Petite Histoire de l’Angleterre… suite et fin !
Pour lire les trois premiers volets de cette synthèse, c’est :
- ici : le premier article, “Des Romains aux Vikings”.)
- ici : le deuxième article, “De la conquête de l’Angleterre par Guillaume de Normandie à la fin de l’Angleterre “française”(XIe-XVe s.)
- et ici, le troisième volet, « La période moderne : les Tudors, les Stuarts, les Hanovre et l’ère géorgienne »
IV – L’Angleterre de l’ère contemporaine
La Révolution industrielle
C’est bien connu : c’est en Angleterre que la Révolution Industrielle a vu le jour, quelque 20 à 30 ans avant qu’elle ne démarre aussi sur le continent.
Comme sur le continent, la période sera marquée par l’apparition et l’extension fulgurante du chemin de fer, de nombreuses innovations technologiques, industrielles et scientifiques, la recherche, les études, les grandes inventions, l’utilisation de la monnaie-papier, les progrès du génie civil…
Pour plus de détails, voir mon article sur la Première Révolution industrielle (dans son ensemble, pas seulement « anglaise »…)
Le XIXe : autres aspects
Sur le plan social :
- le chartisme, de 1838 à 1848, mobilise des millions de personnes pour obtenir le suffrage universel. Rappelons aussi le long combat mené par les Suffragettes, qui finiront par obtenir le droit de vote pour les femmes au début du XXe s., bien avant les Françaises…
- Comme en France, le syndicalisme prend forme dans les années 1860 et prend peu à peu de l’ampleur.
Sur le plan monarchique :
- Nous sommes toujours avec la dynastie des Hanovre (depuis leur mise en place sur le trône britannique à la place des Stuarts). L’ère géorgienne (Georges I, II, III, IV puis Guillaume IV) couvre tout le XVIIIe et le début du XIXe s.
- Victoria devient ensuite reine en 1837. Son long règne (1837-1901) voit le Royaume-Uni à son apogée en termes de puissance économique et politique. Elle sera néanmoins détrônée en tant que reine ayant eu le plus long règne par Elisabeth II (67 ans de règne à ce jour, 63 pour Victoria). A noter : deux séries en vogue à l’écran en ce moment : « Victoria » (sur Victoria, évidemment) et « The Crown » (sur Elisabeth II)… C’est la mode !
- Le coup fatal porté à la monarchie a lieu sous le règne de Victoria : avec l’apparition des partis politiques, puissants, l’espace de manœuvre du monarque se réduit encore. La reine finit par être totalement écartée du jeu politique, et la monarchie devient purement représentative, cérémonielle et traditionnelle, ce qu’elle est toujours. Elle dispose en réalité encore de quelques pouvoirs théoriques considérés comme une arme de sauvegarde en cas de décision anticonstitutionnelle prise par le Parlement ou le gouvernement, par exemple, mais ne règne plus de façon exécutive.
A noter : le cadre de la Régence assurée par le futur Georges IV (qui assura la Régence de 1811 à son accession au trône en 1820, pour son père Georges III qui souffrait de maladie mentale) est un cadre très, très prisé de la romance historique… Et, globalement, c’est la société anglaise de la première moitié du XIXe s. (et de la fin du XVIIIe) qui est dépeinte par Jane Austen dans ses romans, qui inspirèrent les premières auteures de romances historiques !
Pour découvrir Alexander, le premier tome de ma série « Passions Londoniennes », qui se déroule au temps de la Régence, c’est par ici !
L’indépendance de l’Irlande
Une République d’Irlande s’autoproclame à Dublin en 1916. S’ensuit (forcément) une guerre anglo-irlandaise opposant les forces de la couronne et l’Armée républicaine irlandaise (IRA) de 1919 à 1921. L’Irlande subit une période de cruelle répression (épisode du Bloody Sunday, par exemple…) mais, finalement, le traité anglo-irlandais de 1921 établit l’Etat libre d’Irlande qui quitte le Commonwealth et se sépare de l’Irlande du Nord, qui pour sa part demeure une partie du Royaume-Uni (6 comtés majoritairement protestants du nord de l’Irlande ont choisi de rester dans le RU). Depuis 1927, le nom officiel de ce dernier est donc « Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ».
