Introduction
Impossible de continuer cette série d’articles sur le libertinage et les plus grands libertins de la littérature française sans aborder, après Casanova, le marquis de Sade et le vicomte de Valmont… le célébrissime (et incontournable !) Don Juan, bien sûr.
Cap sur un des séducteurs les plus invétérés de la littérature française… et européenne !
Le tout premier Don Juan
A l’inverse de Casanova et du Marquis de Sade, mais à l’instar du Vicomte de Valmont, qui ont déjà été présentés sur ce blog, Don Juan est un personnage de fiction. Il apparaît officiellement pour la première fois au xviie siècle dans une pièce de théâtre du moine dramaturge espagnol Tirso de Molina : El Burlador de Sevilla (y convidado de piedra), titre traduit successivement par L’Abuseur, le Trompeur et le Séducteur de Séville (et l’invité de pierre).
Il s’agit là de la toute première œuvre littéraire évoquant le personnage de Don Juan, et c’est avec elle que le mythe du plus célèbre séducteur de la littérature naît, prend forme, s’imprime et se retrouve joué en 1630, quand le Siècle d’or espagnol commence seulement à toucher à sa fin.
Résumé (merci wiki !) :
« Dans cette version primitive, don Juan s’enfuit du palais de Naples après avoir séduit la duchesse Isabelle en se faisant passer pour son amant, don Octavio. Son oncle, l’ambassadeur d’Espagne, l’aide à fuir par sentiment d’honneur et don Juan prend alors le bateau pour l’Espagne. L’embarcation fait malheureusement naufrage et don Juan est recueilli et soigné par Tisbée, une splendide jeune femme que don Juan s’empresse de séduire, lui promettant de l’épouser. Il ne respecte pas sa promesse et l’abandonne, puis se rend à Séville où il continue ses méfaits. Le roi de Naples, ayant appris la supercherie de l’Espagnol, veut imposer à don Juan d’épouser Isabelle.
De son côté, don Juan séduit tour à tour l’amante du duc Mota, doña Ana (dont il tue le père, don Gonzalo), ainsi qu’une paysanne, Aminta. Un soir, moqueur, il invite à dîner la statue de don Gonzalo. La statue accepte, à la plus grande surprise de don Juan, et vient chez lui. Cependant, elle ne mange pas et lui propose un dîner le lendemain. Don Juan s’y rend et le dîner est infernal. Lorsqu’il veut s’éclipser, la statue lui attrape la main et l’emmène en enfer. Les victimes de don Juan plaident ensuite leur cause devant le roi : les épousées sont considérées veuves de don Juan, et peuvent ainsi se marier avec ceux qu’elles aiment (Isabelle avec Octavio, Ana avec Mota, Aminta avec Batricio, Tisbée avec qui elle voudra). »
Source du résumé : https://fr.wikipedia.org/wiki/El_Burlador_de_Sevilla_y_convidado_de_piedra
Accueil du public
Non seulement l’œuvre connaît un franc et rapide succès du vivant de son auteur, mais elle sera aussi reprise dans d’innombrables œuvres littéraires, musicales, picturales et même cinématographiques par la suite. Villiers, Dorimond, Molière, Thomas Corneille en France ; Carlo Goldoni, Giacinto Andrea Cicognini, Gasparo Angiolini et Lorenzo da Ponte pour l’Italie ; mais aussi Gluck, Mozart, Pouchkine et de nombreux autres auteurs reprendront le mythe de Don Juan ou y feront allusion dans leur œuvre (jusqu’à Baudelaire, Mérimée, Dumas, Balzac, Hoffmann et Byron !)
De fait, on ne compte plus le nombre de musiciens, de metteurs en scène, de cinéastes et d’auteurs de bandes dessinées qui, encore aux XXe et XXIe siècle, seront fascinés par ce personnage sans foi ni loi, à la fois blasphématoire, libertin et capable de défier allègrement la morale, l’ordre public… et Dieu lui-même.
A l’origine…
A l’origine de cette première pièce, on trouve un possible fait divers du XIVe siècle rapporté par les Chroniques de Séville. Selon ces dernières, Don Juan Tenorio, aurait tué en duel le commander Ulloa… dont il avait enlevé et séduit la fille. Outrés par cet acte abominable, les moines franciscains du monastère où fut enterré ledit commandeur auraient à leur tour assassiné Don Juan par une nuit d’orage et fait disparaître son corps, prétendant par la suite qu’incapable de se repentir, il avait été foudroyé par le Ciel (ou tué par la statue du commandeur) et emmené en enfer en expiation de ses péchés. Le mystère entourant la vie de Don Juan Tenorio contribua sans nul doute à faire émerger la légende entourant ce personnage.
