En novembre 2016, j’assistais à un séminaire de développement personnel (parmi tant d’autres) : j’étais alors dans une phase d’intense introspection et je butinais partout où cela était possible : pendant des années, j’ai fait des stages de PNL, de neurosémantique, d’Analyse Transactionnelle, de naturopathie, sur la Spirale dynamique ou encore l’Ennéagramme ; j’ai suivi des formations de philosophie adaptée au coaching, assisté à des conférences sur la bienveillance, la mediumnité, le bien-être, la Loi de l’Attraction, suivi des séminaires de chamanes, de psychothérapeutes, de coachs, de mediums… J’ai lu des dizaines d’ouvrages sur toutes sortes de thématiques, fait du kundalinyi yoga, consulté des masseurs énergétiques, des médecins chinois, des sophrologues… Bref.
Pour l’heure, il s’agissait du 2e module d’un séminaire d’inspiration jungienne animée par un psychothérapeute spécialisé dans l’analyse des rêves et des dessins, les concepts de persona, d’anima, d’animus, d’ombre et d’enfant intérieur…
Une journée extrêmement enrichissante, faite d’exercices, de tableaux, de méditations et de partages.
A la fin de la journée, une méditation guidée. Chacun de nous, allongé sur un tapis de yoga, se laissait guider par la voix et les instructions de la co-animatrice. Je ne me souviens plus des détails de la scène à visualiser, mais on finissait par descendre dans une grotte, – notre grotte –, derrière une cascade où nous attendait un coffre contenant un cadeau. Un cadeau unique, spécifique, un objet rien que pour nous. Il fallait ouvrir ce coffre, découvrir ce cadeau et l’accueillir sans le juger.
Puis lentement revenir à la surface, à un niveau de conscience standard, se « réveiller » et dessiner ce qu’on avait obtenu.
Voici ce que j’avais dessiné : une belle plume blanche tachée de noir. Une plume comme j’en voyais dans une de mes BD préférées, Yakari, quand j’étais enfant (donc un peu une plume d’Indien – j’ai toujours adoré les Amérindiens).
L’écriture avait toujours fait partie de ma vie (recherches, synthèses, poèmes, ébauches de deux romans, historique de telle activité qui me plaisait à tel moment de ma vie, cours pour mes élèves et stagiaires de français ou de philo… mais rien qui ne ressemblât à un futur de romancière) mais j’étais à des années-lumières de m’imaginer écrivain de quoi que ce soit.
Je savais que les diverses activités pros et semi-pros que je menais de front ne correspondaient pas à ma vocation profonde. Que, par bien des aspects, elles me plaisaient, que j’y étais douée, pourquoi pas, mais que ce n’était pas ce que j’étais amenée à faire de ma vie. Elles ne me faisaient pas vibrer. Je n’y trouvais pas de sens profond. C’était… parfois utile, souvent intéressant (sinon je n’aurais pas pu les poursuivre), parfois excitant… mais rien de transcendant, et rien qui ne fasse vibrer cette corde au fond de moi, cette corde de la passion, de l’amour, de la pleine cohérence de soi avec soi, de l’intense jouissance d’avoir trouvé sa mission sur Terre, sa vocation, son fil conducteur, appelez ça comme vous voulez 🙂
Depuis des années, je me cherchais. Petite, puis adolescente, puis jeune adulte, je n’avais jamais été capable de me faire une idée précise de ce que je voulais faire de ma vie : à 12, 20, 26 ans, je me cherchais encore. Tantôt, je voulais être prof d’Histoire ; tantôt, décoratrice intérieure ; tantôt, coach de vie ; tantôt, anthropologue ; tantôt, sophrologue ; tantôt, psy ; tantôt, prof de langues. Prof de danses latines. Animatrice de conférences sur le développement durable. Prof de FLE. Et que sais-je d’autre encore ! Mais rien ne me parlait longtemps, rien ne résonnait si fort au fond de moi que je me disais : c’est pour ÇA que je suis faite.
