L'Histoire (la grande !)

Petite histoire de l’Ecosse

Aux origines : des Celtes aux Romains

L’Histoire écrite de l’Ecosse ne commence qu’avec l’arrivée des Romains sur les terres d’outre-Manche. Jusqu’alors, ne peuplent les îles de l’archipel britannique que des tribus celtes et guerrières, de tradition orale et druidique. Les « brochs » (fortifications rondes) et mégalithes sont les seuls vestiges de cet âge de fer écossais.

Malgré quelques expéditions outre-mer sous Jules César, ponctuelles et sans lendemain, les Romains n’arrivent vraiment en Grande-Bretagne qu’en 43 ap. J-C. Ils colonisent jusqu’en 71 ce qu’ils appelleront la province de Britannia (ou « Bretagne ») : la moitié sud de l’île principale de l’archipel (Angleterre + pays de Galles actuels), dont les peuples bretons sont rapidement romanisés.

L’armée romaine tente également quelques excursions au nord de l’île (=Ecosse actuelle), sur les terres des peuples calédoniens, mais aucune d’elles n’est concluante : les « Pictes », tels que les appellent bientôt les colonisateurs en raison des peintures de guerre dont ils se parent le corps, opposent une résistance farouche et refoulent systématiquement leurs envahisseurs vers le sud. Dans la culture gréco-romaine antique, l’Écosse passe alors d’ailleurs pour une région périphérique, sauvage, indomptable et à l’écart des avancées provenant du monde méditerranéen.

Bientôt, la frontière se stabilise entre la Calédonie (terre libre et constituée d’une confédération de peuples celtes insoumis) au nord et la province romaine colonisée de Britannia au sud. Entre les deux : le fameux mur d’Hadrien, puis celui d’Antonin, érigés par les Romains eux-mêmes pour se protéger de ces « sauvages » qui leur mènent la vie dure sous les latitudes nord. Des avant-postes romains et quelques tribus romanisées localisées entre les deux murs servent de tampon entre Britannia et Caledonia et permettent aux Romains de sécuriser le périmètre.

Antiquité tardive et Haut Moyen-âge : nouveaux peuples, nouveaux conquérants

Avec le début des grandes migrations (aussi dites, à tort selon la plupart des historiens, « invasions ») barbares qui menacent l’empire romain continental et le conduiront à sa dislocation, l’armée romaine est rappelée sur le continent pour défendre le limes : les frontières nord et est, de plus en plus poreuses, régulièrement franchies par des hordes de tribus venues du centre, du nord et de l’est de l’Europe (Wisigoths, Ostrogoths, Vandales, Burgondes, Suèves, Francs, Alamans, Lombards…). Les troupes romaines quittent donc l’île vers 407 pour défendre de plus importantes provinces de l’empire, comme la Gaule… et Rome même.

Les Pictes en profitent pour multiplier les raids vers le sud, franchir les murs, et fonder plusieurs royaumes au nord et nord-est de l’île.

Les Scots envahissent le sud-ouest de l’actuelle Ecosse depuis l’Irlande et fondent le royaume de Dalriada (Hébrides et contrée d’Argyll : vous l’aurez reconnu, il s’agit du cadre géographique morcelé et insulaire de Pour l’amour d’une Sasunnach, ma première romance écossaise).

Les Bretons (du sud), livrés à eux-mêmes, abandonnés des légions romaines, organisent donc seuls leur défense, constituent une série de royaumes indépendants et invitent les Saxons, les Jutes et les Angles (des peuples germaniques du nord de l’Allemagne et du Danemark actuels), pressurisés à l’est, au nord et au sud par d’autres peuples « barbares », et en quête de débouchés, à s’installer sur la côte est de la Grande-Bretagne, moyennant leur aide contre les Pictes du nord.

Les nouveaux venus se retournent vite contre les Bretons eux-mêmes et prennent alors, au fil de l’Histoire, le statut de nouveaux envahisseurs. Ils sont représentés sous un angle particulièrement cruel et sanguinaire dans le film Le Roi Arthur de 2004 (avec Clive Owen et Keira Knightley), film qui met en scène, précisément, mais avec une chronologie quelque peu compressée, les résistances pictes au nord du « mur », le retrait des légions romaines, le rapatriement des troupes impériales vers Rome, et le débarquement des Anglo-Saxons en Angleterre.