Toutefois, si les individus susmentionnés ont bel et bien existé, il n’est fait nulle part mention dans les archives (notamment des familles Tenorio et Ulloa) d’une disparition suspecte, et encore moins d’un miracle impliquant une statue de pierre qui se serait brusquement animée pour venir punir le débauché…
Peut-être Tirso de Molina s’est-il inspiré de ce qu’on appellerait aujourd’hui une « légende urbaine » ; mais il est également possible (et même probable) que ce soit son propre Don Juan qui soit à l’origine de cette anecdote médiévale montée de toutes pièces a posteriori…
L’émergence du mythe… et son succès
Quoi qu’il en soit, l’œuvre de Molina, on l’a vu, connaît un franc succès, sans doute dû à la combinaison audacieuse de la figure du libertin jouisseur et impie avec des éléments surnaturels et la morale religieuse (le scélérat est puni pour ses fautes) ; de quoi rendre le mythe populaire et favoriser sa propagation dans toutes les couches de la société…
Au point qu’il sera repris (tout ou partie) dans des dizaines d’œuvres de toutes sortes, pièces, opéras, contes, poèmes, nouvelles, romans, ballets, livrets, sérénades, poèmes symphoniques, tableaux, analyses, films… de façon plus ou moins fidèle ou dérivée, selon les âges, les tendances et les époques, bien sûr.
Le personnage évolue donc selon les mœurs et les mentalités (à la fin du XXe siècle, on ira même – évidemment ! – jusqu’à voir en Don Juan un homosexuel refoulé !! avant cela, d’autres œuvres, au XIXe siècle notamment – coucou les Romantiques !^^ –, feront de lui tantôt un personnage tragi-comique, tantôt un homme mélancolique et insatisfait à la recherche – quasi obsessionnelle – de la femme idéale, tantôt un homme révolté en quête de l’amour absolu et capable de repentir…), mais la trame essentielle demeure : séduction, accumulation de femmes, rejet des règles sociales et morales, hérésie, défi à l’autorité et à Dieu, punition divine ou châtiment « exemplaire » restent la marque de son parcours de vie.
Sélection de quelques œuvres tirées du personnage de Don Juan pour la littérature française :
- 1659 : Le Festin de pierre ou le Fils criminel (à Lyon), …ou L’Athée foudroyé (à Paris), pièce de Dorimon ;
- 1660 : Le Festin de pierre ou le Fils criminel, pièce de de Villiers ;
- 1677 : Le Festin de pierre, mise en vers (édulcorée) de la pièce de Molière par Thomas Corneille (à ne pas confondre avec Pierre^^)
- 1830 : L’Elixir de longue vie, de Balzac
- 1832 : Namouna, œuvre d’Alfred de Musset dans laquelle il présente sa conception de Don Juan ;
- 1834 : Les Âmes du purgatoire, de Mérimée ;
- 1836 : Don Juan de Maraña ou la chute d’un ange, pièce d’Alexandre Dumas ;
- 1851 : Le Château des désertes, roman de George Sand ;
- 1861 : « Don Juan aux enfers », poème de Baudelaire dans Les Fleurs du Mal ;
- 1874 : Le Plus Bel Amour de dom Juan, nouvelle de Barbey d’Aurevilly dans Les Diaboliques
- 1914 : Les trois Don Juan, roman d’Apollinaire ;
- 1921 : La Dernière Nuit de don Juan, pièce d’Edmond Rostand ;
- 1922 : L’Homme à la rose, roman de Henry Bataille ;
- 1956 : Une aventure de don Juan, pièce de théâtre d’Alexandre Arnoux
- 1990 : Le Séducteur, roman de Anne-Marie Simond ;
- 1991 : La Nuit de Valognes, pièce d’Eric-Emmanuel Schmitt ;
… et tant d’autres.
Premier listing des nombreuses œuvres tirées du personnage de Don Juan ici.
Pour avoir une liste complète, consulter Christian Biet, Don Juan, Mille et trois récits d’un mythe, Gallimard, collection « Découvertes », 1998
En peinture : traitement du sujet par Fragonard, Delacroix
En musique : Mozart, Liszt, Gluck, Strauss, Tchaïkovsky…
Mais les adaptations les plus célèbres restent sans aucun doute :
- le Don Juan de Molière, pour la littérature française
- le « Don Giovanni » de Mozart, pour l’opéra
Petit Nota Bene orthographique…
Une petite remarque, glissée là, au passage (utile pour la suite de l’article…) : l’usage est d’écrire :
- « Dom Juan » lorsqu’il s’agit du titre de l’œuvre de Molière (ou son personnage)
- « Don Giovanni » ou « Don Juan de Mozart » lorsqu’il s’agit de l’opéra de Mozart
- et « Don Juan » lorsqu’il s’agit d’une autre œuvre (en particulier les œuvres espagnoles, dont celle de Tirso de Molina, bien sûr).
