans le sud de la Norvège et qui fut parmi les premiers colons des îles Féroé. Il aurait atteint l’Islande par hasard en naviguant entre la Norvège et les Féroé et en se perdant avec ses hommes. Ils auraient un peu exploré l’île et l’auraient baptisée « Snaeland » = « Terre de neige »
  • Dans les années 860 : le Suédois Gardar Svavarsson : il est le premier à faire le tour de l’Islande, à en conclure que c’est une île et même à y passer un hiver. Il y serait également parvenu par hasard, suite à une tempête qui l’aurait dévié de sa trajectoire Suède-Hébrides.
  • Au même moment : Nattfari, un des hommes ou esclaves de Gardar, fuit, avec deux autres esclaves et se réfugie quelque part sur l’île quand Gardar la quitte, au printemps. Il s’agirait donc des trois premiers résidents permanents de l’île.
  • Le Norvégien Floki (personnage retrouvé dans la série « Vikings » !) : il serait parti (avec deux autres hommes, Thorolf et Herjolf) du sud-ouest de la Norvège, quelque part entre le Hordaland et le Rogaland (donc précisément la région où se déroule mon roman !^^), aurait fait étape aux Féroé (où il aurait fait embarquer un 3e compagnon, Faxi), et mis le cap sur l’Islande. Il aurait été le premier à l’appeler ainsi : la « Terre de Glace ». Il y aurait passé deux hivers avant de la quitter.
  • En 871 : le Norvégien Ingolf Arnarson et son beau-frère Hjörleiv Hrodmarsson quittent la Norvège, font un premier voyage en Islande, reviennent au pays et repartent ensuite s’installer définitivement en Islande (en 871, 874… les dates divergent…). C’est Ingolf qui fondera Reykjavik (la capitale actuelle !)

Et là, à sa suite, le véritable mouvement de colonisation commence…

2/ Colonisation

Les colons viennent principalement de l’ouest de la Norvège (c’est le cas d’Haakon, le héros de Comme une aurore dans la brume , qui vit dans le Rogaland = sud-ouest de la Norvège), mais aussi des Féroé, des Shetland, des Orcades, du nord de l’Ecosse… Ils migrent avec femmes, enfants, esclaves, bêtes et serviteurs, importent leur bétail (races de chevaux, vaches, moutons originaires de la Norvège pour la plupart…) et s’octroient d’immenses terrains. Ils s’installent sur la côte, les plaines, les vallées fluviales (l’intérieur des terres, fait de volcans et de glaciers, est inhabitable). Ils apportent avec eux la culture viking, qui survivra là-bas plus tard et plus authentiquement que partout ailleurs (l’isolement aidant). Ils vivent en hommes libres et se réunissent à l’occasion de things (assemblées) locaux où chacun peut s’exprimer librement et résoudre les conflits. Ils reprennent les bases libertaires, égalitaires et solidaires de la société viking d’où ils viennent, mais… sans rois et sans jarls, de surcroît ! Pendant 60 ans, aucun gouvernement centralisé. Des fermes isolées, des hommes libres et beaucoup de place pour chacun. Le rêve d’Haakon.

La colonisation est essentiellement le fait de fermiers libres indépendants (comme Haakon…) et de chefs de clan : il fallait une certaine richesse pour pouvoir s’offrir la traversée. La colonisation, en ce sens, aura été, en quelque sorte, financée par les raids précédents, par toutes ces richesses accumulées grâce au commerce et au pillage.

La société (exclusivement rurale) ainsi fondée est relativement égalitaire, libre et juste (même si des inégalités sociales subsistent toujours : hommes libres plus ou moins riches, affranchis, esclaves, métayers, travailleurs sans terre, petits chefs de clan locaux…)

A noter : le climat étant alors plus clément aujourd’hui (optimum climatique médiéval), l’Islande aurait été plus verte alors qu’elle ne l’est aujourd’hui. En outre, elle aurait présenté d’abondantes forêts… qui eurent toutes disparu en seulement quelques décennies, les Vikings étant (vous l’aurez compris en lisant mon roman !) les rois du défrichage… L’exploitation agricole et forestière de l’île sera une des principales causes de la dégradation des sols islandais… Les prairies sont vite abîmées par le surpâturage etc.

A noter aussi : les Scandinaves viennent accompagnés de nombreux esclaves quasiment tous d’origine celte (d’Ecosse et d’Irlande). Les Islandais d’aujourd’hui ont un patrimoine génétique exclusivement celtico-nordique. L’île est restée très coupée du reste du monde. La plupart des femmes (d’après les études génétiques effectuées) auraient été d’origine celtique (tiens, tiens… comme… Aélis, non ?^^).