Les Bretons, ainsi pris entre trois feux (les Pictes au nord, les Scots et autres celtes irlandais à l’ouest et les tribus germaniques qui déferlent sur les côtes est) se replient pour les uns au nord-ouest de l’Angleterre actuelle pour fonder les royaumes du Strathclyde et de Bernicie (cette dernière sera très vite absorbée par la Northumbrie, voir ci-après) ; les autres fuient leur « Grande » Bretagne natale, prennent la mer… et se réfugient sur les côtes armoricaines du continent… La nouvelle et petite « Bretagne » est née…

Les Saxons fondent, au sud, les royaumes du Sussex (« Sud-Saxe ») du Wessex (« Ouest-Saxe »), de l’Essex (« est-Saxe »). Les Jutes, le Kent. Les Angles, au nord et à l’est, les royaumes de Northumbrie (à cheval sur le sud-est de l’Ecosse et le nord-est de l’Angleterre), d’Est-Anglie (à retenir pour ma seconde romance, en cours d’édition, dont l’intrigue se déroule entre les rivages du Jutland – Danemark – et ceux d’Est-Anglie), et de Mercie. Dans l’Histoire anglaise, c’est ce qu’on appellera l’heptarchie (« sept royaumes ») : un système qui perdurera – tant bien que mal, on s’en doute – pendant des siècles.

NB : Dans Pour l’amour d’une Sasunnach, mon premier roman, Alannah, mon héroïne, jeune aristocrate anglaise, vient précisément du Northumberland (comté anglais issu de l’ancien royaume de Northumbrie – découpage toujours en vigueur aujourd’hui : il s’agit du comté occupant l’extrême nord-est de l’Angleterre actuelle) et il est dit de ses ancêtres qu’ils sont issus (côté maternel) des premières tribus d’envahisseurs angles et saxons…

NB 2 : Le terme de « Sasunnach », en gaélique écossais ancien (équivalent de « Sassenach », en gaélique moderne, pour les fans de la série Outlander), signifie justement, à l’origine, « Saxon(ne) » : il permet, pour les Ecossais, et depuis des siècles, de désigner les Anglais (ces « Angles », ces « Saxons », donc ces étrangers, ces « outlanders » – au sens strict –, ces envahisseurs venus d’outre-Manche) en opposition aux origines plutôt scots et pictes des Ecossais… – fin de la petite parenthèse…

Bientôt, la Grande-Bretagne n’est donc qu’un ensemble morcelé composé de nombreux royaumes :

  • Le Strathclyde et la Bernicie brittoniques (Bretons d’origine)
  • La Northumbrie, l’Est-Anglie et la Mercie angles
  • Le Sussex, le Wessex, l’Essex saxons
  • Le Kent jute
  • Les royaumes pictes au nord
  • Le Dalriada des Scots venus de l’Ulster (Irlande du nord), au sud-ouest de l’Ecosse

Moyen-âge central : arrivée des Vikings et fondation du royaume d’Alba

Aux VIIIe, IXe et Xe siècle, un nouveau peuple d’envahisseurs vient s’en mêler… Vous l’aurez deviné : les Vikings. Tandis que les Norvégiens s’en prennent au nord et à l’ouest du Royaume-Uni actuel (Shetland, Orcades, Hébrides intérieures, Hébrides extérieures, nord et ouest de l’Ecosse – Caithness, Galloway, Sutherland –, Irlande), les Danois harcèlent les côtes est et sud de l’île principale (Est-Anglie, Kent, Mercie, Northumbrie, Sussex…). Des régions entières sont conquises (archipels et côtes du nord de l’Ecosse, Est-Anglie, Northumbrie…), d’autres criblées de comptoirs commerciaux (Irlande). Ces grandes invasions vikings sont justement le cadre chronologique de ma 2e romance, L’amour, la mer, le fer et le sang, qui commence en Scandinavie pour se dérouler ensuite sur les côtes d’Est-Anglie, comme mentionné précédemment, et de ma 4e romance, Shaena, qui se déroule en 1214 dans le Caithness (extrême nord de l’Ecosse) et l’archipel des Orcades (alors toujours aux mains des Norvégiens).