Zoom sur… le Dom Juan de Molière
Présentation de la pièce
Pièce de 5 actes en prose rapidement rédigée en 64-65, le Dom Juan de Molière (alors simplement appelé Le Festin de pierre) est représenté pour la première en février 1665. Annoncée et donnée avec pour sous-titre L’Athée foudroyé, cette pièce se trouve être, après les tragicomédies en vers de Dorimond et de Villiers (en 1658-59), toutes deux intitulées Le Festin de Pierre ou le Fils criminel, la troisième adaptation française du mythe de Don Juan né avec Tirso de Molina en Espagne.
De fait, pour se venger de l’échec de son Tartuffe, Molière profite de ce sujet alors à la mode dans le répertoire du théâtre français, italien et espagnol pour faire coûte que coûte passer son message sur l’hypocrisie et les faux-dévots (le principal sujet du Tartuffe).
En effet, l’année précédente, à Versailles, Molière avait présenté devant la cour de Louis XIV une première version, en trois actes, de son futur Tartuffe. Le roi trouve la pièce « fort divertissante », mais il est très rapidement amené, pour des raisons de politique religieuse, à en interdire les représentations publiques. Six mois plus tard, après avoir vainement tenté de faire revenir le roi sur sa décision et entrepris de restructurer sa pièce en cinq actes, Molière s’empare donc de la légende espagnole du libertin Don Juan et revient, par ce truchement, sur le thème de l’hypocrisie et des faux dévots. Son but ? Faire jouer sa pièce devant l’auditoire le plus large possible.
Après tout, sa devise n’est-elle pas, par la comédie, de « corriger les hommes en les divertissant » (ou « corriger les mœurs par le rire, castigare ridendo mores ») et « d’attaquer les vices de [son] siècle » ? Et, pour lui, impossible de faire l’impasse sur l’hypocrisie, l’« un des (vices les) plus en usage, des plus incommodes et des plus dangereux ».
Le succès… et l’interdit
Le succès est aussi vif qu’immédiat et la troupe de Monsieur frère unique du roi donne 15 représentations triomphales à la suite au théâtre de la grande salle du Palais-Royal à Paris.
Pourtant, si la pièce est accueillie avec enthousiasme par le public parisien, elle fait (bien entendu) très vite l’objet d’une violente attaque, malgré le fait que, dès la deuxième représentation, il est probable que certaines répliques, ayant paru trop hardies, aient été coupées par Molière. Conséquence : sans qu’il y ait eu d’interdiction officielle, Molière est discrètement invité à retirer sa comédie : les dévots se sentant provoqués de nouveau et plus particulièrement par le cinquième acte (qui vise directement les détracteurs du Tartuffe) ont de nouveau gagné la partie : une fois de plus, le roi laisse donc triompher les adversaires de Molière.
Si bien que Molière, malgré le privilège qu’il obtient de la faire publier, ne reprendra jamais sa pièce et s’abstiendra même de la faire imprimer.
De toutes ses grandes œuvres, c’est donc la seule qu’il n’ait pas éditée de son vivant. Dom Juan sera imprimé pour la première fois en 1682 de façon posthume, au tome VII des Œuvres complètes de Molière, sous le titre de Dom Juan ou le Festin de pierre. Le texte est sans doute celui qu’aurait donné Molière lui-même, c’est-à-dire le texte joué par la troupe quand certaines coupures eurent été faites après la première représentation.
Cette édition de 1682, du moins sous sa forme primitive, est extrêmement rare (on n’en connaît que trois exemplaires) : en effet, la censure exigea des suppressions, principalement dans les deux premières scènes du troisième acte, et on dut réimprimer vingt et un feuillets pour satisfaire aux ordres de la polices.
L’année suivante (1683) parait à Amsterdam (Pays-Bas = déjà une terre de tolérance et de grande permissivité) une édition pleine de fautes, mais qui contient les passages supprimés, même dans l’édition originale de 1682. L’édition d’Amsterdam, établie d’après une copie différente de celle de 1682, permet donc de reconstituer le texte de Dom Juan, tel qu’il fut donné à la toute première représentation.
Le théâtre de la Comédie-Française n’accueillera cependant pas cette version de Dom Juan : la veuve de Molière avait effectivement commandé à Thomas Corneille une adaptation en vers de la pièce de son mari, et ce sera ce nouveau Festin de pierre, « expurgé et d’une forme » régulière » », qui sera donné dès 1677. Il faut attendre le 15 janvier 1847 pour que la Comédie-Française reprenne le Dom Juan d’origine Molière ; c’en était donc la seizième représentation !
Dom Juan est donc une des comédies de Molière qui ont été le moins jouées à la Comédie-Française sous sa forme d’origine.
Elle est pourtant aujourd’hui considérée, à l’égal du Tartuffe et du Misanthrope, comme l’un des chefs-d’œuvre de Molière et de la dramaturgie classique française.