Parmi les raisons invoquées par les historiens pour expliquer cet engouement pour l’Islande :

  • Le manque de terres agro-pastorales, l’expansion démographique scandinave, le besoin de nouveaux pâturages… ;
  • L’esprit profondément curieux, avant-gardiste et explorateur des Vikings (marins et découvreurs avant tout), et notamment des Norvégiens, naturellement poussés vers la mer (du Nord, entre autres) par la configuration de leur pays ;
  • Les défaites norvégiennes essuyées en Irlande, où ils s’étaient implantés depuis plusieurs décennies (lire ma « Petite histoire des Vikings : 2- Les Norvégiens ») et où ils commencent à perdre leur suprématie (avec, aussi, l’arrivée des Danois d’Angleterre qui viennent mettre leur nez en terre gaël… – lire mon article « Petite histoire des Vikings : 1 – Les Danois » et mon roman « L’amour, la mer, le fer et le sang »)
  • Les velléités du roi Harald du Vestfold qui, comme je l’explique dans mon roman et dans mon article sur l’Histoire des Vikings norvégiens, est considéré comme le premier monarque à unifier le pays… Ses conquêtes successives sur tous les autres royaumes de Norvège, et notamment sa victoire finale sur le Hordaland et le Rogaland en 872 à la bataille de Hafrsfjord, près de Stavanger, auraient fait fuir de nombreux Norvégiens vers les Orcades, les Shetland, les Féroé… et l’Islande. Son pouvoir souvent qualifié de « despotique » ou de « tyrannique » (même si on en revient un peu), les lourdes taxes qu’il aurait imposées aux propriétaires terriens etc. auraient encouragé cet exode assez massif. Néanmoins, les historiens aiment à rappeler que la colonisation a commencé AVANT la bataille de Hafrsfjord (dont la date est officiellement 872, mais qui a très bien pu survenir 10 à 15 ans plus tard, selon certains historiens !) et que la supposée « tyrannie » d’Harald est loin d’être la seule cause à l’origine de cette migration ! (voir les – au moins – 3 autres raisons évoquées ci-dessus). A noter : Harald, de peur de voir son « nouveau » grand royaume se dépeupler, aurait rapidement interdit l’émigration… avant de l’autoriser, moyennant une taxe de cinq onces d’argent par migrant, à payer au moment du départ…

La colonisation durera 60 ans. Il n’y aura plus jamais d’autre vague migratoire vers l’Islande !

Certains estiment qu’en 930, l’Islande est peuplée de quelque 6000 colons. D’autres, entre 10 et 20 000.

930 : fondation de l’Etat libre islandais

En 920, l’île étant complètement colonisée, et la population s’accroissant rapidement, on commence à ressentir le besoin d’une organisation plus globale (jusque-là, chaque petite communauté, sur un bout de l’île, avait édicté ses propres lois et s’était réunie autour d’un chef (qui prend en charge des services comme les sacrifices aux dieux, la présidence du Thing local etc).

Comme les colons veulent vivre en paix, on s’accorde à dire qu’il faut un parlement commun et une unification des lois. On choisit un lieu pour un Althing central (sorte d’Assemblée nationale), on étudie la loi auprès du Gulathing (l’un des plus anciens Things norvégiens), on fonde, à partir d’elle, la loi islandaise commune à tous, et le tour est joué ! Unification du droit et de la société, donc.

En 930, un parlement commun à toute l’île est donc fondé (en plus des petits things locaux) : l’Althing (pouvoir judiciaire et législatif). C’est le début de l’Etat libre islandais. L’Althing est le plus vieux parlement… du monde !

Années 980 à 1000 : Groenland et Amérique du Nord : l’âge des Sagas

C’est depuis l’Islande que les Vikings auraient continué de mener leurs expéditions vers l’ouest. Quelques dates :

  • En 900 ou 901 : Gunnbjorn aurait aperçu le Groenland.
  • En 978 : Snaebjörn Galti tente d’établir une colonie au Groenland, sans succès.
  • En 982 : Erik le Rouge redécouvre le Groenland.
  • Vers 985, il y retourne et y fonde une colonie permanente (il l’appelle « Greenland » ou « Pays vert » pour y attirer les colons)
  • En 986 Bjarni Herjolfsson aurait aperçu la côte du continent américain
  • En 1000, Leif Eriksson (fils d’Erik le Rouge) touche l’Amérique du Nord (l’est du Canada, le Labrador, l’île de Baffin, l’Anse aux Meadows de Terre-Neuve…) qu’il nomme Vinland.

