La romance a connu un tel engouement ces 60 dernières années qu’on a vu fleurir une myriade de sous-genres au fur et à mesure que tel ou tel auteur se permettait de lui donner une coloration particulière ou de l’associer à un autre genre littéraire. La romance est ainsi devenue un monde tentaculaire aux multiples ramifications, au point que certains éditeurs estiment, comme je l’ai mentionné dans un autre article, qu’il naîtrait presque un sous-genre de la romance par an depuis l’an 2000… Petit tour d’horizon.
La romance contemporaine (ou « new romance »)
Le sous-genre le plus lu et le plus publié dans le monde : des romances se déroulant des années 50 à nos jours, mais ayant pour point commun de se dérouler à l’époque correspondant à celle de leur auteur, qui décrit donc systématiquement la société et les mœurs de son temps.
L’inconvénient inhérent à ce sous-genre est qu’il est « consommé » précisément parce qu’il reflète le propre monde du public, qui s’identifie donc particulièrement bien aux héros, ce qui conduit les intrigues à être jugées comme démodées 10, 15 ou 20 ans plus tard (condition de la femme, emplois féminins, rapport à la maternité, technologie… tout change très vite).
Aux Etats-Unis (encore et toujours leader mondial de ce genre, tant en termes de production que de consommation, cf. cet article), on va même jusqu’à diviser ce sous-genre en autant de catégories qu’il y a de types d’intrigues récurrentes (holiday romance, workplace romance, glamour & Jetset, cowboy contemporary romance…)
La romance « blanche » ou « médicale »
Les histoires se déroulent bien sûr dans un milieu médical, souvent hospitalier, le plus souvent dans les services urgentistes, ou bien de secours, ou bien encore de chirurgie – propices au fantasme du sauveur – mais aussi pédiatriques, gynécologiques et de néonatologie – pratiques pour nouer et justifier les intrigues et la rencontre héros/héroïne.
A noter (peut-être contre toute attente) : point de relation médecin-patiente ici (ou infiniment rarement), les auteurs respectant, consciemment ou non, le code déontologique de la profession condamnant moralement ce genre de relations. Les héroïnes sont donc souvent elles aussi issues du corps médical (infirmières, mais aussi médecins : pédiatres etc.)
Il s’agit bien sûr, dans une certaine mesure, d’une forme de romance contemporaine, au sens où l’intrigue se passe de nos jours. Mais la prégnance de l’univers médical est tellement importante et ce cadre est tellement spécifique qu’un sous-genre entier a été créé pour en identifier les titres. Et qu’Harlequin a été jusqu’à innover avec sa série « Blanche » identifiable par un bandeau vert (comme l’uniforme infirmier) sur le côté. C’est un peu l’univers Grey’s Anatomy, en somme.
La romance policière ou « romantic suspense »
Il s’agit bien sûr de la croustillante fusion d’une romance et d’un polar : il implique en ce sens une enquête en cours avec tous les enjeux traditionnels d’un mystère à résoudre. Scénario-type : l’héroïne est victime d’une agression/tentative de viol/de meurtre et doit collaborer avec le héros (dont le statut le place d’office dans une position de protecteur : garde du corps, marine, officier de police, agent du FBI) ; à la fin de l’histoire, ils ont bien sûr résolu l’enquête tout en tombant amoureux.
Petite particularité de ce sous-genre : si l’histoire d’amour reste au cœur de l’ouvrage (on parle bien toujours de romance, et non de polar à tendance érotique par exemple), l’enquête occupe également pour sa part une telle place qu’il faut habilement jongler entre ces deux piliers qui fondent l’intrigue et s’influencent mutuellement : car si c’est en l’occurrence l’intrigue policière qui propulse l’histoire d’amour en avant (et non les hésitations psychologiques des personnages, comme c’est souvent le cas dans d’autres formes de romances), en revanche ce sont l’attirance et les sentiments croissants que les deux protagonistes éprouvent l’un pour l’autre qui conditionnent leurs décisions, leur façon de gérer l’enquête et qui insufflent davantage encore de tension au mystère : l’enjeu amoureux renforce la dangerosité de l’intrigue, l’investissement personnel des héros et leur volonté de protéger l’autre.
Souvent aussi, la résolution du mystère éclaire a posteriori la personnalité du héros (qui pouvait rester secrète ou difficile à percer jusque-là – un beau ténébreux, en somme) tout en amenant l’héroïne à tomber follement amoureuse de lui. Evidemment, d’autres ingrédients peuvent venir pimenter le genre : amnésie, dimension historique à la Ken Follett…
La romance historique
En tant que passionnée d’Histoire, il s’agit bien sûr de mon genre de prédilection !:) Il fera donc l’objet d’un article à part entière (oui, c’est comme ça ici !^^). L’idée est bien sûr de placer l’histoire d’amour dans un cadre historique fouillé, pour lequel l’auteur a souvent procédé à un important travail de documentation.