Résumé de l’œuvre scène par scène
Un résumé très rigolo (version totalement inattendue, pour ma part^^) en 13 minutes :
On voit déjà ici poindre l’aspect fort contrasté de cette pièce, mêlant allègrement les registres comique, tragique, pathétique, épique, polémique… et même fantastique (!), fort bien retransmis par le narrateur. Mais nous y reviendrons.
Si vous préférez une petite version plus « classique » et scolaire (5 minutes):
Une œuvre complexe et originale
Dom Juan est probablement la pièce de Molière la plus éloignée des exigeances classiques et la plus inspirée du style baroque. En effet :
- les changements de décor sont innombrables (pas moins de 6 – donc rupture de la règle d’unité de lieu)
- les personnages, opposants, aventures et intrigues divers et variés (rupture de la règle d’unité d’action)
- l’action se déroule sur environ 36 heures (rupture de la règle d’unité de temps)
- on assiste quasiment à des combats et à des viols sur scène (rupture de la règle de bienséance…)
- des phénomènes surnaturels se produisent (rupture de la règle de vraisemblance)
- etc.
Bref, avec ses digressions, ses invraisemblances, ses passages fantastiques, Dom Juan s’avère fort loin de l’idéal esthétique de l’époque classique (deuxième moitié du XVIIe siècle), et plus proche des canons du théâtre baroque (foisonnement de personnages et d’intrigues, mises en abyme, théâtre dans le théâtre, multiplication des conquêtes amoureuses, machineries, non-respect des règles classiques, deux ex machina, ingrédients tirés du picaresque…)
Au point que, bien que l’œuvre de Molière soit traditionnellement considérée comme une comédie (« de mœurs », entre autres), voire comme une tragi-comédie (puis que le « héros » – ou antihéros – meurt à la fin, et que le ton est certes loin d’être léger d’un bout à l’autre de la pièce), nombre de critiques disputent encore du genre auquel il convient de la relier.
En 1847, Théophile Gautier écrira, par exemple, dans son compte-rendu de la reprise au Théâtre-Français : « MM. les comédiens ordinaires du roi […] la jouent trop en comédie et pas assez en drame, et c’en est un véritable, avec mélange du comique et du tragique, du burlesque et du terrible, — spectres, apparitions, changements à vue, fantaisie espagnole, profondeur shakespearienne, ironie française, tout s’y trouve »
En 1886, Jules Lemaître parlera, quant à lui, dans ses Impressions de théâtre, d’une « tragi-comédie fantastique et bouffonne […] une macédoine incroyable de tous les genres », ajoutant aussitôt : « Avec cela, il n’est guère de pièce ni plus intéressante d’un bout à l’autre, ni plus émouvante par endroits, ni plus amusante. »
De fait, se mêlent allègrement dans Dom Juan les registres comique (allant jusqu’au farcesque), tragique, épique, pathétique, fantastique, polémique, ironique, satirique… au point que la pièce tient à la fois de la comédie burlesque, de la comédie de caractère, de la comédie de mœurs, de la comédie sérieuse, du drame, de la tragi-comédie… Mélange et rupture de ton, structure en apparence décousue, démesure, coups de théâtre, esprit de dérision, paradoxes, contradictions, fuites et détours, tout est fait pour surprendre le public, le promener du rire aux larmes, de l’effroi aux leçons de morale, en passant par une panoplie de styles et de tons proprement incroyable.
Une seule certitude : Molière ne respecte aucune des règles classiques (si ce n’est que la pièce tient en 5 actes), dont les fameuses 3 unités de temps, de lieu et d’action, la seule unité de la pièce tenant au caractère du « héros » et à sa constance dans ses opinions.
Dès lors, on comprendra qu’il s’agisse d’une pièce qui n’aura cessé de provoquer des réactions contrastées.
Analyse, sens et portée de l’œuvre
On a pu voir tour à tour en Dom Juan (l’œuvre, le personnage) :
- un traitement ironique de la figure du « grand seigneur »
- le reflet de la dégradation des valeurs héroïques au cours du XVIIe siècle (thème qu’on retrouve dans le picaresque) et de la déchéance (notamment politique et morale) d’une partie de la noblesse
- la mise en exergue d’une forme de « paganisme aristocratique » (non sans lien avec la tradition libertine) opposé au christianisme dominant (récemment fort secoué par la Réforme) à une époque où l’aristocratie aspire à davantage de liberté et rejette parfois avec éclat une morale d’abstinence, de contrition, de droiture et d’humilité jugée trop contraignante par certains « grands »
- un héros révolté en quête de liberté absolue (Dom Juan s’oppose en effet à tout, l’ordre social, la religion, la morale, Dieu…)
- le déploiement du thème du don, du contre-don et du contrat (Dom Juan est un homme qui refuse de payer ses dettes, de se plier à ses obligations et d’honorer sa part des contrats conclus)
- un substitut au Tartuffe de Molière, qu’il avait tant de mal à faire accepter et jouer
- etc
Le public et Dom Juan, entre fascination et répulsion
Très complexe, ambivalent, Dom Juan, presque un antihéros, est aussi inclassable et difficile à cerner que la pièce dans son ensemble.