Mais revenons-en à l’Histoire de l’Ecosse plus précisément.

Les Pictes (peuple celte d’origine, rappelons-le), résistent vaillamment aux Vikings mais ne peuvent s’opposer à leur établissement sur les îles et les rivages septentrionaux et occidentaux de leur chère Calédonie.

En 843, Kenneth Mac Alpin, roi des Scots de Dalriada, unit Scots et Pictes (à l’exception des Pictes du royaume de Morray, dans l’extrême-nord) en fondant le royaume d’Alba (que je mentionne à de nombreuses reprises dans Pour l’amour d’une Sasunnach), nom médiéval de l’ancien royaume d’Ecosse. Pour de nombreux historiens, cette « union » constitue en effet l’acte de naissance de l’Ecosse (« Alba » étant le nom gaélique de l’« Ecosse » et celui que crie William Wallace, alias « Braveheart », alias Mel Gibson, au moment de mourir pour la liberté et l’indépendance de sa patrie, dans le film de 1995).

En réalité, la réelle genèse du royaume d’Alba, qui émerge à cette époque, reste inconnue, et la figure de Kenneth Mac Alpin largement indéterminée, voire en partie légendaire. Ce qui est certain, c’est qu’on assiste à une dissolution de la culture picte au profit de la culture scot lors de cette fusion : officialisation du gaélique (langue des Scots) comme langue de cour, scotisation du Pictland, annihilation de la culture picte…

A partir du Xe, l’Ecosse annexe petit à petit le Strathclyde des Bretons au sud-ouest de sa frontière (et dont la moitié sud sera finalement reprise par l’Angleterre un peu plus tard) ainsi que le royaume picte de l’extrême nord (Morray), tandis que la Northumbrie va à l’Angleterre et les îles (Orcades, Hébrides, Shetland, comtés de Caithness et Sutherland…), toujours aux Vikings (qui ne les « rendront » définitivement à la couronne d’Ecosse qu’au XVe s. ! – voir, encore une fois, mon roman Shaena).

NB : MacBeth (le célèbre héros tragique de Shakespeare) est un personnage authentique de l’Histoire médiévale. Entre meurtres et trahisons, il régnera pendant 17 ans sur l’Ecosse au XIe s.

Du IXe au XIIe siècle donc, le jeune royaume d’Ecosse impose son hégémonie sur la partie nord de l’île ; mais au sud, l’Angleterre, profitant des guerres civiles et rivalités entre clans, légendaires, la convoite et parvient à la garder plus ou moins sous son emprise à coup de tributs à verser et de liens de vassalité imposés. Entre autres en raison de ces incessantes querelles et dissensions entre tribus et clans celtiques, l’Ecosse ne parviendra jamais à constituer un grand royaume unifié.

Le Moyen-âge tardif : les guerres d’indépendance contre l’Angleterre

La frontière entre Ecosse et Angleterre est plus ou moins fixée au XIIIe s. (et correspond à peu près à celle d’aujourd’hui). Mais les Anglais envahiront l’Ecosse à de nombreuses reprises, au cours de longs siècles de conflits, du Moyen-âge tardif à la fin du XVIIIe s…

Au tout début du XIVe siècle, en effet, on assiste à une crise de succession en Ecosse : en 1286, le roi d’Ecosse Alexandre III meurt ; c’est sa petite-fille Marguerite (fille d’Eric II de Norvège et de Marguerite d’Ecosse) qui reçoit la couronne. Edouard Ier d’Angleterre la reconnaît comme reine, admet l’indépendance de l’Ecosse, mais fait signer aux aristocrates écossais le traité de Birgham qui promet la jeune souveraine à son fils. Mais la fillette n’a que 3 ans et meurt lors de la traversée qui devait l’amener de Scandinavie en Ecosse. Treize prétendants au trône se mettent alors à fragiliser le pays de leurs ambitions respectives et commettent l’erreur de prendre Edouard Ier d’Angleterre comme arbitre.