La première guerre mondiale
Bon, inutile (je pense) de rappeler les raisons, tenants et aboutissants de la Première Guerre Mondiale (largement étudiée au collège et au lycée, pour le coup !). Sans compter que cela appellerait (comme tant d’autres passages de l’Histoire de l’Angleterre, nous sommes bien d’accord), un article complet, voire plusieurs !
Simple petit rappel : le Royaume-Uni entre dans la Guerre aux côtés de la France et de la Russie, au sein de ce qu’on appelle la Triple-Entente (l’Angleterre s’était ENFIN réconciliée avec la France, après des SIECLES de conflits). L’ennemi commun est alors tout autre : c’est l’Allemagne, qui fait partie de l’Axe réunissant Empire allemand, Autriche-Hongrie et Empire Ottoman.
Les grandes puissances en jeu mobilisent leurs empires respectifs comprenant des colonies sur tous les continents, Afrique, Asie, Amérique, Océanie, ce qui vaut à la guerre son qualificatif de « mondiale ». Toutes les forces économiques, humaines, matérielles et militaires des colonies comme des métropoles sont mobilisées. Les colonies auront donc beaucoup souffert de la guerre et des centaines de milliers de soldats seront venus du bout du monde se battre en Europe.
Très vite, on passe d’une guerre de mouvement à une guerre de tranchées.
Le Royaume-Uni, lui, avec sa Royal Navy, défie l’Allemand sur les mers :
- Au début de la guerre, la flotte britannique inflige une série de défaites aux bâtiments de surface de la marine impériale allemande
- puis ferme l’accès à la mer du Nord depuis la Baltique pour isoler l’Allemagne et l’empêcher de se réapprovisionner par la mer : blocus, interruption du ravitaillement d’outre-mer, disette en Allemagne… La stratégie navale de l’Allemagne se tourne donc exclusivement vers l’emploi des U-boot (sous-marins) pour tenter de faire plier les Britanniques, au risque de frapper des navires neutres : « le Haut commandement allemand proclame « zone de guerre » les eaux territoriales britanniques ce qui signifie que tout navire y pénétrant devient une cible légitime » (wikipedia)
- Enfin, elle affronte la marine impériale allemande (Hochseeflotte) lors de la seule grande bataille navale de la guerre, la Bataille du Jutland en 1916, qui en 36 heures fait 8500 morts (musée dédié à cette bataille sur les dockyards de Portsmouth : visité l’an dernier : passionnant !)
Par ailleurs, outre-mer, les Britanniques, les Français, les Australiens et les Japonais s’emparent des colonies allemandes. C’est le début du démantèlement de l’Empire allemand, qui sera consacré par le catastrophique « diktat » de Versailles à la fin de la guerre (et sera en partie à l’origine de la 2e guerre mondiale).
Le Royaume-Uni croit alors venu le moment d’abattre l’Empire Ottoman (est-Méditerranée), mais il essuie une série de défaites lors de la bataille des Dardanelles, où meurent notamment de nombreux Australiens, puis au Moyen-Orient.
Finalement, la guerre est gagnée notamment grâce à l’arrivée salvatrice des USA dans la guerre en avril 1917.
La fin de l’empire britannique et la création du Commonwealth
Bien que ruiné par la Première Guerre Mondiale, l’Empire britannique atteint son extension maximale après le fameux Traité de Versailles en 1919 (par lequel le RU acquiert un territoire grand de 4 700 000 km2) : les colonies des perdants sont effectivement réparties entre les grands vainqueurs de la guerre.
L’Empire Britannique est alors le plus grand espace colonial du monde : il couvre 22% des terres émergées et comprend un quart de la population mondiale, soit environ 400 millions d’habitants !
Cependant, l’Empire a déjà commencé à perdre une partie de ses anciennes possessions, dont la plupart restent néanmoins liées à la couronne d’Angleterre et à la mère patrie d’origine via le système du Commonwealth : entre 1867 et 1910 en effet, l’Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande reçoivent les premiers le statut de dominion (une indépendance au sein de l’Empire). Ils deviennent des membres fondateurs du Commonwealth britannique, une organisation informelle qui réunis les anciennes colonies britanniques.