Dom Juan, séducteur & libertin
Inutile de trop s’étendre sur ce point : le personnage de Don Juan a tellement bien incarné la figure même du libertin dans toute sa splendeur qu’au même titre que Casanova, son nom est passé par antonomase dans le langage courant pour désigner un coureur de jupon de façon plus ou moins complaisante.
Coureur, séducteur, conquérant, Dom Juan ne cesse de chercher à cumuler les conquêtes, promet monts et merveilles, séduit, manipule, épouse à tour de bras… et se résout même sans le moindre scrupule à recourir à la force en cas de trop forte résistance.
Athée, matérialiste, c’est un grand adepte de la philosophie libertine, qu’il incarne à merveille. Homme de la démesure, hédoniste, jouisseur, infidèle, opportuniste et sans limites, il vit dans le moment présent, multiplie les conquêtes, séduit absolument toutes les femmes (indépendamment de leur origine sociale et de leur statut matrimonial) et ne vit que pour le plaisir.
Dès l’acte I (scène 2), en digne homme baroque, il se lance d’ailleurs dans une célèbre apologie de l’inconstance amoureuse.
→ Quelques citations… on ne peut plus parlantes :
- DOM JUAN :« Tout le plaisir de l’amour est dans le changement. »
- DOM JUAN : « Il n’est rien de si doux que de triompher de la résistance d’une belle personne »
- DOM JUAN : « J’aime la liberté en amour, tu le sais, et je ne saurais me résoudre à enfermer mon cœur entre quatre murailles. Je te l’ai dit vingt fois, j’ai une pente naturelle à me laisser aller à tout ce qui m’attire. Mon cœur est à toutes les belles, et c’est à elles à le prendre tour à tour et à le garder tant qu’elles le pourront. »
- DOM JUAN : « Il n’est rien qui peut arrêter l’impétuosité de mes désirs ; je me sens un cœur à aimer toute la Terre »
- SGANARELLE : « Tu me dis qu’il a épousé ta maîtresse, crois qu’il aurait plus fait pour sa passion, et qu’avec elle il aurait encore épousé toi, son chien, et son chat. Un mariage ne lui coûte rien à contracter, il ne se sert point d’autres pièges pour attraper les belles, et c’est un épouseur à toutes mains, dame, demoiselle, bourgeoise, paysanne, il ne trouve rien de trop chaud, ni de trop froid pour lui ; et si je te disais le nom de toutes celles qu’il a épousées en divers lieux, ce serait un chapitre à durer jusques au soir. »
- SGANARELLE : « (Dom Juan) passe cette vie en véritable bête brute, en pourceau d’Epicure, en vrai Sardanapale »
- SGANARELLE : « je (…) connais votre cœur pour le plus grand coureur du monde, il se plaît à se promener de liens en liens, et n’aime guère à demeurer en place »
- SGANARELLE : « je trouve fort vilain d’aimer de tous côtés comme vous faites. »
- DOM JUAN. « Quoi ? tu veux qu’on se lie à demeurer au premier objet qui nous prend, qu’on renonce au monde pour lui, et qu’on n’ait plus d’yeux pour personne ? La belle chose de vouloir se piquer d’un faux honneur d’être fidèle, de s’ensevelir pour toujours dans une passion, et d’être mort dès sa jeunesse, à toutes les autres beautés qui nous peuvent frapper les yeux : non, non, la constance n’est bonne que pour des ridicules, toutes les belles ont droit de nous charmer, et l’avantage d’être rencontrée la première, ne doit point dérober aux autres les justes prétentions qu’elles ont toutes sur nos cœurs. Pour moi, la beauté me ravit partout, où je la trouve ; et je cède facilement à cette douce violence, dont elle nous entraîne ; j’ai beau être engagé, l’amour que j’ai pour une belle, n’engage point mon âme à faire injustice aux autres ; je conserve des yeux pour voir le mérite de toutes, et rends à chacune les hommages, et les tributs où la nature nous oblige. Quoi qu’il en soit, je ne puis refuser mon cœur à tout ce que je vois d’aimable, et dès qu’un beau visage me le demande, si j’en avais dix mille, je les donnerais tous. Les inclinations naissantes après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l’amour est dans le changement. On goûte une douceur extrême à réduire par cent hommages le cœur d’une jeune beauté, à voir de jour en jour les petits progrès qu’on y fait ; à combattre par des transports, par des larmes, et des soupirs, l’innocente pudeur d’une âme, qui a peine à rendre les armes, à forcer pied à pied toutes les petites résistances qu’elle nous oppose, à vaincre les scrupules, dont elle se fait un honneur, et la mener doucement, où nous avons envie de la faire venir. Mais lorsqu’on en est maître une fois, il n’y a plus rien à dire, ni rien à souhaiter, tout le beau de la passion est fini, et nous nous endormons dans la tranquillité d’un tel amour ; si quelque objet nouveau ne vient réveiller nos désirs, et présenter à notre cœur les charmes attrayants d’une conquête à faire. Enfin, il n’est rien de si doux, que de triompher de la résistance d’une belle personne ; et j’ai sur ce sujet l’ambition des conquérants, qui volent perpétuellement de victoire en victoire, et ne peuvent se résoudre à borner leurs souhaits. Il n’est rien qui puisse arrêter l’impétuosité de mes désirs, je me sens un cœur à aimer toute la terre ; et comme Alexandre, je souhaiterais qu’il y eût d’autres mondes, pour y pouvoir étendre mes conquêtes amoureuses. »
- DOM JUAN : « songeons seulement à ce qui nous peut donner du plaisir »
Un athée et un libre-penseur
Pour jouir pleinement des plaisirs de la vie, Dom Juan rejette en bloc tout ce qui relève des convenances, des contraintes et des règles sociales, morales et religieuses.