Des deux prétendants les plus sérieux à la couronne écossaise, Robert Bruce et Jean Baliol, Edouard tranche en faveur du second, à condition que celui-ci se pose en vassal (et le reconnaisse donc comme suzerain). Mais lorsqu’Edouard lui réclame une armée pour le soutenir contre la France en 1294, Jean Baliol refuse, rompt son serment d’allégeance et préfère s’allier avec les Français. Edouard envahit l’Ecosse. C’est le début des guerres d’indépendance écossaises : c’est, encore une fois, le contexte du film « Braveheart », avec ses héros légendaires (William Wallace, Andrew de Morray, Robert Bruce).

Pour faire court, après plusieurs grandes batailles (Stirling – victoire écossaise –, Falkirk – victoire anglaise –, Bannockburn – victoire finale de Robert Bruce en 1314) l’Angleterre reconnaît finalement l’indépendance de l’Ecosse, qui s’allie pour de bon avec la France (ennemie jurée de l’Angleterre) de Philippe le Bel en scellant l’ « auld alliance », une longue amitié qui traversera les siècles et l’inconscient collectif et explique probablement en partie l’affection profonde qui unit encore nos deux peuples (un peu à la manière de l’amitié franco-québécoise ; j’aimerais approfondir cette question dans un futur article…).

En 1328, Edouard III d’Angleterre (50 ans de règne ! de 1327 à 1377) ratifie le traité de Northampton (que je mentionne dans mon roman), reconnaissant ainsi l’indépendance de l’Écosse sous le règne de Robert Ier (Robert Bruce). Cependant, un an plus tard, après la mort de ce dernier, l’Angleterre envahit une fois encore l’Écosse dans le but d’y restaurer un roi qui leur est soumis, en la personne d’Edouard Baliol, fils de Jean Baliol, ce qui déclenche la seconde guerre d’indépendance écossaise.

En l’absence de bons stratèges militaires et de héros comme pendant la première guerre d’indépendance, l’Écosse demeure sous contrôle anglais pendant plus de trente ans. Elle ne regagne son indépendance que sous le règne de David II (fils de Robert Bruce), après la mort d’Édouard Baliol en 1367, principalement parce que l’attention d’Édouard III se tourne, depuis la fin des années 1330, vers la France contre laquelle l’Angleterre déclenche la Guerre de Cent Ans (1337-1453).

C’est donc Robert Bruce, grand vainqueur de ces guerres d’indépendances, qui fonde la première dynastie écossaise à l’issue de décennies de conflits. Suivra celle des Stuarts (d’origine française !) à la fin du XIVe s. (contexte historique de Pour l’amour d’une Sasunnach) : le premier d’entre eux, Robert II, aura épousé la dernière fille de la dynastie Bruce… pour ainsi finir sur le trône à la mort du dernier descendant mâle des Bruce (David), en 1371. L’indépendance acquise ne sera plus remise en question… pendant deux siècles.

NB : l’histoire de Pour l’amour d’une Sasunnach se déroule en 1374 : précisément au moment où l’indépendance et la souveraineté de l’Ecosse sont donc enfin reconnues et où les risques d’invasion par le sud diminuent. J’explique tout ce contexte (trêve avec les Anglais, report des velléités d’Edouard III sur la France, temps de (re-)construction du pays… au début de mon roman).

Autre fait marquant : à la fin du XVe s. ont lieu les dernières extensions du territoire écossais : le roi Jacques III Stuart épouse Marguerite de Danemark, recevant les Orcades et les Shetland pour dot. Puis, après lui, Jacques IV réussit à mettre un terme à la quasi-indépendance du Lord des îles, seigneur jusque-là extrêmement puissant, amenant ainsi l’intégralité des Hébrides sous contrôle royal pour la première fois. L’Ecosse a ses frontières pour ainsi dire définitives. Elle est unifiée.