Mais le mouvement est lancé et, à l’instar de la France, le RU perdra, tout au long du XXe siècle, ses colonies (phénomène décuplé par la Seconde Guerre Mondiale et la faiblesse dont les grandes métropoles ont fait preuve face au rouleau-compresseur nazi).
Peu à peu, décennie après décennie, et pendant que la France perd le Maghreb, l’Indochine et ses territoires d’Afrique de l’Ouest, l’Angleterre perd aussi, un à un, les fleurons de son empire colonial (dont certains très anciens). En vrac : l’Inde, le Sri Lanka (Ceylan) et le Pakistan, la Birmanie, Hong Kong, Singapour, Malacca, toutes ses possessions en Afrique et au Moyen-Orient (y compris celles raflées à l’Allemagne pendant la Ière Guerre Mondiale, Togo, Tanganyika, Cameroun, Palestine, Iran), Tanzanie, l’Egypte… Elles étaient innombrables (des dizaines).
Aperçu complet : http://drapeaufree.free.fr/COLONIESUK/coloniesuk.htm
Carte : http://www.cosmovisions.com/atlasVL108.htm
Aujourd’hui, la plupart des anciennes colonies britanniques font partie du Commonwealth, pratiquement toutes en tant que membre indépendant. Restent cependant treize colonies britanniques anciennes — dont les Bermudes, Gibraltar et les îles Malouines — qui décident de garder leur lien politique avec le RU : ce sont les territoires britanniques d’outre-mer, tout comme nous avons gardé nos DOM-TOM.
À noter que l’Irlande, les USA et les anciennes colonies et protectorats du Moyen-Orient ne font pas partie du Commonwealth : ils se sont totalement affranchis de Londres.
A noter : les 52 états membres du Commonwealth représentent, aujourd’hui encore… pas moins de 30% de la population mondiale, et ils reconnaissent la reine d’Angleterre comme souveraine symbolique !
A lire aussi pour plus de détails : ma Petite Histoire de l’Empire britannique
La Deuxième Guerre Mondiale
Point besoin là encore d’en dire beaucoup sur les grandes lignes de la guerre, nous les connaissons et étudions à moult reprises à l’école. Soulignons toutefois la partie qu’a jouée l’Angleterre et qui, je trouve, a tendance à être légèrement « sous-estimée » dans notre système éducatif français, au profit des Américains (et, dans une moindre mesure, de l’URSS), notamment via la terrible « Bataille d’Angleterre » vaillamment livrée par Winston Churchill. L’Angleterre ne fut ni envahie ni occupée par les Nazis, mais elle fut bombardée sans pitié par la Luftwaffe ; des dizaines de villes furent anéanties et les pertes civiles furent douloureuses. Elle se solda néanmoins par un échec pour l’Allemagne (le Royaume-Uni de Churchill tint bon) et, en ce qu’elle mit un terme à la série de victoires-éclairs éclatantes des Allemands en 39 et 40, elle fut décisive dans l’issue de la 2e Guerre Mondiale, avant même l’intervention des USA, en forçant l’Allemagne à se battre aussi bien à l’ouest qu’à l’est (URSS).
Détails ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_d%27Angleterre
C’est aussi évidemment depuis l’Angleterre et ses ports du sud que tout le débarquement de Normandie fut préparé et que tous les hommes (Américains compris) partirent pour libérer la France. C’est aussi de là qu’une partie de la Résistance française, avec De Gaulle, s’organisa.