1000 : la christianisation

Alors que les pays scandinaves (Suède, Danemark, Norvège) se sont déjà quasiment intégralement convertis à la fin du Xe s., l’Islande reste peu touchée par le phénomène (et même assez réfractaire).

Cependant, les Islandais vont devoir passer du paganisme nordique au christianisme sous la pression du roi norvégien Olaf Tryggvason (descendant, cela va sans dire, du roi Harald – on considère souvent que c’est Olaf qui a véritablement fini d’unifier la Norvège ; et, surtout, qui l’a christianisée, obtenant par là le surnom de « Saint Olaf ») qui, après avoir évangélisé son royaume, dirigea ses efforts vers les colonies norroises du nord des îles britanniques (Shetland, Féroé, Orcades… et Islande).

Au début, on se contenta d’envoyer des missionnaires en Islande et de convertir ceux qui le souhaitaient. Les opposants à la Chrétienté restaient néanmoins majoritaires et les missionnaires étaient plutôt mal accueillis.

On finit par céder aux pressions d’Olaf (qui menaçait de se venger sur les Islandais revenus s’installer en Norvège et de massacrer les Islandais rebelles à la conversion) en déclarant le christianisme religion officielle de l’Islande en l’an Mil, principalement pour éviter tout massacre et toute guerre de religion. Tous les Islandais furent alors convertis. Dans un premier temps, le paganisme exercé en privé resta toléré (hippophagie, sacrifices…), mais il finit malgré tout par être totalement interdit. Olaf mourut la même année…

930-1262 : de l’état libre islandais à la domination norvégienne

Avec la christianisation, c’est tout le système égalitaire d’origine qui est bouleversé : l’impôt ecclésiastique (la dîme) est introduit ; il enrichit l’Eglise ; les évêques jouissent d’une puissance accrue ; et les chefs des diverses communautés ont vite compris le principe : ils se font nommer prêtres et s’enrichissent eux aussi de cet impôt. Peu à peu, la richesse croissante de l’Eglise déstabilise le système égalitaire en place : en profitant à certains, elle les rend plus puissants et leur permet d’agrandir peu à peu leurs territoires, au mépris des lois en place…

Si bien qu’au début du XIIIe s., l’essentiel du pouvoir politique et des richesses économiques sont au pouvoir de quelques familles : les tensions s’accroissent et aboutissent, lorsque le roi de Norvège (où la monarchie s’est renforcée ces dernières décennies) Håkon IV ambitionne de placer l’Islande sous son autorité, en une véritable guerre civile entre chefs locaux vassaux d’Håkon et leurs opposants. Finalement, après moult affrontements et assassinats politiques, Håkon, aidé de ses représentants et partisans islandais, parvient à faire passer l’Islande sous domination norvégienne. L’Althing est affaibli, la « République » n’est plus. Avec la signature du « Vieux Pacte », l’Islande passe sous domination norvégienne en 1262… et jusqu’en 1380. Les Islandais reconnaissent le roi de Norvège comme leur souverain et lui paient une taxe annuelle. L’Althing garde quelques pouvoirs et les lois norvégiennes sont adaptées au contexte islandais, on compose… mais l’Islande n’en reste pas moins sous la coupe des souverains de Norvège.

1380-début XIXe : Sous la coupe des Danois : un long et douloureux déclin

Mais c’est sous celle des Danois que l’Islande va véritablement connaître les heures sombres de son Histoire.

A la fin du XIVe s., l’Union de Kalmar réunit les 3 royaumes du Danemark, de la Suède (qui possède alors une partie de la Finlande actuelle) et de la Norvège (qui possède l’Islande, les Féroé et le Groenland) pour faire face à l’expansion germanique et à la puissance de la ligue hanséatique qui accroît considérablement son pouvoir sur la mer Baltique. Le Danemark domine le tout et, bientôt, la Norvège (et donc l’Islande) passe plus ou moins sous son contrôle.

Au début du XVIe s., l’union de Kalmar prend fin, la Suède refusant d’être sous la coupe du Danemark qui tente sans cesse d’affirmer sa suprématie sur l’Union de Kalmar (les 3 royaumes étant censés être, à l’origine, politiquement « égaux » dans cette union). L’Union fait donc place au « Royaume du Danemark et de Norvège »… dont fait toujours partie l’Islande.