Cynique, provocateur, Dom Juan défie la morale, le divin et la religion. Il se heurte d’ailleurs directement au sacré à plusieurs reprises au cours de la pièce, via les personnages du pauvre, d’une religieuse ou de la statue du commandeur.
C’est d’ailleurs un des traits fascinants du personnage (et probablement l’un des seuls relativement positifs, surtout à nos yeux d’hommes et de femmes du XXIe siècle – ou à ceux de Molière et des gens « éclairés » de son époque). De fait, Dom Juan fascine par la révolte qu’il incarne, sa liberté de pensée et le défi qu’il lance à l’autorité divine et à l’ordre social. Par là même, il se rattache d’ailleurs aux figures de Faust et de Prométhée, qui défient les dieux et la condition mortelle de l’homme.
C’est d’ailleurs ce qui rend sa figure si ambivalente et aura valu des réactions aussi contrastées de la part tant du public que de la critique : Dom Juan refuse de se soumettre aux codes de la société et de la religion ; on le découvre courageux, téméraire, et capable d’incarner la révolte d’un homme qui lance un défi aux institutions (pourtant ô combien puissantes !) sociales, politiques et religieuses de son temps.
→ Quelques citations… on ne peut plus parlantes :
- DOM JUAN : « Je crois que deux et deux sont quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre sont huit.
- SGANARELLE : « tu vois en Dom Juan, mon maître, le plus grand scélérat que la terre ait jamais porté, un enragé, un chien, un diable, un Turc, un hérétique, qui ne croit ni Ciel, ni Enfer, ni loup-garou, (…) qui ferme l’oreille à toutes les remontrances qu’on lui peut faire, et traite de billevesées tout ce que nous croyons. »
L’égoïste fini
Face moins glorieuse du personnage : son égoïsme. De fait, son goût des plaisirs et son refus catégorique des limites et des convenances (Dom Juan refuse de voir son bon plaisir bridé d’une façon ou d’une autre) conduisent notre « héros » à ignorer sciemment les besoins d’autrui et à écraser tout obstacle sur son passage (enfin, sur celui de sa jouissance).
Cela fait de lui un personnage à la fois amoral/immoral, monstrueusement égoïste et destructeur pour son entourage. Un « scélérat », tout bonnement, comme le dit son valet lui-même.
Un beau parleur
Un des points forts de Dom Juan (que ce soit pour séduire les femmes ou se débarrasser des importuns – son père, ses créanciers, ses beaux-frères…), c’est sa maîtrise de l’art oratoire. Eloquent, Dom Juan n’a pas son pareil pour se tirer d’une situation fâcheuse d’une pirouette ou rabattre leur caquet aux « indésirables ». Il se sort ainsi de nombreux problèmes grâce à sa maîtrise du langage et à sa puissance argumentative : il est capable de faire l’éloge des pires défauts, assume parfaitement ses opinions, les clame haut et fort, manipule, raille les autres et domine la majorité des dialogues. La plupart des autres personnages se retrouvent souvent incapables d’être à la hauteur et de lui tenir tête.
Croisant cette « qualité » avec plusieurs autres caractéristiques du personnage, la psychologie d’aujourd’hui verrait là une caractéristique typique… d’un pervers narcissique. 😉
Un nouveau Tartuffe
De fait, au fil de la pièce, Dom Juan s’avère à la fois fourbe, menteur, manipulateur, calculateur, faux et hypocrite.
Autant de nouvelles caractéristiques là encore… d’un pervers narcissique, cela va sans dire.