Sorti vainqueur mais très affaibli à l’issue de la Seconde Guerre Mondiale, le Royaume-Uni, autrefois première puissance mondiale, ne peut que constater la suprématie des deux nouvelles superpuissances qui occupent désormais le devant de la scène : l’URSS et les USA. Son Empire entre en déclin, il perd perd peu à peu ses colonies (voir paragraphe ci-dessus…) et le RU, pour pouvoir rivaliser avec les deux nouvelles superpuissances, va devoir se rapprocher, quoique à reculons… de la toute nouvelle UE (euh… OK, pour en ressortir à peine quelques décennies plus tard… …)
Le Royaume-Uni et l’UE
Le pays n’intègre la Communauté Economique Européenne qu’en 1973 ! Loin d’être un état fondateur de ce qui deviendra l’UE, le Royaume-Uni a mis beaucoup de temps à la rejoindre… et ne s’y intégrera jamais totalement. Le Royaume d’outre-Manche n’aura de cesse de négocier des clauses exceptionnelles, de s’aménager des marges de manœuvre, il refusera la monnaie unique… Le RU, à l’inverse de la France et de l’Allemagne, n’a jamais été à « 100% » pour et dans l’UE : quand il signe le Traité de Maastricht, ce n’est pas sans réserve… et ce n’est pas sans appréhension que nos voisins d’outre-Manche voient le tunnel sous la Manche être creusé en 1994…
Par ailleurs, militairement, le RU, qui reste « le cul entre deux chaises », s’aligne souvent sur les USA : il soutient la guerre du Viet Nam, la guerre d’Irak, la guerre d’Afghanistan… Le RU fait partie de l’UE mais regarde bien plus souvent du côté de son voisin (et ancienne colonie, à la fois grand et petit frère) outre-Atlantique que du côté du reste de l’UE…
Est-on, dès lors, vraiment surpris qu’en 2016, le Royaume-Uni se prononce pour une sortie de l’Union européenne à 51,89 % ? C’est le fameux Brexit, qui met un terme à 40 ans de « vie commune »…
Côté grands hommes politiques, bien sûr, le XXe siècle est marqué par Lloyd George pendant la Première Guerre Mondiale, Churchill pendant la 2e, puis Margaret Thatcher et Tony Blair.
Quelques vestiges des tensions ancestrales avec l’Ecosse et l’Irlande…
Certains problèmes, certains traumatismes, certaines douleurs sont-ils voués à ne jamais disparaître ? Entre amour et haine, les rapports entre l’Angleterre et l’Ecosse ainsi qu’entre Angleterre et Irlande donnent toujours lieu, à la fin du XXe et au début du XXIe, à des « soubresauts » passionnés et indépendantistes…
Avec l’Ecosse :
Tout est dit (et bien dit) sur wiki : je tire ma flemme :
« Le 18 septembre 2014, un référendum sur l’indépendance de l’Ecosse se tient à l’initiative de Cameron. Celui-ci est réélu contre Ed Miliband, le leader travailliste, en mai 2015. »
« À l’issue de la nuit de dépouillement, la victoire du « non » est annoncée le 19 septembre au matin : il obtient 55,3 % des suffrages exprimés contre 44,7 % pour le oui. Si le vote avait été favorable, l’indépendance aurait été proclamée le 24 mars 2016, soit 413 ans jour pour jour après la mort d’Elisabeht Ire d’Angleterre et l’accession au trône d’Angleterre de Jacques VI, roi d’Ecosse, qui scella alors l’Union des couronnes d’Angleterre et d’Écosse. » (wikipedia) : belle symbolique !
Avec l’Irlande
Le Royaume-Uni doit, durant la seconde moitié du XXe s., affronter l’Armée républicaine irlandaise provisoire, une organisation paramilitaire qui, de 1969 à 1997, milite, à coups notamment d’attentats, pour l’indépendance complète de l’Irlande du Nord vis-à-vis de la monarchie du Royaume-Uni, et l’instauration d’un État républicain libre et souverain sur l’ensemble de l’île d’Irlande qui serait l’Éire Nua, ou « Nouvelle Irlande ». Un peu comme nos Basques ou nos Corses…
Ce conflit manqua de se transformer en une véritable guerre civile à plusieurs occasions jusqu’en 1998.
Petite conclu
Bref, il n’est pas dit que l’Angleterre en ait fini avec les déchirements séculaires l’opposant à l’Ecosse et à l’Irlande… D’autant que le Brexit est loin d’avoir plu aux Ecossais, notamment, qui aimeraient bien, pour leur part, rester au sein de l’UE…
Seul le Pays de Galles semble ne plus causer de problèmes depuis des siècles et rester sagement dans le giron de Mother England…^^
A retrouver aussi sur ce blog :
Pour découvrir ceux de mes romans qui abordent l’Histoire de l’Angleterre (ils sont tous sur Amazon) :
- L’amour, la mer, le fer et le sang
- Pour l’amour d’une Sasunnach
- Alexander, 1er tome de la série “Passions Londoniennes”
- Jay, le deuxième tome de « Passions Londoniennes”
- James, le troisième tome
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Texte : (c) Aurélie Depraz
Illustration : Pixabay