J’étais passionnée d’Histoire, mais je ne me voyais pas écrire de thèse sur tel sujet, faire un Master impliquant de passer obligatoirement par la case « Les Députés girondins de 1940 à 1946 via les archives en micro-films » (du vécu en licence…) ni tenir des classes de collège ou de lycée ; j’adorais le développement personnel et la psychologie, mais avais-je vraiment envie, moi, l’éponge émotionnelle, d’écouter et de traiter à longueur de journée les problèmes des autres ? Ne me viderais-je pas totalement de mon énergie à force de la prodiguer à autrui avec passion ? J’étais très engagée dans ma vie quotidienne et dans mes recherches en matière de développement durable et d’écologie. Mais je ne suis ni fan de sciences et de labos ni fan d’engagements politiques type ONG, et je ne voyais pas trop comment faire de cette cause-ci, pourtant ancrée en moi, un moyen de subsistance sans être fondalement « utile » dans ce domaine. J’étais amoureuse de la photographie depuis mon premier appareil, à 8 ou 10 ans, mais ne me voyais pas fondamentalement en faire ma vie (je me serais fort probablement lassée bien vite de photographier des immeubles, des objets ou des mariés sur commande).
Bref. J’étais passionnée de très, très nombreuses choses, et incapable de me décider pour l’une d’elles et de me dire que c’était ça qui me transporterait pour de très nombreuses années – peut-être toute ma vie. Et pourtant, j’étais convaincue qu’il y avait quelque chose pour moi. Mais ni tout à fait l’enseignement, ni tout à fait l’Histoire pure et dure, ni tout à fait l’écologie, ni tout à fait la psycho, ni tout à fait la socio, ni tout à fait l’éco-citoyenneté… Ou, en tout cas, jamais exclusivement.
Ces 3 années d’intenses « développement et quête » personnels (je ne compte pas les années de psychothérapie préalables qui n’ont pas du tout porté sur la même chose) visaient bien sûr un mieux-être, le recouvrement d’un équilibre global, l’introspection, le « kif » intellectuel, une augmentation de mon intelligence émotionnelle, mais aussi et surtout, plus ou moins consciemment, la découverte de ma « voie » professionnelle, de cette voie qui me permettrait de m’épanouir profondément et de sentir que je faisais ce pour quoi j’étais faite.
Mais j’avais beau creuser et mettre cette quête (de même que la résolution de certains conflits internes et problèmes relationnels) au coeur de mes exercices conscients au cours de ces divers stages, j’avais beau tourner autour du pot, rien de très clair ne se se faisait jamais jour en moi quant à cette fameuse « vocation ».
Mais il y a eu cette plume. Plus tard, d’autres indices, d’autres clins d’oeil, d’autres découvertes (voir par exemple mon article « In my essence… I am… ») Peu à peu, les jalons se sont posés, les pierres de l’édifice assemblées. Jusqu’à ce déclic final, qui n’a eu lieu ni au cours d’un stage de développement personnel ni d’une séance de psycho ou de coaching privé, mais au coeur même de l’objet qui devait devenir ma vie : un roman (voir mon article « Quand les hasards de l’existence… font merveilleusement bien les choses »
Mais ce déclic final, cet électrochoc, je n’ai pu l’avoir que parce que j’avais longuement balisé le terrain et que je m’étais, mois après mois, minutieusement, consciencieusement, reconnectée à moi-même au fil de ces années d’introspection, et reconnectée à mon essence, à mon être réel, que j’avais parfois perdu de vue au détour des méandres et des aléas de la vie.
Et ce n’est ni un thérapeute, ni un médium, ni un livre de développement personnel qui a fini de m’ouvrir les yeux, qui a provoqué ce feu d’artifice final. Mais… un roman d’amour !
Image : Montage depuis image libre de droit Pixabay
Texte : (c) Aurélie Depraz