Car pour arriver à ses fins, notre « héros » n’hésite pas à tromper ses interlocuteurs (et surtout ses interlocutrices), à manipuler, à mentir, à promettre et renier ses promesses à tout-va…
→ Quelques citations… on ne peut plus parlantes :
- SGANARELLE : « Mon maître est un fourbe ; il n’a dessein que de vous abuser, et en a abusé d’autres »
- DOM JUAN : « Le personnage d’homme de bien est le meilleur de tous les personnages qu’on puisse jouer aujourd’hui, et la profession d’hypocrite a de merveilleux avantages. C’est un art de qui l’imposture est toujours respectée, et quoiqu’on la découvre, on n’ose rien dire contre elle. Tous les autres vices des hommes sont exposés à la censure, et chacun a la liberté de les attaquer hautement, mais l’hypocrisie est un vice privilégié, qui de sa main ferme la bouche à tout le monde, et jouit en repos d’une impunité souveraine. On lie à force de grimaces une société étroite avec tous les gens du parti ; qui en choque un, se les jette tous sur les bras, et ceux que l’on sait même agir de bonne foi là-dessus, et que chacun connaît pour être véritablement touchés : ceux-là, dis-je, sont toujours les dupes des autres, ils donnent hautement dans le panneau des grimaciers, et appuient aveuglément les singes de leurs actions. Combien crois-tu que j’en connaisse, qui par ce stratagème ont rhabillé adroitement les désordres de leur jeunesse, qui se sont fait un bouclier du manteau de la religion, et, sous cet habit respecté, ont la permission d’être les plus méchants hommes du monde ? On a beau savoir leurs intrigues, et les connaître pour ce qu’ils sont, ils ne laissent pas pour cela d’être en crédit parmi les gens, et quelque baissement de tête, un soupir mortifié, et deux roulements d’yeux rajustent dans le monde tout ce qu’ils peuvent faire. C’est sous cet abri favorable que je veux me sauver, et mettre en sûreté mes affaires. Je ne quitterai point mes douces habitudes, mais j’aurai soin de me cacher, et me divertirai à petit bruit. Que si je viens à être découvert, je verrai sans me remuer prendre mes intérêts à toute la cabale, et je serai défendu par elle envers, et contre tous. Enfin, c’est là le vrai moyen de faire impunément tout ce que je voudrai. Je m’érigerai en censeur des actions d’autrui, jugerai mal de tout le monde, et n’aurai bonne opinion que de moi. Dès qu’une fois on m’aura choqué tant soit peu, je ne pardonnerai jamais, et garderai tout doucement une haine irréconciliable. Je ferai le vengeur des intérêts du Ciel, et sous ce prétexte commode, je pousserai mes ennemis, je les accuserai d’impiété, et saurai déchaîner contre eux des zélés indiscrets, qui sans connaissance de cause crieront en public contre eux, qui les accableront d’injures, et les damneront hautement de leur autorité privée. C’est ainsi qu’il faut profiter des faiblesses des hommes, et qu’un sage esprit s’accommode aux vices de son siècle. »
Un grand seigneur tyrannique
Dom Juan est un homme issu de la noblesse, même s’il n’a de noble que le nom. Grand seigneur, il n’hésite pas à abuser de son pouvoir pour mieux tyranniser et terroriser son entourage, et pour obtenir ce qu’il veut.
D’ailleurs, il n’hésite pas à user de la force, tout court : il bat Sganarelle, le pauvre Pierrot, et ne nourrit aucun scrupule à l’idée de forcer une femme qui se montrerait trop peu coopérative à son goût.
Un personnage… déroutant
Mais Dom Juan est également capable de se montrer courageux, altruiste (comme lorsqu’il vient au secours de Don Carlos) ou généreux et magnanime (comme lorsqu’il donne de l’argent au pauvre dans la forêt, quand bien même celui-ci n’a pas cédé à ses caprices).
Autant de caractéristiques contribuant à construire toute l’ambiguïté du personnage
Conclusion : Dom Juan, un anti-héros ?
Renié par son père, poursuivi par certaines de ses victimes, mis en garde à de multiples reprises, puni par Dieu, Dom Juan a à la fois quelque chose du héros baroque, du héros tragique, du héros de comédie… et de l’anti-héros pur et dur. Tour à tour fourbe, héroïque, cruel, sarcastique, brillant, impénitent, il déroute ses divers interlocuteurs… et jusqu’au public même.