Cependant, durant les XVe et XVIe siècles, elle ne cessera d’être menacée par l’Angleterre, notamment en raison de son traité d’alliance avec la France : chaque fois que ces deux puissances européennes se font la guerre, l’Ecosse est prise à parti, et de nombreux soldats écossais se battront sur le sol français durant la Guerre de Cent Ans (y compris aux côtés de Jeanne d’Arc). Sans compter les velléités anglaises concernant le nord de l’île qui ne se sont pas complètement éteintes…

Première union avec l’Angleterre… sous un monarque écossais

Au début du XVIIe s., la reine Elizabeth Iere d’Angleterre (la « reine vierge », de la dynastie des Tudor, et qui ne se sera jamais mariée) meurt sans enfant. C’est alors son cousin Jacques VI d’Ecosse qui hérite de l’Angleterre sous le nom de Jacques Ier ; il est alors roi d’Ecosse ET d’Angleterre… La première « union » des deux pays s’est donc articulée autour d’un roi… écossais ! Le nom de l’Union Jack (le drapeau britannique), selon certains, viendrait de son nom.

NB : en réalité, si le nom du drapeau anglais peut tout à fait provenir de ce premier roi à doter l’Angleterre et l’Ecosse d’un drapeau commun, d’autres hypothèses attribuent l’origine du mot « jack » au lexique de la marine : la Royal Navy fut la première grande utilisatrice de ce drapeau et « jack » est le terme anglais pour désigner les pavillons de marine… (surtout que « Jacques Ier », en anglais, n’est pas « Jack 1st », mais « James 1st » !)

C’est le fils de Jacques Ier d’Angleterre (et VI d’Ecosse), Charles Ier, qui devra affronter la Grande Révolution d’Angleterre (contexte des guerres de religion, de la Glorieuse révolution…) et sera décapité par Cromwell (en 1649, soit un siècle et demi avant notre propre révolution !). Avec Jacques Ier/VI, les guerres civiles/de religion, l’occupation de Cromwell, la Guerre des Trois Royaumes et la restauration de la monarchie, l’Histoire de l’Ecosse rejoint définitivement celle, alors fort tourmentée, de l’Angleterre. Quand on y regarde de plus près, on n’est pas loin (du tout) de Game of Thrones !!

Mais en raison de ces troubles internes conséquents et de leurs convictions religieuses, les Stuarts, en quelques décennies, sont affaiblis puis évincés du trône à la fois écossais et anglais ; et c’est là que les fans d’Outlander – comme de très nombreuses autres romances écossaises – trouveront les racines du contexte historique de leur série préférée !^^

L’émergence de la cause jacobite : de sombres décennies pour l’Ecosse

En effet, en 1701, sous Anne Stuart (reine d’Angleterre et d’Ecosse, donc), l’Acte d’Etablissement (« Act of Settlement »), loi anglaise promulguée par le Parlement de Westminster, garantit la succession de la couronne d’Angleterre aux membres de la famille protestante de Hanovre liée aux Stuart par une fille de Jacques Ier (premier roi à la fois d’Ecosse et d’Angleterre, pour mémo), Elisabeth Stuart, femme de l’électeur palatin Frédéric V de Bavière. Cette disposition visait à exclure l’intronisation d’un roi favorable au catholicisme et à couper la route du pouvoir au prétendant catholique Jacques François Edouard Stuart, également descendant des Stuart et demi-frère d’Anne.

Si bien que, lorsque cette dernière meurt en 1714, sans héritier mâle (malgré 17 grossesses !), près de cinquante prétendants catholiques au trône furent écartés (en raison de l’Acte d’établissement de 1701), et que le successeur d’Anne fut son cousin, l’électeur protestant du Hanovre, Georges Ier (un germanique, donc, ce qui déplaira à beaucoup). Anne fut donc la dernière souveraine de la Maison Stuart et Georges de Hanovre devient roi de Grande-Bretagne et d’Irlande.