Et c’est là, à partir de l’Union de Kalmar, mais surtout du XVIe s., que les ennuis commencent :

  • La peste : autour de 1400 + autour de 1495 : deux pestes qui déciment la population. De nombreuses fermes sont abandonnées ; l’île aura beaucoup de mal à s’en remettre.
  • La concurrence des pêcheurs anglais, qui viennent abondamment piocher dans les réserves de poisson de l’île.
  • La concurrence des marchands hambourgeois et de toute la ligue hanséatique.
  • La Réforme protestante qui a lieu au Danemark et qu’on veut imposer à l’Islande (qui, elle, souhaite rester fidèle au catholicisme) : les guerres de religion qui embrasent alors toute l’Europe n’épargnent pas l’Islande, qui finit par se voir imposer la réforme luthérienne, avec son lot de conséquences au profit du pouvoir royal danois :
    • Le roi étant chef de la nouvelle religion, il confisque nombre de terres jusque-là aux mains des monastères et de l’église catholique ;
    • Les taxes, amendes et autres revenus partent désormais directement à la couronne ;
    • Le roi accroît ainsi son pouvoir ;
    • En 1602, il impose le monopole commercial avec le Danemark (les échanges, et pour deux siècles, ne pourront se faire qu’avec des ports danois) ;
    • En 1662, le roi danois fait abolir le Vieux Pacte de 1262 (qui prévoyait des faveurs et traitements spéciaux pour l’Islande) et impose la monarchie absolue à l’Islande (terminé les privilèges, les lois spéciales…). L’Althing n’a pour ainsi dire plus de pouvoir. L’Islande se voit confisquer tout pouvoir et toute autonomie.
    • L’Islande ne devient qu’une colonie surexploitée et glisse peu à peu vers la pauvreté.
  • La piraterie qui ravage ses côtes (raids barbaresques perpétrés par des Algériens qui emmènent même des esclaves islandais en Afrique du Nord).
  • La spoliation de son patrimoine culturel : quand, au XVIIe s., Danois et Suédois commencent à s’intéresser à l’Histoire de leurs nations respectives, ils se jettent sur les manuscrits islandais, l’Islande ayant le malheur d’être le seul pays nordique avec une certaine tradition écrite, le seul où l’Histoire médiévale a été retracée (les fameuses sagas islandaises, notamment !). La plupart des manuscrits sont emportés et conservés à Copenhague…
  • De nombreux abus et préjudices commis par les représentants gouvernementaux et juges.
  • La pauvreté croissante, qui devient presque endémique.
  • Des famines et l’abandon de nombreuses fermes.
  • Une terrible épidémie de variole, en 1707.
  • Une dépopulation, carrément, au cours du XVIIIe s.
  • De nombreux prêches contre l’apprentissage des sagas (patrimoine culturel local très important et traditionnel).
  • Un manque d’intérêt criant de la part de la monarchie danoise jusqu’au XVIIIe (période où le Danemark essaiera, pour quelque temps seulement d’améliorer les conditions de vie en Islande et de la développer économiquement).
  • De nombreuses catastrophes naturelles, dont deux énormes éruptions volcaniques en 1755 et 1766 et, surtout, l’éruption des Lakagigar qui durera plus d’une année, dont la lave couvrira 565km2 (le plus grand champ de lave jamais créé par une seule éruption) et dont les gaz toxiques empoisonneront faune et flore, provoquant la mort (de faim) de 10 000 personnes (sur environ… 50 000…) ; sans oublier (pour faire bien…) quelques gros tremblements de terre en 1784, si dramatiques qu’on envisage même l’évacuation de l’île…
  • L’abolition de l’Althing (devenu inutile…) en 1800. C’était tout de même le cœur, le pilier de l’ancien Etat libre islandais, la toute première et fondamentale institution du pays…
  • Et puis, comme si ça ne suffisait pas, les guerres napoléoniennes viennent affecter les échanges maritimes européens (ce qui, pour un pays comme l’Islande, est dramatique, on s’en doute).