Les opposants de Dom Juan
A ce titre, Don Juan s’opposera à un certain nombre de personnages incarnant :
- la vertu, l’âme sauveuse, la dignité, la souffrance et l’amour sincère (Elvire, à la fois héroïne tragique et – peut-être – messager céleste ; elle le supplie, pour son propre bien, de réformer sa conduite)
- la vertu et la noblesse d’âme et de cœur (son propre père, Dom Louis, qui vient lui faire des reproches et tente de réformer sa conduite)
- l’honneur et la vertu du sang noble (Don Carlos et Don Alonse, les frères de Done Elvire, qui viennent lui demander réparation pour le déshonneur de leur sœur)
- l’amoureux transi, maladroit, sincère, incompris et trompé (le paysan Pierrot, à qui Don Juan rafle sa fiancée)
- la foi inébranlable, la dignité et la vertu (le pauvre)
Le cas de Sganarelle
Mais l’opposant principal de Don Juan, dans la pièce de Molière, reste sans aucun doute possible son valet Sganarelle, qui le flanque dans la quasi-intégralité de la pièce et permet à Molière de jouer, peut-être plus allègrement ici que dans aucune autre pièce, sur le thème de l’opposition maître-valet (fort répandue dans le théâtre classique).
De par sa position (inférieure et totalement dépendante de son maître), Sganarelle se voit en réalité contraint de jouer à la fois les adjuvants et les opposants :
- en tant que valet, il doit servir les intérêts de son maître, s’exécuter face à ses ordres, faciliter ses fuites, jouer les rôles qu’on exige de lui (d’autant qu’il incarne la lâcheté et la gloutonnerie/cupidité tout autant que le reste… et qu’il ne peut s’empêcher, quelque part, d’admirer secrètement son maître)
- mais, en tant que principal porte-parole de la morale moliéresque, il s’oppose régulièrement à lui en tentant de le raisonner.
Principal personnage comique de la pièce, un peu ridicule, un peu bouffon, parfois niais, assez naïf, un tantinet prétentieux, un peu superstitieux aussi, à la fois goinfre et cupide (ce qui le pousse à demeurer au service de Dom Juan), Sganarelle ne cesse d’osciller entre ces deux positions.
Son nom même, qui vient de l’italien sgannare (qui signifie « dessiller », « ouvrir les yeux »), est ambigu, pouvant tout aussi bien renvoyer à sa « clairvoyance » (via ses discours moralisateurs) ou, a contrario, à son ignorance (il est crédule, pieux, superstitieux, mélange foi chrétienne et loups-garous dans les mêmes raisonnements…).
Ses relations avec son maître sont donc ambiguës : porte-parole de la morale, il ne cesse d’avertir Dom Juan que sa conduite entraînera son châtiment, le critique très sévèrement (plutôt dans son dos) et montre sa désapprobation totale envers la conduite immorale et impie de son maître ; mais dès que Dom Juan apparaît ou fait signe de mécontentement, il se rétracte…
Si l’on ajoute à cela que Sganarelle n’est qu’un bouffon cupide et goinfre, somme toute aussi peu soucieux que son maître de la morale à bien des moments, il n’est guère étonnant que certaines aient vu à travers lui un moyen pour Molière de fustiger les hypocrites et les dévots aussi odieux que ridicules… dont il faisait déjà son dessert dans Tartuffe !
Sganarelle sert donc de contrepied et d’opposant à Dom Juan à de nombreuses reprises… pour, finalement, basculer régulièrement dans le rôle de l’adjuvant, voire du confident, presque d’un égal, capable d’écouter, de conseiller, voire de sermonner son maître !
De fait, le maître et le valet ont en réalité intimement besoin l’un de l’autre, si bien que les différences sociales semblent parfois s’estomper afin que des rapports d’égal à égal prennent la relève, au point que Sganarelle se risque parfois à faire des remontrances à Dom Juan, à débattre avec lui… Il partage son repas, disserte avec lui, partage ses aventures, dans une sorte, parfois, de camaraderie, où se mêlent la crainte, la haine, l’amour, la fascination, la répulsion, l’admiration et des intérêts communs… jusqu’au moment où Sganarelle se voit brutalement rappeler, chaque fois, d’une façon ou d’une autre, sa condition inférieure.
Conclusion
Don Juan, héros légendaire de nombreuses œuvres de tous types et de tous styles, demeure probablement l’archétype du libertin jouisseur et impie, du séducteur invétéré et du noceur le plus célèbre du monde. Si la légende d’origine de Don Juan remonte au Moyen Âge (faisant de ce mythe un mythe moderne, à l’inverse de la plupart des grands mythes de la littérature, qui remontent à l’Antiquité), les détails de son histoire et de sa personnalité furent ensuite modifiés par de nombreux auteurs et artistes à partir du XVIIe siècle. Un mythe qui traversera tous les siècles et tous les genres (de la poésie au roman, en passant par l’opéra, le conte, le théâtre et le cinéma), mais aussi de nombreuses frontières européennes…
Texte: © Aurélie Depraz
Illustration article : Tableau de Jean-Honoré Fragonard — The Yorck Project (2002) 10.000 Meisterwerke der Malerei (DVD-ROM), distributed by DIRECTMEDIA Publishing GmbH. ISBN : 3936122202., Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=151002
Source image : https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Verrou_(Fragonard)#/media/Fichier:Jean-Honor%C3%A9_Fragonard_009.jpg
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