On considère que les romances sont historiques lorsqu’elles se déroulent avant la Deuxième Guerre Mondiale. La romance historique est à la fois un sous-genre de la romance et un sous-genre du roman historique. C’est le deuxième genre le plus populaire, après la romance contemporaine.
La romance historique a ses périodes de prédilection, propices au rêve et au fantasme. Cela fait l’objet de trois autres articles disponibles sur ce blog, intitulés « Les sous-genres de la romance historique » (tapez juste « sous-genres » dans la barre de recherche ci-contre).
La dark romance
Elle met en scène de jeunes adultes (étudiants ou jeunes actifs) et traite de problématiques, comme son nom l’indique, plutôt sombres : traumatismes psychologiques, spirales infernales, vengeance, manipulation, enfance difficiles, drames… Elle flirte avec l’interdit (relations amoureuses condamnées par la loi ou la morale) et joue avec la frontière entre amour, désir et violence.
C’est évidemment un genre où l’on se permet plus souvent un « unhappy ending » que dans les autres sous-genres.
La romance érotique
Attention ! On ne parle ici ni de nouvelle érotique ni de roman érotique, mais bien de romance érotique. Une distinction très importante, que je détaillerai dans un prochain article (encore !!^^).
On s’en doute : le contenu sexuel y est plus explicite et plus abondant que dans d’autres sous-genres (quoique les scènes charnelles aient eu tendance à se multiplier, à s’approfondir et à se libérer au fil des décennies, évolution des mœurs, modernité et condition féminine aidant – exploration du plaisir féminin, suppression de certains tabous etc. On est désormais souvent très loin des chastes baisers, voire même du simple baisemain, voire de l’absence totale de contact physique, comme dans bien des romans de Barbara Cartland, par exemple).
Bref ! Toujours est-il que dans la romance érotique, on l’aura compris, l’aspect sensuel est particulièrement important ; on délaisse davantage les euphémismes privilégiés dans d’autres genres (romantic fantasy) ou à d’autres époques (années 60… je viens d’en parler). Le langage est plus cru, les moments passionnés plus fréquents, les scènes décrites parfois plus osées ou originales, on délaisse la tradition, on s’éloigne quelque peu du « fleur archi-bleue », MAIS on reste dans le domaine de la romance, donc du sentimental : l’amour (non physique, j’entends !) continue d’occuper une place fondamentale et justifie les actes sexuels (qui se passent plus volontiers de ce genre de motivations superflues dans la littérature érotique pure – sans parler de la pornographie, qui se passe de tout sentiment, de toute scénario et, pour ainsi dire, de toute mise en contexte).
La romance spirituelle
Un peu aux antipodes de la romance érotique, il s’agit d’un genre… sans surprise, très américain. Soyons plus précis : très « Amérique puritaine ». En résumé : des triangles amoureux homme/femme/Dieu. Aussi dite « inspirational romance » ou « romance religieuse », ce type de romance vise une élévation spirituelle du lecteur (de la lectrice…), la mise en avant de valeurs morales et chrétiennes (le pardon, la fidélité, la foi…), le respect de la règle de bienséance et de chasteté, et se trouve même dans les rayons des boutiques religieuses !
Une info qui ne surprendra pas les lectrices francophones de romance : ce genre n’est pas traduit en français (pas de public pour).
La romance multiculturelle ou ethnique
Encore un genre très américain. De toute façon, comme mentionné dans mon article traitant de l’apparition, de l’évolution et de l’Histoire de la romance, la romance en général est très anglo-saxonne. Il reste que certains genres sont particulièrement prisés aux Etats-Unis et quasi absents des rayonnages français : la romance spirituelle et la romance multiculturelle en tête, pour des raisons évidentes, mais aussi des sous-genres de la romance historique, comme l’Americana, la romance western, la romance indienne, les romances se déroulant dans le cadre colonial de la guerre d’indépendance des Etats-Unis ou dans celui de la Guerre de Sécession etc.) .
La romance ethnique met en scène une relation mixte avec un héros ou une héroïne afro-américain(e) la plupart du temps (parfois aussi, hispanique ou asiatique). L’auteur peut également être de couleur. Un genre donc très parlant aux Etats-Unis, encore une fois.
A suivre !
Pour ne pas faire trop long – et comme les 3 prochains genres appellent des précisions plutôt détaillées – je poursuis cet exposé des sous-genres de la romance dans un second article…
Texte : © Aurélie Depraz
Source photo : Pixabay
Bravo Aurelie pour cet article sur la romance, je n’imaginais pas qu’il y ait autant de sous genres. C’est très intéressant. J’attends avec impatience la suite.
Et il en reste, oui !!^^