On aurait pu croire qu’avec la défaite de la France napoléonienne (dont le Danemark était l’allié), l’Islande allait pouvoir respirer, puisque le Danemark doit, pour prix de son alliance avec Napoléon, céder la Norvège… mais l’Islande, pourtant associée à la Norvège depuis 1262, reste, avec le Groenland et les Féroé, aux mains des Danois…

Vers l’indépendance

Mais les guerres napoléoniennes ont eu le mérite, en mettant à mal le royaume du Danemark notamment, d’éveiller des velléités indépendantistes islandaises… :

  • En 1809 déjà, un aventurier danois (oui ! oui !) tente d’abolir la souveraineté du Danemark en Islande et de placer l’île sous la protection britannique.
  • En 1843, on rétablit un Althing sous la forme d’une assemblée consultative qui s’installe à Reykjavik.
  • En 1849, la monarchie absolue est abolie au Danemark, qui se dote d’une constitution.
  • Jon Sigurdsson, grande figure de l’indépendance islandaise, en profite pour émettre l’idée que le principe du Vieux Pacte (autrefois avec la Norvège) devrait être rétabli (=idée d’une union et non d’une soumission totale au Danemark).
  • Peu à peu, les Islandais obtiennent quelques droits (par miettes).
  • En 1874, l’Islande obtient une plus large autonomie quant à ses affaires intérieures, un nouveau pouvoir législatif dévolu à l’Althing…
  • En 1885, une banque nationale est créée.
  • En 1904, l’Islande obtient le pouvoir exécutif suite à un amendement constitutionnel émanant de l’Althing et accepté par les autorités danoises.
  • 1913 : l’Islande se dote de son propre drapeau.
  • En 1918, le régime dit de « l’union personnelle » est enfin décrété entre le Danemark et l’Islande (par référendum !) : l’Islande devient un royaume à part entière (même si son roi est toujours le même que pour le Danemark). Très important : le Danemark conserve la souveraineté sur les affaires étrangères et la défense, mais l’autonomie de l’Islande est, à part cela, consacrée par l’Acte d’Union. Cet acte devait être réexaminé 25 ans plus tard, soit en 1943… en pleine guerre mondiale.

Mais l’Islande est encore loin de s’être dépêtrée de ses difficultés : comme tout le monde, elle est touchée par la Première Guerre Mondiale, la Grande Dépression… Et, à la fin du XIXe, entre 10 et 20 000 Islandais avaient fui l’île pour l’Amérique du Nord, fuyant les difficultés économiques qui ne s’estompaient pas.

Depuis 1940 : retour aux origines : indépendance, retour de la République et modèle démocratique islandais

1940-45 : la Deuxième Guerre Mondiale sonne le glas de la domination danoise. Le Danemark tombe, dès 1940, aux mains de l’Allemagne nazie. La Grande-Bretagne, de peur que les « possessions » danoises (Féroé, Groenland, Islande) ne servent de base de ravitaillement aux sous-marins allemands ou leur permettent de contrôle l’Atlantique nord, ou encore de compromettre les liaisons Grande-Bretagne/Russie, envahissent l’Islande, pourtant neutre, bientôt renforcés des Américains. L’Althing doit nommer un régent puis prononcer la séparation politique totale entre Islande et Danemark.

En 1943, l’Acte d’Union devait être renégocié. Mais le Danemark étant dans l’impossibilité d’agir politiquement, l’Islande décide d’agir unilatéralement, organisent un référendum pour planifier une éventuelle sécession. Résultats fulgurants : 98,6% de votants… donc 97,3% en faveur de la sécession !

En 1944, l’Althing proclame donc l’indépendance de l’Islande sous forme d’une République : on revient ENFIN aux sources !!! Les Alliés reconnaissent ce nouvel état et le Danemark ne peut que s’incliner.

Et l’Islande retrouve ses origines et, surtout, ce statut de modèle de tolérance, de liberté et d’égalité de sa prime jeunesse : un modèle démocratique avant-gardiste, progressiste, en avance, comme le montrent, au hasard, ces quelques faits :

  • Dès 1908 déjà, les femmes avaient obtenu le droit de vote et le droit d’être candidates à une élection (soit bien avant les Françaises…)
  • En 1980, l’Islande présente la première femme élue à la tête d’un Etat constitutionnel (très populaire, celle-ci sera même réélue 3 fois !)
  • En 2009, elle fait démissionner son gouvernement.
  • La même année, l’Islande offre au monde une femme Premier Ministre.

Elle reste relativement isolée et indépendantiste puisque son adhésion à l’OTAN aura généré de nombreuses manifestations populaires (contre) et qu’elle aura finalement, après moult hésitations et tergiversations, retiré sa demande d’adhésion à l’UE en 2015.

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Texte : (c) Aurélie Depraz
Illustration : Pixabay