« Roi de Grande-Bretagne », oui, et non « d’Ecosse et d’Angleterre », comme c’était le cas pour tous les Stuart jusqu’à Anne, car entre-temps, il convient de rappeler qu’en 1707, l’acte d’Union a unifié les deux couronnes en une seule. Les deux parlements (écossais et anglais) ont signé ce traité par lequel l’Ecosse, pour des raisons principalement économiques, toujours très décriées de nos jours, renonce à son indépendance : les deux parlements sont dissous au profit d’un seul… qui siège à Londres.

Sans trop entrer dans les détails, cette union devait permettre à l’Ecosse (pauvre et en retard du point de vue économique, après avoir essuyé, à la fin du XVIIe s., plusieurs catastrophes économiques – mauvaises récoltes, famines, échecs coloniaux et commerciaux, projets ambitieux tournant au fiasco, protectionnisme anglais –) de profiter de la puissance et des débouchés commerciaux de ce qui était alors l’empire colonial anglais. Même si ce ralliement permettra effectivement à l’Ecosse de prendre place au sein du siècle des Lumières, de jouir des bénéfices du progrès et de prendre part à la révolution industrielle, cette décision sera loin de faire l’unanimité et beaucoup de patriotes écossais estimeront avoir été floués par une élite aristocratique uniquement soucieuse de ses propres intérêts financiers.

Bref ! Beaucoup de changements au tournant du XVIIIe ! L’Ecosse perd sa souveraineté, fusionne avec l’Angleterre et la toute nouvelle Grande-Bretagne ainsi créée passe aux mains des Hanovre.

Cependant, le demi-frère d’Anne Stuart et héritier légitime de la dynastie Stuart, Jacques-Edouard, catholique (précédemment cité) et en exil sur le continent, est reconnu par beaucoup comme le véritable souverain légitime de la Grande-Bretagne sous le nom de Jacques III : il se fait chef du parti jacobite (du prénom « Jacques »), compte de nombreux partisans et tentera, à plusieurs reprises, de reprendre le trône aux Hanovre. Et , commence vraiment le contexte historique d’Outlander, mais aussi :

  • de romances de Nora Roberts comme Serena la rebelle (de la série « Le clan des McGregor »)
  • et de l’histoire de Rob Roy, sorte de Robin des bois écossais, personnage réel bientôt transformé en héros romanesque par Sir Walter Scott, puis porté au cinéma à plusieurs reprises, notamment en 1995 (avec Liam Neeson).

Le tableau ? Les expéditions jacobites successives (1708, 1715, 1745), l’insubordination légendaire des Highlands, les mécontentements successifs suscités par les décisions du gouvernement de Londres concernant l’Ecosse, le débarquement de Bonnie Prince Charlie, fils de Jacques-Edouard, en 1745, le massacre de Culloden, la persécution conséquente des highlanders par les troupes anglaises de Cumberland (véritable chasse à l’homme, une campagne punitive monstrueusement cruelle, connue sous le nom de « Highland clearances », qui conduira de nombreux highlanders à fuir vers les Amériques – comme dans Serena la rebelle de Nora Roberts, et donnera au duc de Cumberland, chef de l’armée anglaise, le doux surnom de « Boucher »), la disparition du système clanique, les interdictions culturelles, l’oppression des highlanders… et la fin de la cause jacobite.

Pour en savoir plus sur Bonnie Prince Charlie et sa cuisante défaite, je vous invite à écouter ce podcast d’Europe 1 : https://www.youtube.com/watch?v=bmOowC_fgmA
Un personnage tragico-romantique qui inspirera beaucoup d’œuvres populaires et de chansons patriotiques… Toujours considéré comme un héros, au même titre que William Wallace et Robert Bruce, grand rejeté de l’Histoire, à la fois ridiculisé et héroïque, il incarne toujours aujourd’hui le rêve d’une Ecosse libre.

Après Culloden, donc, les autorités britanniques agissent de manière à supprimer le plus rapidement possible la culture traditionnelle écossaise (tartan-plaid-kilt, cornemuse, système clanique, système féodal traditionnel…). De nombreux écossais fuient vers les colonies américaines (Virginie, Caroline, Canada) ; d’autres sont recrutés, en tant que soldats, pour servir dans le vaste empire britannique ; la population diminue sensiblement et certaines régions se désertifient lorsque d’autres encore sont embauchés par les premières usines de la révolution, pour la fabrication de textiles en lin, qui se développe en Écosse.

Période contemporaine

A la fin du XVIIIe siècle cependant, la situation économique de l’Ecosse s’améliore : elle entre pleinement dans la première révolution industrielle britannique (industrie lourde, construction navale, urbanisation) et dans l’esprit des Lumières (avec des intellectuels comme Adam Smith, David Hume, James Watt…), puis dans le romantisme européen (au XIXe) avec Walter Scott qui, en auteur prolifique de ballades, de poèmes et de romans historiques, évoque de façon romantique la vie écossaise des siècles passés et contribue à glorifier avec nostalgie les symboles de la culture traditionnelle gaélique.

La Première Guerre Mondiale porte un nouveau coup dur à l’Ecosse, et notamment aux Highlands : les highlanders sont enrôlés de manière plus importante que dans le reste de la population et une génération entière de jeunes hommes est décimée. Durant l’entre-deux-guerres, les difficultés s’enchaînent : dépopulation, mauvaises conditions sanitaires, agitation sociale, répression gouvernementale britannique (encore…) à coup de chars d’assaut à Glasgow et Edimbourg, chômage, Grande Dépression…

Durant la Seconde Guerre Mondiale, les infrastructures écossaises (chantiers de production) sont des cibles prioritaires pour l’Allemagne. Les Highlands fournissent encore une fois un grand nombre de troupes ; la bataille de l’Atlantique force les convois militaires à naviguer dans le nord de l’océan, et l’Ecosse joue alors un rôle important dans la résolution du conflit. Comme lors de la Première Guerre Mondiale, Scapa Flow, dans les Orcades, est une base importante de la Royal Navy. La proximité relative des Shetland et de la Norvège permet l’instauration du Shetland bus, des chalutiers aidant des Norvégiens à fuir l’occupation nazie, ainsi que d’expéditions dans la mer du Nord.

Comme durant l’entre-deux-guerres, les années suivant la fin de la Seconde Guerre Mondiale présentent leur lot de difficultés : la situation économique de l’Ecosse devient de plus en plus problématique. Un changement a lieu à partir des années 70 avec la découverte du pétrole et du gaz de la mer du Nord et la conversion de l’économie écossaise à l’industrie des services.

Côté politique, les velléités indépendantistes et la résistance au joug anglais sous loin d’être totalement éteintes :

  • le Scottish National Party et de nombreux autres mouvements pour l’indépendance de l’Ecosse se développent (cf. l’action militante de Geillis en 1968 dans Outlander) ;
  • plusieurs référendums sont tenus concernant la question de la décentralisation du pouvoir (1979, 1997) : la réponse positive à celui de 1997 amène le rétablissement du parlement écossais à Edimbourg ;
  • Le 18 septembre 2014, sous l’impulsion du Premier Ministre britannique David Cameron, un référendum sur l’indépendance de l’Ecosse est organisé. La question des conséquences d’une telle indépendance fait alors la Une de l’actualité. Mais à la question « Should Scotland be an independent country? » les Écossais ont répondu non à 55,4 %. L’Écosse reste donc un membre à part entière du Royaume-Uni.

Une série d’événements qui ne sont pas sans montrer que, malgré tout, et depuis des siècles, la question de la volonté d’indépendance des Ecossais demeure entière, et qu’elle constitue un débat toujours vif au sein de la population.  

    Pour un résumé total de l’Histoire de l’Ecosse en images (très engagé pro-Ecosse attention), suivez ce lien : une vidéo très illustrée, mais… intense ! Accrochez-vous ! https://www.youtube.com/watch?v=gylScpF1pfo

    Plus digeste, sur l’Histoire de l’Ecosse de la chute de l’Empire Romain à l’émergence du royaume d’Alba (donc Antiquité tardive et Haut Moyen-âge) : https://www.youtube.com/watch?v=7GYncwWb4l4&t=3s

    Pour en savoir plus sur mon roman Pour l’amour d’une Sasunnachcliquez ici.

Texte : Aurélie Depraz
Illustration (drapeau) : Pixabay

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